Avis 20226109 Séance du 03/11/2022
Maître X, conseil de la commune X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 6 octobre 2022, à la suite du refus opposé par la présidente d'Ile-de-France Mobilités à sa demande de communication, sans occultations excessives, des documents suivants :
1) le contrat de délégation de service public (annexes incluses) passé le 18 novembre 2021 par Île‐de‐France Mobilités avec la société X, ayant pour objet l’exploitation des lignes de bus desservant l’ouest de l’agglomération de Saint‐Germain Boucles de Seine (DSP‐2019‐005) ;
2) les procès‐verbaux de la commission de délégation de service public du 2 septembre 2019, du 25 septembre 2019 et du 3 juin 2020 relatifs à la passation de ce contrat ;
3) les courriers adressés aux soumissionnaires en vue de chaque tour de négociation ;
4) les comptes rendus de chaque tour de négociation avec les différents soumissionnaires ;
5) le rapport sur le choix du délégataire et l’économie générale du contrat ;
6) l’intégralité du dossier de consultation des entreprises (DCE) initial, comprenant a minima le projet de contrat, le règlement de consultation, ainsi que les données historiques sur le service ;
7) les études et analyses réalisées, ainsi que les méthodes employées, pour estimer la fréquentation des bus desservant la commune d’Aigremont avant l’entrée en vigueur du contrat de délégation précité ;
8) toutes informations et données relatives au coût du service sous l’empire du précédent contrat CT3 et au coût prévisionnel sous l’empire du nouveau contrat de délégation.
En l'absence de réponse de la présidente d'Ile-de-France Mobilités à la date de sa séance, la Commission rappelle à titre liminaire, qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique : « I.-Sous réserve des articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l'administration et sans préjudice de l'article L114-8 du même code, les administrations mentionnées au premier alinéa de l'article L300-2 dudit code sont tenues de communiquer, dans le respect de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, les documents administratifs qu'elles détiennent aux autres administrations mentionnées au même premier alinéa de l'article L300-2 qui en font la demande pour l'accomplissement de leurs missions de service public. »
La Commission considère, en l'espèce, eu égard à la nature des documents et au contexte de la demande, que cette dernière est formulée par le maire d’Aigremont pour l'accomplissement des missions de service public de sa commune. Elle se déclare donc compétente pour traiter de la présente demande d'avis sur ce fondement.
Ce droit de communication doit toutefois s’exercer dans le respect des secrets protégés par la loi, en particulier le secret des affaires, protégé par l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration.
La Commission rappelle, à cet égard, qu'une fois signés, les délégations de service public définies comme des contrats de concession de travaux ou de service au sens du code de la commande publique (L1121-1 à L1121-3) et les documents qui s'y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration.
En application de ces principes, la Commission estime, en particulier, que les documents du dossier de consultation des entreprises se rapportant à la convention initiale, tels que le cahier des charges ou le règlement de consultation ne revêtent jamais un caractère préparatoire et ne sont pas couverts par le secret des affaires. Ces documents sont, dès lors, intégralement communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration. Il en va de même de la liste des entreprises ayant participé à la procédure.
Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Sont notamment visées par cette réserve les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des contrats publics.
La Commission considère de façon générale que, sous réserve des particularités propres à chaque délégation :
- l'offre détaillée de l'entreprise retenue est en principe communicable, dans la mesure où elle reflète la qualité et le coût du service rendu à l’usager ;
- l'offre globale des entreprises non retenues est, en principe, elle aussi communicable. En revanche, le détail technique et financier de leurs offres ne l’est pas. De plus, doivent être occultées dans les documents préalables à la conclusion du contrat de concession (procès-verbaux, rapports de la commission de délégation de service public et de l'autorité habilitée à signer le contrat, documents relatifs à la négociation des offres…) les mentions relatives aux détails techniques et financiers de ces offres ;
- de la même manière, si les moyens techniques et humains mentionnés dans les offres des candidats sont protégés par le secret des affaires, certaines mentions se rapportant au cocontractant, tels que le montant de la masse salariale ou la liste des biens et équipements mis à sa disposition sont en revanche librement communicables, en ce qu’elles reflètent le coût du service ;
- les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du contrat sont librement communicables ;
- le contrat de délégation de service public est communicable ainsi que ses annexes, sous réserve de l'occultation des éléments couverts par le secret des affaires.
La Commission considère, par ailleurs, qu'au stade de l'exécution, les informations relatives aux moyens humains et techniques du délégataire ainsi que celles reflétant sa stratégie commerciale sont couvertes par le secret des affaires. En revanche, les données permettant d'apprécier la qualité et le coût du service devant être rendu aux usagers, qui font partie intégrante du contrat, sont librement communicables.
Par suite, la Commission émet, sous les réserves ainsi rappelées, un avis favorable à la demande formulée aux points 1), 2), 5), 6) et 8).
En ce qui concerne les documents sollicités aux points 3) à 4), la Commission rappelle, s’agissant des échanges ou comptes rendus intervenant dans le cadre des négociations, d’une demande de précision ou d’une mise au point que, dans la mesure où ceux-ci ont pour objet d’éclairer le pouvoir adjudicateur sur les éléments techniques et financiers de l’offre remise par le candidat ou de faire évoluer ces éléments, ces documents révèlent, par nature, la stratégie commerciale de l’entreprise concernée et, à ce titre, sont entièrement couverts par le secret des affaires (avis n° 20122602 du 26 juillet 2012). Ces documents ne sont, par conséquent, pas communicables. Elle émet, par conséquent, un avis défavorable à la demande.
Enfin, en ce qui concerne les documents sollicités au point 7), la Commission estime qu'ils sont communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, et émet, par suite, un avis favorable à leur communication.