Avis 20234968 Séance du 21/09/2023
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 29 juin 2023, à la suite du refus opposé par le maire de Marle à sa demande de copie, par courrier électronique, en sa qualité de conseiller municipal, des documents suivants :
1) s'agissant de la piscine :
a) le montant total des travaux y compris ceux effectués en régie et par toutes entreprises intervenantes (chaudière, pompe, etc.) ;
b) les conventions et contrats passés avec les sociétés X, X et X ;
c) la convention de mise à disposition du logement Victor Hugo pendant les travaux pour la société X ;
d) la convention de mise à disposition du logement Victor Hugo pendant les travaux pour la société X ;
e) les relevés de compteur et factures d’eau, de gaz et d’électricité pour 2021 et 2022 ;
f) l'attestation de formation des agents habilités à manier des produits dangereux ;
g) le bilan financier pour la période du 1er juin 2022 au 30 septembre 2020 ;
h) la preuve de mise en œuvre de la garantie décennale pour la piscine à la suite des malfaçons ;
2) s'agissant du Central :
a) l'ensemble des éventuelles décisions validées par le service de la légalité ;
b) les coordonnées de l’architecte en charge du chantier ;
3) s'agissant des biens sans maître, la décision concernant les biens sans maître lors du conseil municipal de décembre 2020 : « Le conseil municipal, après en avoir délibéré, à l’unanimité, - décide de saisir le service départemental des impôts fonciers afin de réviser la liste des biens sans-maître - délibération du 11 décembre 2020 » ;
4) les différentes masses salariales trimestrielles de la commune depuis mars 2020 ;
5) la dernière situation connue de l’encours de la dette communale (détaillé) ;
6) les dernières décisions concernant la maison de Madame X Faubourg Saint Martin ;
7) s'agissant des travaux de l'église :
a) l'autorisation des architectes des bâtiments de France (ABF) concernant le remplacement des dalles existantes par du carrelage du porche Sud de l’église ;
b) le dossier d’appel d'offres en vue de la recherche d’un maître d’œuvre pour les travaux futurs de l’église ;
8) la réponse de la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) faisant suite aux questions orales posées par le groupe d'opposition du demandeur lors du dernier conseil municipal (cf courrier du maire du 28 septembre).
La commission, qui a pris connaissance de la réponse du maire de Marle, rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas compétente pour se prononcer sur les droits d'information que les conseillers municipaux tirent, en cette qualité, de textes particuliers tel l'article L2121-13 du code général des collectivités territoriales, qui dispose que : « Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ». Toutefois, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que les élus puissent se prévaloir du droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration, qui est ouvert à toute personne, indépendamment des fonctions qu'elle exerce ou des mandats qu'elle détient.
En premier lieu, la commission estime que les documents visés aux points 1c), 1d), 1f), 1h), 4) et 8), s'ils existent, sont communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve toutefois, conformément à l'article L311-6 du même code, de l’occultation préalable des mentions couvertes par le secret de la vie privée ou qui comporteraient une appréciation ou un jugement de valeur. Elle émet donc un avis favorable sur ces six points, sous ces réserves.
En deuxième lieu, la commission rappelle qu’il résulte de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux du conseil municipal, des arrêtés municipaux, ainsi que des budgets et comptes de la commune. L’ensemble des pièces annexées à ces documents, y compris les pièces justificatives des comptes, sont communicables à toute personne qui en fait la demande, selon les modalités prévues par l’article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration.
La commission précise toutefois que si l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales a institué un régime spécifique d'accès aux documents des communes, distinct du régime général d'accès aux documents administratifs organisé par les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, et si les exceptions au droit d'accès prévues à l'article L311-6 de ce code ne sont pas opposables à une demande présentée sur le fondement de ces dispositions spéciales, l'exercice de ce droit d'accès particulier ne saurait faire obstacle, par principe, à la protection de secrets protégés par la loi sur d'autres fondements, tel que notamment le secret de la vie privée (CE, 17 mars 2022, n° 449620).
Elle émet, dès lors, un avis favorable aux points 1a), 1g), 2a), 3), 5) et 6) de la demande, sous cette réserve.
En troisième lieu, la commission rappelle que les documents produits et reçus par l’administration en matière d’autorisations individuelles d’urbanisme, telles que les permis de construire et de démolir et les déclarations de travaux, sont en principe communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration et, s'agissant des décisions expresses prises par le maire au nom de la commune ainsi que des pièces obligatoirement jointes au dossier au vu duquel elles sont prises, de l'article L2121-26 du code général des collectivités territoriales. Elle rappelle également qu'en vertu du principe de l'unité du dossier, le droit à communication s'applique à tous les documents qu'il contient, qu’ils émanent du pétitionnaire ou aient été élaborés par l’administration, notamment les avis émis préalablement à la délivrance de l’autorisation par exemple par les services de l'État (l'architecte des bâtiments de France avis n° 20080560), sous réserve que cette communication ne porte pas atteinte à un secret protégé par les articles L311-5 et L311-6 du même code, et qu’ils ne revêtent plus un caractère préparatoire, soit que la décision ait été effectivement prise, soit que l'autorité compétente ait renoncé à son projet. Elle émet, dès lors, un avis favorable au point 7a) de la demande.
En quatrième lieu, la commission considère que les factures d'eau se rattachent aux relations entre un service public à caractère industriel et commercial et ses clients, qui sont régies par le droit privé. En conséquence, ces factures ne sont pas des documents administratifs. La commission ne peut, dès lors, que se déclarer incompétente pour se prononcer sur le point 1e) de la demande.
En cinquième lieu, la commission rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit la commission d'appel d'offres à ne pas lui attribuer le marché ne permet pas de refuser la communication de ces documents.
Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code.
Il résulte de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, Centre hospitalier de Perpignan (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi du bordereau des prix unitaires.
L'examen de l’offre d’une entreprise attributaire au regard du respect du secret des affaires conduit ainsi la commission à considérer que l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ne sont pas communicables aux tiers, sans qu’il soit besoin de s’interroger sur le mode de passation, notamment répétitif, du marché ou du contrat, sa nature, sa durée ou son mode d’exécution.
L’examen de l’offre des entreprises non retenues au regard des mêmes principes conduit de même la commission à considérer que leur offre de prix globale est, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’est pas.
En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants :
- les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ;
- dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises.
La commission précise enfin que les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du marché sont librement communicables.
La commission émet, dès lors, et sous ces réserves, un avis favorable aux points 1b) et 7b) de la demande.
S'agissant du point 2b), la commission relève que le livre III du code des relations entre le public et l'administration garantit à toute personne un droit d’accès aux documents administratifs existants ou susceptibles d’être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant, mais ne fait pas obligation aux autorités administratives de répondre aux demandes de renseignements qui leur sont adressées.
La commission ne peut, dès lors, que se déclarer incompétente pour se prononcer sur ce point de la demande d'avis, qui porte en réalité sur des renseignements.
Enfin, elle prend note de l'intention prochaine du maire de Marle de procéder à la communication des documents qui n'auraient pas été transmis au demandeur.