Avis 20233394 Séance du 06/07/2023

Madame XX a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 9 juin 2023, à la suite du refus opposé par le recteur de l'académie de Reims à sa demande de communication d'une copie des éléments suivants : 1) le protocole d’accompagnement des personnels victimes de violence ou d’agression présenté au comité d'hygiène de sécurité et de conditions de travail académique (CHSCTA) le 25 juin 2013 ; 2) les préconisations de l'enquête du CHSCTA menée en 2013 au collège de X suite au suicide d’un enseignant et présentées le 5 décembre 2013 au CHSCTA de Reims ; 3) le courriel professionnel adressé par la principale du collège X de X Madame X, juste avant le 10 septembre 2018, à l'inspecteur académique Monsieur X ; 4) les deux courriels professionnels adressés par la principale Madame X aux deux inspectrices académiques Mesdames X et X, juste après le 10 septembre 2018, et relatifs à deux projets pédagogiques qu'elle avait proposés à Madame X le 7 septembre 2018 ; 5) le compte-rendu d'un « audit » qui s'est déroulé, sur ordre de la rectrice d'académie, dans le C.D.I. du collège X le 11 décembre 2018 et qui a été mené par deux inspecteurs académiques, Messieurs X et X, en présence d'une classe de 6ème et d'elle même ; 6) le procès-verbal intégral de la réunion du CHSCTA le 18 décembre 2018, qui a été approuvé le 26 février 2019 et au cours de laquelle a été examinée sa demande d’une enquête indépendante du CHSCTA sur les causes de son accident de service le 10 septembre 2018 au collège de X ; 7) le procès-verbal intégral de la réunion du CHSCTA le 26 février 2019 au cours de laquelle a été examinée la situation au collège de X, un mois après son expulsion forcée de l'établissement le 14 janvier 2019 ; 8) le procès-verbal du conseil d’administration du collège de X du 28 février 2019, où la principale Madame X a exposé les motifs de la mesure de police qu'elle avait prise à son encontre le 14 janvier 2019 et qui a directement causé un troisième accident de service ; 9 ) les convocations des commissaires paritaires au conseil de discipline du 21 mai 2019, avec les dates d'envoi et de réception ; 10) le document transmettant aux commissaires paritaires le rapport disciplinaire daté du 16 mai 2019 et rédigé par l'ex-rectrice Madame X, avec la date de réception ; 11) le document transmettant au ministère de l’éducation nationale l'avis motivé du conseil de discipline daté du 27 mai 2019 ; 12) le document transmettant aux commissaires paritaires ayant siégé le 21mai 2019 le procès-verbal du conseil de discipline, daté du 27 mai 2019 ; 13) le procès-verbal de la commission administrative paritaire académique (CAPA) de Reims postérieure au 21 mai 2019 et mentionnant l'approbation du procès-verbal du 27 mai 2019. En premier lieu, la commission estime que les documents visés aux points 1), 6), 7) et 8) s'ils existent et sont en possession de l'administration, sont des documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, après occultation des mentions couvertes par l'un des secrets protégés à l'article L311-6 du même code, S’agissant en deuxième lieu du document visé au point 2), la commission comprend que l'enquête visée, réalisée par la délégation du CHSCTA avait pour objet de rechercher et d’analyser les liens éventuels entre l’environnement professionnel et le suicide de l’enseignant en cause afin de proposer des mesures de prévention. Elle considère que les préconisations qui en résultent, dès lors que le rapport est achevé et a perdu son caractère préparatoire, constituent un document administratif soumis au droit d'accès prévu par l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration, sous les réserves prévues par les articles L311-5 et L311-6 et, le cas échéant, dans les conditions prévues à l'article L311-7 du même code. En application de ces dispositions doivent notamment être disjoints ou occultés les éléments qui portent une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable, qui font apparaître d'une personne physique ou morale un comportement dont la divulgation pourrait lui porter préjudice, ou dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée, sauf à ce que ces disjonctions ou occultations privent d'intérêt la communication du document qui peut, dès lors, être refusée. A cet égard elle précise que ne relèvent pas de ces réserves les éléments qui procèdent à une analyse objective du fonctionnement du service, en ce compris les méthodes de ses responsables, mais qu'en relève la mise en cause de manière personnalisée de l'action ou du comportement d'agents de ce service. De même, dès lors que des propos rapportés ne sont pas attribués à leur auteur, l'identité des personnes entendues n'a pas à être occultée. En troisième lieu, s’agissant des documents visés aux points 3) et 4), la commission estime que ces messages électroniques, adressés par la principale du collège X