Conseil 20232500 Séance du 01/06/2023

La Commission d'accès aux documents administratifs a examiné lors de sa séance du 1er juin 2023 votre demande de conseil relative au caractère communicable d'un arrêté fixant les astreintes dans le cadre de la procédure L481-1 du code de l'urbanisme. La commission indique en premier lieu que dans sa décision du 22 décembre 2022, Commune de Villeneuve-lès-Maguelone, n° 463331, A, le Conseil d’État a jugé qu'il résulte du premier alinéa de l’article L480-1 et de l’article L481-1 du code de l’urbanisme, éclairés par les travaux parlementaires préalables à l’adoption de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 dont ils sont issus, que, dans le but de renforcer le respect des règles d’utilisation des sols et des autorisations d’urbanisme, le législateur a entendu, que, lorsqu’a été dressé un procès-verbal constatant que des travaux soumis à permis de construire, permis d’aménager, permis de démolir ou déclaration préalable ou dispensés, à titre dérogatoire, d’une telle formalité ont été entrepris ou exécutés irrégulièrement, l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation d’urbanisme puisse, dans le cadre de ses pouvoirs de police spéciale et indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées pour réprimer l'infraction constatée, mettre en demeure l’intéressé, après avoir recueilli ses observations, selon la nature de l’irrégularité constatée et les moyens permettant d’y remédier, a) soit de solliciter l’autorisation ou la déclaration nécessaire, b) soit de mettre la construction, l’aménagement, l’installation ou les travaux en cause en conformité avec les dispositions dont la méconnaissance a été constatée, y compris, si la mise en conformité l’impose, en procédant aux démolitions nécessaires. Cette mise en demeure peut être assortie d’une astreinte, prononcée dès l’origine ou à tout moment après l’expiration du délai imparti par la mise en demeure, s’il n’y a pas été satisfait, en ce cas après que l’intéressé a de nouveau été invité à présenter ses observations. La commission estime que les procès-verbaux d'infraction aux règles d'urbanisme, qui sont établis en application de l'article L480-1 du code de l'urbanisme par tous officiers ou agents de police judiciaire ainsi que par tous les fonctionnaires et agents de l'État et des collectivités publiques commissionnés à cet effet par le maire ou le ministre chargé de l'urbanisme suivant l'autorité dont ils relèvent, et assermentés, de même que les lettres par lesquelles les autorités administratives les transmettent au procureur de la République, ainsi que toutes les pièces liées à la procédure, revêtent un caractère judiciaire et sont, comme tels, exclus du champ d'application du livre III du code des relations entre le public et l’administration (avis de partie II n° 20144031 du 13 novembre 2014). En revanche, les mises en demeure et astreintes prononcées en application de l'article L481-1 du code de l'urbanisme correspondent à la mise en œuvre d'une procédure administrative, indépendante des poursuites pénales qui peuvent le cas échéant être diligentées. La commission estime, par conséquent, que ces mises en demeures et astreintes constituent des documents administratifs, sur la communication desquelles elle est compétente pour se prononcer. La commission rappelle en deuxième lieu qu’il résulte de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux du conseil municipal, des arrêtés municipaux, ainsi que des budgets et comptes de la commune. L’ensemble des pièces annexées à ces documents sont communicables à toute personne qui en fait la demande, selon les modalités prévues par le code des relations entre le public et l'administration. La commission précise que si cet article a institué un régime spécifique d'accès aux documents des communes, distinct du régime général d'accès aux documents administratifs organisé par les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, et si les exceptions au droit d'accès prévues à l'article L311-6 de ce code ne sont pas opposables à une demande présentée sur le fondement de ces dispositions spéciales, l'exercice de ce droit d'accès particulier ne saurait faire obstacle, par principe, à la protection de secrets protégés par la loi sur d'autres fondements, tels que le secret de la vie privée (CE 10 mars 2010, n° 303814, commune de Sète ; conseil n° 20121509 du 19 avril 2012 et conseil n° 20123242 du 27 septembre 2012), le secret médical (conseil n° 20122788 du 26 juillet 2012), le secret des correspondances échangées entre le client et son avocat (avis n° 20111095 du 14 avril 2011), ou le secret industriel et commercial (CE, 17 mars 2022, n° 449620). La commission estime que la décision par laquelle l’autorité compétente pour délivrer une autorisation individuelle d’urbanisme assortit d'une astreinte la mise en demeure qu'elle prononce à l'encontre du maître de l’ouvrage, appartient à la catégorie des documents produits ou reçus par l'administration en matière d'autorisations individuelles d'urbanisme. La commission vous précise donc que cette décision revêt le caractère d'un document administratif communicable à toute personne qui en fait la demande en application de l'article L2121-26 du code général des collectivités territoriales, sous réserve de l’occultation des éventuelles mentions relevant de secrets protégés par la loi. La commission rappelle à cet égard que le 3° de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration fait obstacle à la communication des documents révélant le comportement d'une personne et dont la divulgation pourrait lui porter préjudice. Elle considère en revanche de manière constante que les faits et éléments purement objectifs (non connotés) relevés par une autorité administrative, tels que les insuffisances ou les manquements à une procédure, ne rentrent pas dans le champ de cette dernière réserve. Après avoir pris connaissance de l'arrêté sur lequel vous l'interrogez, la commission estime qu'il est librement communicable à toute personne qui en fait la demande.