Avis 20230889 Séance du 30/03/2023
Madame X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 13 février 2023, à la suite du refus opposé par la directrice de l'Association sauvegarde de l'enfance à l'adulte du Pays Basque à sa demande de communication d'une copie du dossier administratif de son fils mineur X, lequel a fait l'objet d'une procédure d’action éducative en milieu ouvert (AEMO), clôturée en avril 2021.
La commission rappelle d'abord que le caractère communicable des pièces qui composent le dossier d’aide sociale à l’enfance dépend de l’état de la procédure et de l’objet en vue duquel elles ont été élaborées :
1. L’ensemble des pièces qui composent ce dossier avant que le juge des enfants soit saisi ou que le procureur de la République soit avisé, revêtent un caractère administratif. Il en va ainsi, en particulier, des documents relatifs au placement administratif du mineur.
2. Lorsque le juge des enfants a été saisi ou que le procureur de la République a été avisé en application de l'article L226-4 du code de l’action sociale et des familles et de l’article 375-5 du code civil, les documents élaborés dans le cadre de la procédure ainsi ouverte, y compris le courrier de saisine ou d’information et la décision du juge des enfants ou du procureur de la République, constituent des documents judiciaires exclus du champ d’application du livre III du code des relations entre le public et l’administration. La commission n’est pas compétente pour se prononcer sur leur caractère communicable.
3. En cas de placement judiciaire du mineur, les documents établis par le juge, qu’il s’agisse de ses décisions (renouvellement du placement, modifications des mesures d’assistance éducative, etc.) ou de courriers qu’il adresse aux services d’aide sociale à l’enfance, ainsi que ceux qui ont été élaborés à l’attention de ce dernier par l’administration, dans le cadre du mandat judiciaire qui lui a été confié, revêtent un caractère judiciaire. Il en va ainsi, en particulier, des rapports périodiques sur la situation et l’évolution du mineur obligatoirement adressés au juge des enfants en vertu de l’article 1199-1 du code de procédure civile et du dernier alinéa de l’article 375 du code civil. Il n’appartient qu’au juge de procéder à la communication de tels documents s’il l’estime opportun.
En revanche, les autres documents élaborés par les autorités administratives (en particulier les services d’aide sociale à l’enfance) dans le cadre de l'assistance éducative et du placement judiciaire du mineur revêtent un caractère administratif et le conservent alors même qu’ils auraient été transmis au juge pour information. Il en va ainsi des correspondances entre les services intéressés, des rapports et notes établis pour les besoins de l’administration, des pièces retraçant les échanges entre le président du conseil départemental et les parents du mineur ou les accueillants familiaux.
En réponse à la demande qui lui a été adressée, la directrice de l'Association sauvegarde de l'enfance à l'adulte du Pays Basque a informé la commission qu’elle disposait seulement du compte-rendu de la mesure, transmis au tribunal à l’issue de son action. Si ce compte rendu a été réalisé par l’association à la demande du juge des enfants pour la réalisation de la mesure d’AEMO au bénéfice du fils de Madame X, la commission ne pourrait que se déclarer incompétente pour se prononcer sur cette demande, étant précisé que la circonstance que la mesure judiciaire d'assistance éducative a pris fin n'est pas de nature à conférer à ce document le caractère de document administratif relevant du champ d'application du titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l'administration.
Si le compte rendu n’a en revanche pas été élaboré à la demande d’un magistrat dans le cadre du mandat judiciaire, la commission rappelle ensuite que le Conseil d'État, dans sa décision CE, Sect., 22 février 2007, Association du personnel relevant des établissements pour inadaptés, n° 264541, a jugé qu'indépendamment des cas dans lesquels le législateur a lui-même entendu reconnaître ou, à l'inverse, exclure l'existence d'un service public, une personne privée qui assure une mission d'intérêt général sous le contrôle de l'administration et qui est dotée à cette fin de prérogatives de puissance publique est chargée de l'exécution d'un service public. Toutefois, même en l'absence de telles prérogatives, une personne privée doit également être regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard à l'intérêt général de son activité, aux conditions de sa création, de son organisation ou de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu'aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que l'administration a entendu lui confier une telle mission.
En l'espèce, la commission relève que l'Association sauvegarde de l'enfance à l'adulte du Pays Basque est une association de droit privé, créée sous le régime de la loi de 1901, qui selon son site internet œuvre pour l'aide aux enfants, adolescents et adultes inadaptés, handicapés ou en difficulté sociale du Pays Basque. La commission constate toutefois que les éléments portés à sa connaissance et ceux à sa disposition concernant cette association, faute de précisions quant aux conditions de sa création, ses modalités d'organisation et de fonctionnement, ne lui permettent pas de considérer que celle-ci serait chargée d'une mission de service public et, par suite, au nombre des autorités énumérées à l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration. Ainsi, elle ne peut, en l'état, que se déclarer incompétente pour se prononcer sur la demande.
Elle précise toutefois que, si tel était le cas, elle serait compétente pour se prononcer sur la demande. Le document sollicité serait communicable à l’intéressée en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, après occultation des éventuelles mentions couvertes par le secret en application du même article.