Avis 20232874 Séance du 22/06/2023
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 15 mai 2023, à la suite du refus opposé par le directeur général de Pôle emploi à sa demande de communication des documents suivants, dans le cadre d'une procédure de présélection de candidats (offre d'emploi pour un poste de « conseiller emploi, dominante accompagnement » :
1) le rapport que l'administration a reçu de la part de la société AON ;
2) l’algorithme, du code source, qui évalue les réponses des candidats ;
3) par-dessus tout : toutes les informations qui retracent le lien entre ses propres réponses et le traitement dudit algorithme - autrement dit, les règles, les informations et le(s) document(s) qui prouvent/expliquent/interprètent ses réponses personnelles et qui ont conduit au rapport qui a été généré à son égard ou à tout rapport reçu par l'administration dans le cadre de cette évaluation, et donc, l'accès au traitement précis qui a été fait de ses réponses (lesquelles sont des données à caractère personnel), ceci puisque ce traitement non humain (i. e. algorithmique) a eu pour conséquence l'élaboration d'une décision individuelle le concernant personnellement.
En premier lieu, la commission rappelle qu'en application de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, la communication d'un document administratif doit être précédée, le cas échéant, de l’occultation des mentions dont la communication porterait atteinte au secret des affaires qui comprend le secret des procédés, le secret des informations économiques et financières ainsi que le secret des stratégies commerciales.
En réponse à la demande qui lui a été adressée, le directeur général de Pôle emploi a indiqué à la commission avoir communiqué à Monsieur X, par un courrier en date du 12 juin 2023 dont copie est jointe, la partie 1 du « rapport recruteur » adressé par la société AON et portant sur les résultats obtenus lors des quatre tests de présélection, ainsi que le détail des notes obtenues et les modalités de notation du test « questionnaire de jugement situationnel ». La commission ne peut dès lors que constater que la demande a perdu son objet dans cette mesure, s'agissant du point 1).
Le directeur général de Pôle emploi a par ailleurs indiqué ne pas pouvoir communiquer le détail des notes obtenues et les modalités de notation concernant les trois autres tests (« test de comportements professionnels », « test de raisonnement verbal » et « test de logique ») qui seraient couverts par le secret des affaires de la société AON, à laquelle il a été fait appel en qualité de prestataire de services. Ces tests ont été élaborés par cette seule société, qui les commercialise pour l’ensemble de ses clients.
La commission, qui n’a pas pu prendre connaissance de ces documents, estime toutefois que si les modalités de notation peuvent faire apparaître les procédés utilisés par la société AON, couverts par le secret des affaires, il n’en va pas nécessairement de même des notes obtenues par la personne qui s’est soumise à ces tests. Elle émet donc un avis favorable à la communication au demandeur du détail des notes obtenues pour ces trois tests, après occultation des éléments qui seraient couverts par le secret des affaires.
En deuxième lieu, la commission rappelle qu'aux termes de l'article L311-3-1 du code des relations entre le public et l'administration : « Sous réserve de l'application du 2° de l'article L311-5, une décision individuelle prise sur le fondement d'un traitement algorithmique comporte une mention explicite en informant l'intéressé. Les règles définissant ce traitement ainsi que les principales caractéristiques de sa mise en œuvre sont communiquées par l'administration à l'intéressé s'il en fait la demande. » et que l’article R311-3-1-2 du code des relations entre le public et l'administration, prises pour l'application de cet article, disposent que doivent être communiquées les informations suivantes : le degré et le mode de contribution du traitement algorithmique à la prise de décision, les données traitées et leurs sources, les paramètres et les opérations du traitement et, le cas échéant, leur pondération, appliqués à la situation de l'intéressé, les opérations effectuées par le traitement, et ce dans des termes intelligibles.
Le directeur général de Pôle Emploi a précisé à la commission que la décision d’inviter ou non un candidat à un entretien est prise par les services en charge des ressources humaines au regard de l’ensemble des éléments du dossier de candidature (motivation, expérience professionnelle) et non par l’algorithme en fonction de seuls résultats aux tests de présélection. La commission ne peut qu’en prendre acte et considérer que les dispositions de l’article L311-3-1 précitées ne trouvent pas à s’appliquer en l’espèce, de sorte que la demande est sans objet sur le point 3).
En dernier lieu, s'agissant du point 2), la commission rappelle qu’aux termes de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration, seuls les documents produits ou reçus par les autorités publiques dans le cadre de leur mission de service public présentent un caractère administratif.
Elle comprend en l’espèce de la réponse du directeur général de Pôle emploi que ses services ne détiennent pas l’algorithme ni le code source relatifs aux tests de sélection, qui sont détenus et sont la propriété de la société AON à laquelle il a été fait appel en qualité de prestataire de services.
Dès lors, la commission ne peut que constater que ces documents ne revêtent pas un caractère administratif au sens de ces dispositions.
Elle rappelle, en outre, que sous réserve des dispositions du sixième alinéa de l’article L311-2 du code des relations entre le public et l’administration, qui font obligation à une autorité administrative saisie d’une demande de communication de documents qu’elle ne détient pas de transmettre cette demande à l’autorité susceptible de les détenir, ce code ne saurait avoir pour effet d'imposer à une telle autorité de solliciter d'un tiers la remise d'un document qui n’est pas en sa possession afin de satisfaire à une demande de communication.
La commission se déclare par suite incompétente pour se prononcer sur ce point de la demande.