Avis 20232020 Séance du 01/06/2023

Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 22 mars 2023, à la suite du refus opposé par le maire de Marseille à sa demande de communication d’une copie intégrale du registre d'enregistrement des cartes professionnelles des agents de la police municipale de Marseille. Après avoir pris connaissance de la réponse du maire de Marseille, la commission relève, d'une part, que l'article D511-5 du code de la sécurité intérieure prévoit qu'un registre coté et paraphé à chaque page par le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale, mentionne le numéro de la carte professionnelle prévue à l'article L511-4 du même code, ses dates de délivrance et, le cas échéant, de restitution, de destruction, de vol ou de perte, ainsi que le numéro de matricule et le nom de son titulaire. Comme elle l'a fait dans son avis du 17 juin n°20213182, la commission souligne, d'autre part, que le législateur a généralisé la levée de l’anonymat des agents des autorités administratives en prévoyant au premier alinéa de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, désormais codifié à l'article L111-2 du code des relations entre le public et l'administration, que « toute personne a le droit de connaître le prénom, le nom, la qualité et l'adresse administratives de l'agent chargé d'instruire sa demande ou de traiter l'affaire qui la concerne ». Elle rappelle, en outre, qu’elle considère, traditionnellement qu’une liste des agents d'une collectivité publique qui ne fait apparaître que les noms, prénoms, services et fonctions de ces agents constitue un document administratif en principe communicable à toute personne qui en fait la demande en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration. (avis n° 20203340 du 29 octobre 2020). Elle précise que les dispositions du d) du 2° de l’article L311-5 de ce code font toutefois obstacle à cette communication, lorsque des éléments de fait précis et circonstanciés, tenant par exemple au contexte de la demande ou à la personnalité du demandeur, laissent légitimement craindre à l’administration requise que la divulgation de l’identité des agents, en raison de la nature des missions et responsabilités qu'ils exercent, pourrait conduire à des représailles ciblées sur ces derniers et, ce faisant, conduire à porter atteinte à la sécurité publique et des personnes. La commission relève que dans sa décision du 15 décembre 2017, n° 405845, le Conseil d’État a jugé que les dispositions du d) du 2° de l’article L311-5 de ce code faisaient obstacle à la communication de la liste des noms, prénoms, fonctions et numéros de matricules des agents, officiers, gendarmes et/ou policiers affectés au centre automatisé de constatation des infractions routières (CACIR) au motif qu’une telle divulgation était susceptible, eu égard à la qualité de fonctionnaires de police et de militaires de la gendarmerie des intéressés, de porter atteinte à la sécurité publique ou à la sécurité des personnes. De la même façon, la commission a émis un avis défavorable à la communication de la liste des agents d’un commissariat de police localisé, compte tenu des risques de représailles auxquels les agents en cause peuvent être personnellement exposés en raison de la nature de leurs missions et des responsabilités qu’ils exercent (avis n° 20203340 du 29 octobre 2020). La commission constate que cette incommunicabilité, fondée sur la seule qualité de fonctionnaires de police et militaires de la gendarmerie nationales, déroge à la règle selon laquelle le risque d’atteinte à la sécurité des personnes ne se présume pas mais doit être établi, compte tenu des circonstances propres à chaque cas d'espèce. Cette exception au droit d’accès aux documents administratifs doit, dès lors, être interprétée strictement. Ainsi, si les policiers municipaux sont potentiellement exposés à un risque particulier de représailles, parce qu’ils sont identifiés comme agents des forces de l’ordre, leur situation, par la nature de leurs missions et les responsabilités qu’ils exercent, n’est pour autant pas assimilable à celle des fonctionnaires de la police et des militaires de la gendarmerie nationales. Ce n’est donc qu’au cas par cas que la communication d’une liste de fonctionnaires de la police municipale doit être refusée. En l’espèce, le maire de Marseille n'a fait état devant la commission d'aucun élément laissant à penser que la divulgation au demandeur, qui appartient lui-même à la police municipale, de l'identité des agents figurant sur les listes qu’il sollicite pourrait conduire à porter atteinte à la sécurité des personnes concernées. La commission, qui a pu prendre connaissance d'un extrait du registre sollicité, constate par ailleurs que ce document ne comporte aucune mention relevant d'un des secrets protégés par les articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l'administration. Elle émet par suite un avis favorable à la demande de communication formée par Monsieur X. Pour ce qui concerne enfin les modalités de communication, la commission rappelle qu'en vertu de l'article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration, l'accès aux documents administratifs aux documents administratifs s'exerce, au choix du demandeur et dans la limite des possibilités techniques de l'administration, soit par consultation gratuite sur place, soit par courrier électronique et sans frais lorsque le document est disponible sous forme électronique, soit, sous réserve que la reproduction ne nuise pas à la conservation du document, par la délivrance d'une copie sur un support identique à celui utilisé par l'administration ou compatible avec celui-ci et aux frais du demandeur, sans que ces frais puissent excéder le coût de cette reproduction et de l’envoi du document. La commission estime que ces dispositions ne font pas obligation à l’administration de communiquer sous forme électronique les documents dont elle ne dispose pas déjà sous cette forme, ou de numériser un document disponible en version papier. Le maire de Marseille a indiqué à la commission que le registre sollicité est un document papier, dont il n'existe pas d'ores et déjà de version électronique. La commission en prend note et invite par suite le maire de Marseille à procéder à une copie de ce document, conformément à la demande de Monsieur X, s'il n'y a pas déjà été procédé.