Avis 20163010 Séance du 21/07/2016

Communication des éléments suivants dans le cadre de la réalisation d’un reportage : 1) le nombre et la liste des missions actuellement en cours pour le compte du gouvernement et leurs durées ainsi que les lettres de missions afférentes ; 2) les moyens dont disposent les personnalités missionnées, leurs budgets et leurs imputation ; 3) le nombre de missions effectuées depuis le début du quinquennat
Monsieur X, pour X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 9 juin 2016, à la suite du refus opposé par le Premier ministre à sa demande de communication des éléments suivants dans le cadre de la réalisation d’un reportage : 1) le nombre et la liste des missions actuellement en cours pour le compte du Gouvernement et leurs durées ainsi que les lettres de missions afférentes ; 2) les moyens dont disposent les personnalités missionnées, leurs budgets et leurs imputation ; 3) le nombre de missions effectuées depuis le début du quinquennat En réponse à la demande qui lui a été adressée, le Premier ministre a informé la commission qu'il avait communiqué au demandeur, par un courrier en date du 12 juillet 2016, deux tableaux recensant les missions particulières confiées par le Gouvernement à des parlementaires, d'une part, ou à d'autres personnalités, d'autre part, ainsi que les lettres de missions afférentes. La commission constate que ces tableaux permettent de distinguer les missions en cours des missions terminées, et que les lettres de mission, dont elle a également pu prendre connaissance, indiquent aux personnes chargées d'une mission quels services de l'État leur apporteront leur appui technique et la qualité des agents qui leur apporteront leur assistance. La commission estime donc que cette communication rend sans objet la demande d'avis, en ce qui concerne le nombre et la liste des missions confiées par le Gouvernement ou certains de ses membres à des parlementaires ou à d'autres personnalités, depuis le début du quinquennat, ainsi que, dans la mesure des éléments déjà communiqués, en ce qui concerne les moyens alloués à ces personnes. Sur ce dernier point, cependant, le Premier ministre a fait valoir que le montant de la rémunération allouée à chacune des personnes, autres que les parlementaires, chargées d'une mission par le Gouvernement ne pouvait être communiqué aux tiers, dans la mesure où il révélerait une appréciation ou un jugement de valeur porté sur l'intéressé. La commission rappelle à cet égard qu'aux termes de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, « Ne sont communicables qu'à l'intéressé les documents administratifs : (...) / 2° Portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable (...) ». Par deux décisions du 24 avril 2013, Syndicat CFDT Culture, n° 343024, et du 26 mai 2014, Communauté d’agglomération de Bayonne-Anglet-Biarritz, n° 342339 (mentionnées aux tables du recueil Lebon), le Conseil d'État a précisé que lorsque la rémunération qui figure dans le contrat de travail ou sur le bulletin de salaire résulte de l'application des règles régissant l'emploi concerné, sa communication n'est pas susceptible de révéler une appréciation ou un jugement de valeur, au sens de ces dispositions, sur la personne recrutée, tandis que lorsqu’elle est arrêtée d'un commun accord entre les parties sans référence à des règles la déterminant, elle révèle nécessairement une appréciation et un jugement de valeur portés sur cette personne. Au cas d'espèce, la commission note que le décret n° 2011-142 du 3 février 2011 fixant les conditions d'indemnisation des personnes chargées d'une mission par les membres du Gouvernement prévoit que la rémunération accordée à la personne chargée de la mission est égale au produit d'un montant de base, mensuel ou forfaitaire, et d'un coefficient de modulation compris entre 0,5 et 7. L'article 5 précise que ce coefficient « est fixé en tenant compte de la difficulté de la mission, de l'importance du travail qu'elle demande et de la notoriété ou du degré de qualification du missionnaire ». La commission constate que la rémunération allouée à chaque personne intéressée n'est pas arrêtée d'un commun accord entre les parties sans référence à des règles la déterminant mais doit être fixée en fonction de critères déterminés par le décret. Si les deux derniers de ces critères se rapportent à des qualités propres à la personne recrutée, il s'agit de caractéristiques objectives, dont l'évaluation n'implique pas de jugement de valeur sur cette personne ou sa manière de servir et qui sont, au demeurant, appréciées globalement avec les deux premiers critères, lesquels se rapportent exclusivement à la tâche confiée, sans considération de la personne qui en est chargée. La commission considère que, dans ces conditions, le montant de la rémunération ainsi allouée n'est pas susceptible de révéler, par lui-même, une appréciation ou un jugement de valeur sur l'intéressé, et est donc communicable à toute personne qui le demande, s'il figure dans un document existant ou pouvant être obtenu par un traitement automatisé d'usage courant. Elle rappelle à cet égard que les dispositions du livre III du code des relations entre le public et l'administration ne font pas obligation à l'autorité administrative d'élaborer un document nouveau pour répondre à une demande de renseignements. Sous cette réserve, la commission émet un avis favorable à la communication au demandeur des documents faisant apparaître le montant de la rémunération allouée aux personnes chargées d'une mission en cours à la date de la demande de communication, le 9 mai 2016, ou ayant débuté depuis cette date.