Avis 20222492 Séance du 23/06/2022
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 1 avril 2022, à la suite du refus opposé par le président du conseil départemental de Vaucluse à sa demande de communication, dans un format numérique ouvert et réutilisable, de l'ensemble des documents en lien avec les travaux de construction de la voie verte « Via Venaissia », notamment les éléments suivants :
1) l'ensemble des études réalisées pour la réalisation de cette voie verte ;
2) le plan initial et le plan définitif de cette voie verte ;
3) la date d’obtention du permis de construire;
4) la date et le compte rendu des réunions de concertation.
En premier lieu, la Commission rappelle que le livre III du code des relations entre le public et l'administration garantit à toute personne un droit d’accès aux documents administratifs existants ou susceptibles d’être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant, mais ne fait pas obligation aux autorités administratives de répondre aux demandes de renseignements qui leur sont adressées. Par suite, la Commission ne peut que se déclarer incompétente pour se prononcer sur les points 3) et 4) de la demande, qui portent en réalité sur des renseignements, à l’exclusion toutefois du compte rendu de réunion.
En deuxième lieu, s’agissant du surplus, la Commission relève que les documents sollicités se rapportent à la création d’une voie verte. Elle en déduit que ces documents, dont elle n’a pas pu prendre connaissance, sont susceptibles de contenir des informations relatives à l’environnement au sens de l’article L124-1 du code de l’environnement.
Elle rappelle, à cet égard, que l'article L124-2 du code de l'environnement qualifie d'informations relatives à l'environnement toutes les informations disponibles, quel qu'en soit le support, qui ont notamment pour objet : « 1º L'état des éléments de l'environnement, notamment l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol, les terres, les paysages, les sites naturels, les zones côtières ou marines et la diversité biologique, ainsi que les interactions entre ces éléments ; 2º Les décisions, les activités et les facteurs, notamment les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements, les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets, susceptibles d'avoir des incidences sur l'état des éléments visés au 1º ; 3º L'état de la santé humaine, la sécurité et les conditions de vie des personnes, les constructions et le patrimoine culturel, dans la mesure où ils sont ou peuvent être altérés par des éléments de l'environnement, des décisions, des activités ou des facteurs mentionnés ci-dessus (….) ».
Selon les articles L124-1 et L124-3 du même code, le droit de toute personne d'accéder à des informations lorsqu'elles sont détenues, reçues ou établies par les autorités publiques ou pour leur compte, s'exerce dans les conditions définies par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre I du code de l'environnement. A cet égard, les articles L124-4 et L124-5 de ce code énumèrent limitativement les hypothèses dans lesquelles l'autorité administrative peut rejeter une demande tendant à la communication d'informations relatives à l'environnement, au nombre desquelles ne figure pas le caractère préparatoire du document ou des informations.
En l’espèce, la Commission émet un avis favorable à la communication des éventuelles informations environnementales, sans que puisse leur être opposé leur caractère préparatoire. Elle estime que les autres éléments sont librement communicables à toute personne qui en fait la demande, sous réserve le cas échéant de l’occultation des mentions couvertes par le secret de la vie privée. Elle émet, dans ces conditions et sous ces réserves, un avis favorable à la demande.
Dans son courrier du 31 mars 2022 adressé au pétitionnaire, le président du conseil départemental du Vaucluse a estimé que cette demande revêtait un caractère abusif.
La Commission précise qu’une demande peut être regardée comme abusive que lorsqu'elle a pour objet de perturber le bon fonctionnement de l’administration sollicitée ou lorsqu'elle aurait pour effet de faire peser sur elle une charge disproportionnée au regard des moyens dont elle dispose (CE, n° 420055, 422500, 14 novembre 2018). Elle peut également être regardée comme abusive lorsque le traitement de la demande fait peser sur l’administration une charge excessive eu égard aux moyens dont elle dispose et à l’intérêt que présenterait, pour le demandeur, le fait de bénéficier, non de la seule connaissance des éléments communicables, mais de la communication des documents occultés eux-mêmes (CE, n° 426623, 27 mars 2020). Toute demande portant sur une quantité importante de documents ou le fait pour une même personne d’adresser soit plusieurs demandes à une même autorité soit des demandes multiples formulées à l’identique à plusieurs autorités, ne sont pas nécessairement assimilables à des demandes abusives.
La Commission ajoute que c’est un faisceau d’indices qui permet de qualifier une demande d’abusive. Elle estime que tel peut être le cas des demandes récurrentes, portant sur un volume important de documents traitant, le cas échéant, de la même affaire, des demandes que le service sollicité est manifestement dans l'incapacité matérielle de traiter, ou encore des demandes portant sur des documents auxquels le demandeur a déjà eu accès. La Commission fonde également son appréciation sur les éléments portés à sa connaissance par le demandeur et l'administration quant au contexte dans lequel s'inscrit la demande et aux motivations qui la sous-tendent. La Commission souligne que le caractère abusif doit être apprécié pour chaque demande, compte tenu d’éléments circonstanciés. Elle relève que cette qualification demeure exceptionnelle.
En l’espèce, la Commission considère qu'eu égard à la nature des documents sollicités et aux moyens dont dispose l'administration saisie, la demande ne revêt pas un caractère abusif. Elle rappelle cependant que l'administration est fondée, le cas échéant, à aménager les modalités de communication afin que l'exercice du droit d'accès reste compatible avec le bon fonctionnement de ses services. Si la demande porte sur une copie de documents volumineux qu’elle n’est pas en mesure de reproduire aisément compte tenu de ses contraintes matérielles, l'administration est notamment en droit d'inviter le demandeur à venir consulter ces documents sur place et à emporter copie des seuls éléments qu’il aura sélectionnés. Alternativement, elle peut convenir avec le demandeur d’un échéancier de communication compatible avec le bon fonctionnement des services.