à X dans le cadre et en lien avec ses fonctions revêtent un caractère administratif et qu'ils sont communicables à l'intéressée en application de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration sous réserve de l'occultation, le cas échéant de mentions couvertes par le secret de la vie privée ou portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable autre que Madame X ou faisant apparaître le comportement d'une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice, comme par exemple des témoignages ou des plaintes de tiers. En quatrième lieu, s'agissant du point 5), la commission rappelle qu’un rapport d’enquête ou un audit réalisé par ou à la demande de l'autorité responsable du service public est un document administratif au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, communicable à toute personne qui en fait la demande en vertu de l'article L311-1 de ce code, à la condition qu'il ne revête pas de caractère préparatoire. Elle rappelle, d’autre part, qu’en application de l'article L311-6 du code, ne sont toutefois communicables qu'à l'intéressé les éléments qui portent une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable, qui font apparaître d'une personne physique un comportement dont la divulgation pourrait lui porter préjudice, ou dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée. La communication à un tiers ne peut donc intervenir qu’après disjonction ou occultation des mentions qui porteraient atteinte à l’un des intérêts protégés par l’article L311-6, en particulier, et sous la réserve qu’une telle disjonction ou occultation ne conduise pas à priver de son sens le document sollicité. Dans l'hypothèse où l'importance des occultations, justifiées par la préoccupation de ne pas révéler le comportement d'une personne, facilement identifiable eu égard aux propos tenus, dénaturerait le sens d'un document ou priverait sa communication de tout intérêt, cette communication pourrait être refusée par l'autorité administrative auprès de laquelle le document a été sollicité en vertu de l'article L311-7 du même code. Comme elle l’a fait dans son avis du 10 septembre 2020 n° 20200014, la commission émet donc un avis favorable à la communication de ces documents sous les réserves qui viennent d’être exposées. Elle rappelle à l’intéressée que, dans l’hypothèse où elle s’estimerait insatisfaite de la décision qui sera prise par l’autorité administrative au terme du délai de deux mois prévu par les articles R343-4 et 343-5 du code des relations entre le public et l'administration, il lui appartient, si elle s’y croit fondée, de saisir le tribunal administratif. Pour ce qui concerne en cinquième lieu les documents administratifs mentionnés aux points 9) à 12), la commission estime qu’ils sont, dès lors que la procédure disciplinaire est achevée, communicables à l’intéressée, en application de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration. Elle émet donc un avis favorable sur ces points. La commission considère en sixième lieu que le procès-verbal mentionné au point 13) est communicable à Madame X, pour les seules mentions qui la concernent, en application de la même disposition. Elle émet donc, pour ces seules mentions, un avis favorable sur ce point. Enfin, la commission prend note des observations du recteur de l'académie de Reims quant au caractère abusif de la demande. La commission rappelle que l'administration n'est pas tenue de répondre à une demande de communication qui présenterait un caractère abusif. Elle estime qu'une demande peut être considérée comme abusive lorsqu'elle vise, de façon délibérée, à perturber le fonctionnement d'une administration ou lorsqu'elle a pour effet de faire peser sur elle une charge excessive au regard des moyens dont elle dispose (CE, 14 novembre 2018, Ministre de la culture c/ Société X n° 420055, 422500). Tel peut être le cas des demandes récurrentes, portant sur un volume important de documents traitant, le cas échéant, de la même affaire, des demandes que le service sollicité est manifestement dans l'incapacité matérielle de traiter, ou encore des demandes portant sur des documents auquel le demandeur a déjà eu accès. La commission fonde également son appréciation sur les éléments portés à sa connaissance par le demandeur et l'administration quant au contexte dans lequel s'inscrit la demande et aux motivations qui la sous-tendent. La commission rappelle enfin que le volume des documents demandés ne peut, par lui-même, justifier légalement un refus de communication. En l'espèce, il n'est pas apparu à la commission, compte tenu de la nature des documents demandés et des éléments portés à sa connaissance, que cette demande présenterait un caractère abusif au regard du droit d'accès prévu par le code des relations entre le public et l'administration, malgré le comportement de la demanderesse et ses relations conflictuelles avec l'administration.