Avis 20225739 Séance du 03/11/2022
Madame X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 21 septembre 2022, à la suite du refus opposé par le maire de Marseille à sa demande de communication de la copie, par envoi électronique ou par envoi postal, des documents suivants :
1) l’organigramme du cabinet du maire de Marseille ;
2) les contrats de recrutement ou les arrêtés de nomination des agents le composant ;
3) les fiches de paie des membres du cabinet depuis le 1er janvier 2021.
En l’absence de réponse du maire de Marseille à la date de sa séance, la Commission estime, en premier lieu, que l’organigramme sollicité au point 1) est un document administratif communicable à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve qu’il existe ou qu’il puisse être obtenu par un traitement automatisé d'usage courant. Elle émet, sous cette réserve, un avis favorable sur ce point.
La Commission rappelle, en deuxième lieu, que la vie privée des fonctionnaires et agents publics doit bénéficier de la même protection que celle des autres citoyens. Les fonctions et le statut de ces personnels justifient toutefois que certaines informations les concernant puissent être communiquées. Il en est ainsi, notamment, de la qualité d'agent public, de l'adresse administrative, ainsi que les statuts, grades et échelons, qui sont librement communicables à toute personne qui en fait la demande en application des dispositions de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration. En revanche, les mentions intéressant la vie privée des agents au nombre desquelles figurent la date de naissance, l’adresse personnelle, l’adresse électronique professionnelle, la situation familiale et numéro de sécurité sociale, ne sont pas communicables à des tiers, en application de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration.
S'agissant des éléments de rémunération, la Commission est défavorable à la communication des informations liées, soit à la situation familiale et personnelle (supplément familial), soit à l'appréciation ou au jugement de valeur porté sur la manière de servir de l'agent (primes pour travaux supplémentaires, primes de rendement), ou encore de celles relatives aux horaires de travail, aux indemnités et heures supplémentaires. Il en va de même, pour le cas où la rémunération comporterait une part variable, du montant total des primes versées ou du montant total de la rémunération, dès lors que ces données, combinées avec les composantes fixes, communicables, de cette rémunération, permettraient de déduire le sens de l'appréciation ou du jugement de valeur porté sur l'agent.
Elle précise que lorsque la rémunération qui figure dans le contrat de travail de l'agent ou sur ses bulletins de salaires résulte de l'application des règles régissant l'emploi en cause, sa communication n'est pas susceptible de révéler une appréciation ou un jugement de valeur, au sens de ces dispositions. En revanche, lorsqu'elle est arrêtée d'un commun accord entre les parties sans être déterminée par de telles règles, elle révèle nécessairement une appréciation et un jugement de valeur portés sur la personne recrutée. La communication de ces documents ne peut, dans ce cas, intervenir qu'après occultation des éléments relatifs à la rémunération (CE, 24 avril 2013, Syndicat CFDT Culture, n° 343024).
La Commission indique également que dans son avis de partie II, n° 20210741, du 11 février 2021, elle a par ailleurs fait évoluer sa position en ce qui concerne le temps de travail des agents publics mentionnés sur les fiches de paye. Elle considère désormais qu'en tant qu'il se rapporte à l’exercice des fonctions publiques de l’agent, le temps de travail réglementaire, c’est-à-dire celui que l’agent doit théoriquement effectuer pour s’acquitter de ses obligations indépendamment des heures effectivement réalisées, de même que la quotité de travail, ne relèvent pas par eux-mêmes de la vie privée des agents concernés. Il en est de même du point de savoir si l’agent occupe un emploi à temps complet ou incomplet et la quotité correspondante, qui constituent des caractéristiques objectives du poste, et de la situation de temps partiel, alors même qu’elle procèderait d’un choix de la part de l’agent, dès lors que cette seule information ne révèle par elle-même aucune information mettant en cause la protection de la vie privée due à l’agent eu égard à la diversité des motifs autorisant cette situation. Seuls les horaires de travail des agents publics et le motif invoqué par l’agent à l’appui d'une demande de temps partiel demeurent ainsi protégés par la protection de sa vie privée.
Enfin, s'agissant des mentions supplémentaires présentes sur le bulletin de paye des agents publics depuis l'entrée en vigueur du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu, la Commission estime que la mention du taux d'imposition, qui apparaît soit comme un taux personnalisé soit comme un taux « neutre », est susceptible, d'une part, de permettre la révélation d'informations liées à la situation personnelle et familiale de l'agent concerné, notamment par le biais de croisement de ces informations avec d'autres éléments disponibles. D'autre part, le taux d'imposition constitue une information propre à la situation fiscale de l'agent qui relève du champ d'application de l'article L103 du livre des procédures fiscales, dispositions particulières dérogeant au droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration, et de la vie privée.
En application de ces principes, la Commission émet un avis favorable à la communication des documents mentionnés aux points 2) et 3), sous les réserves précitées.