Avis 20225892 Séance du 03/11/2022
Monsieur X, X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 19 septembre 2022, à la suite du refus opposé par le maire d'Estaires à sa demande de communication, par voie dématérialisée, des documents suivants :
1) les grands livres comptables pour les années 2018 et 2021 ;
2) le modèle de lettre, au format informatique et modifiable, utilisé pour l'envoi des courriers de la collectivité, comportant l'en‐tête de la ville et le modèle de signature e-mail ;
3) les justificatifs des recettes et des dépenses des dons perçus pour la rénovation de l’Église et pour laquelle la ville a fait un appel aux dons via ses réseaux sociaux ;
4) la liste détaillée des aînés ayant bénéficié des colis en 2019, 2020 et 2021 ;
5) la facture des colis remis au titre de l’année 2019 ;
6) le courrier du préfet fixant un délai de trois jours pour la consultation des dossiers préparatoires au conseil municipal du 16 juin 2022 ;
7) la liste des lieux exacts prévus pour les emplacements d'affichage d'opinion et la publicité relative aux activités des associations ;
8) les arrêtés municipaux correspondants.
A titre liminaire, la commission, qui a pris connaissance des observations du maire d’Estaires à la date de sa séance, rappelle qu'elle n'est pas compétente pour se prononcer sur les droits d'information que les conseillers municipaux tirent, en cette qualité, de textes particuliers tel l'article L2121-13 du code général des collectivités territoriales, qui dispose que : « Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ». Toutefois, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que les élus puissent se prévaloir du droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration, qui est ouvert à toute personne, indépendamment des fonctions qu'elle exerce ou des mandats qu'elle détient.
La commission relève, en premier lieu, qu’elle s’est déjà prononcée sur la communication des justificatifs des recettes et des dépenses des dons perçus pour la rénovation de l’Église, dans son avis n° 20220470, du 10 mars 2022. En l'absence de changements de circonstances de droit ou de fait portés à sa connaissance depuis cet avis, elle ne peut donc que déclarer irrecevable, dans cette mesure, cette nouvelle demande d'avis et inviter le demandeur, s’il s'estime insatisfait de la réponse apportée par l'administration à sa demande, à saisir le tribunal administratif compétent.
En deuxième lieu, la commission rappelle qu’il résulte de l'article L2121-26 du code général des collectivités territoriales que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux des organes délibérants des communes, des arrêtés de leur maire, ainsi que de leurs budgets et de leurs comptes. L’ensemble des pièces annexées à ces documents, y compris les pièces justificatives des comptes comme les factures, sont communicables à toute personne qui en fait la demande, selon les modalités prévues par l’article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration.
Elle relève, s’agissant du point 7), que les emplacements destinés à l'affichage d'opinion et à la publicité relative aux activités des associations sans but lucratif sont fixés par arrêté du maire en vertu de l'article L581-13 du code de l'environnement.
La commission précise que si les dispositions précitées du code général des collectivités territoriales ont institué un régime spécifique d'accès aux documents des communes, distinct du régime général d'accès aux documents administratifs organisé par les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, et si les exceptions au droit d'accès prévues à l'article L311-6 de ce code ne sont pas opposables à une demande présentée sur le fondement de ces dispositions spéciales, l'exercice de ce droit d'accès particulier ne saurait faire obstacle, par principe, à la protection de secrets protégés par la loi sur d'autres fondements, tels que le secret de la vie privée ou le secret industriel et commercial (CE, 17 mars 2022, n° 449620).
En l’espèce, la commission émet un avis favorable à la communication des grands livres pour les années 2018 et 2021 mentionnés aux points 1), et des documents mentionnés aux points 7) et 8), sous ces réserves.
En troisième lieu, la commission rappelle qu'en vertu du premier alinéa de l'article L311-2 du code des relations entre le public et l'administration : « Le droit à communication ne s'applique qu'à des documents achevés ». En l'espèce, la commission estime qu'un modèle de lettre ne comportant que l'en-tête de la commune et un modèle de signature électronique ne peuvent être regardés comme des documents achevés. Elle considère ainsi que la demande mentionnée au point 2) est irrecevable.
En quatrième lieu, la commission estime que, sans autre élément d'information portant sur la nature des colis visés par le demandeur, les demandes mentionnées aux points 4) et 5) sont trop imprécises pour permettre à l'administration d'identifier les documents souhaités. Elle ne peut donc que déclarer cette demande irrecevable.
En cinquième lieu, la commission estime que le document mentionné au point 6), qui ne revêt plus de caractère préparatoire, revêt un caractère administratif et est communicable à toute personne qui en fait la demande en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration. Elle émet ainsi un avis favorable.
En dernier lieu, la commission prend note de ce que le traitement de la demande, qui porte sur un nombre important de documents et de nature diverse, fait peser des contraintes importantes sur les services de la commune.
Toutefois, compte tenu des éléments portés à sa connaissance, il ne lui est pas apparu que cette demande présente un caractère abusif. Elle souligne, à cet égard, que si le volume des documents demandés ne peut, par lui-même, justifier légalement un refus de communication, l’administration est en revanche fondée, dans ce cas, à aménager les modalités de communication afin que l'exercice du droit d'accès reste compatible avec le bon fonctionnement de ses services. Si la demande porte sur une copie de documents volumineux qu’elle n’est pas en mesure de reproduire aisément compte tenu de ses contraintes matérielles, l'administration est notamment en droit d'inviter le demandeur à venir consulter ces documents sur place et à emporter copie des seuls éléments qu’il aura sélectionnés. Alternativement, elle peut convenir avec le demandeur d’un échéancier de communication compatible avec le bon fonctionnement des services.
La commission invite en outre le demandeur à faire preuve de modération dans l’exercice du droit d’accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l’administration, et rappelle que l’administration n’est pas tenue de donner suite aux demandes présentant un caractère abusif.