Avis 20224269 Séance du 08/09/2022
Maître X, X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 6 juillet 2022, à la suite du refus opposé par le président du syndicat mixte d'aménagement hydraulique de la haute vallée de l'Aude à sa demande de communication des documents suivants relatifs aux lots n° 1 et 2 du marché de travaux de gestion et restauration de ripisylve sur le bassin versant de la Haute vallée de l’Aude :
1) la délibération instituant la commission d’appel d’offres ;
2) l’arrêté désignant les membres de la commission d’appel d’offres ;
3) le procès-verbal d’ouverture des plis, ou tout document recensant les candidatures reçues dans le cadre de la passation du marché public ;
4) la liste des candidats invités à négocier ;
5) les courriers adressés aux candidats lors des négociations ;
6) la liste des lots pour lesquels les entreprises ont soumissionné ;
7) la justification de la convocation des membres de la commission d’appel d’offres ;
8) le dossier de candidature de l’entreprise retenue dont l’acte d’engagement et ses annexes, la lettre de candidature (DC1 et/ou DC2), l’état annuel des certificats reçus, l’offre de prix globale, les prestations proposées par l’entreprise attributaire, etc.;
9) les appréciations de l'entreprise lauréate du marché ;
10) les conditions globales de prix des entreprises non retenues ;
11) le rapport d’analyse des offres ou tout document permettant d’apprécier les éléments de notation et de classement des offres, la méthode de notation utilisée ;
12) les procès-verbaux et les rapports de la commission d’appel d’offres ;
13) le cas échéant, le rapport du maître d’œuvre ;
14) les correspondances échangées avec les candidats ;
15) les questions complémentaires adressées aux entreprises ;
16) la copie de l’acte de notification du marché public et son accusé de réception.
En réponse à la demande qui lui a été adressée, le président du syndicat mixte d'aménagement hydraulique de la haute vallée de l'Aude a indiqué à la commission que les documents sollicités ont été communiqués à Maître X, par courrier du 18 juillet 2022. Au soutien de son propos, il a produit, devant la commission, ledit courrier et les documents communiqués.
La commission ne peut, dès lors, que déclarer sans objet la demande de communication visée aux points 1) à 6) et 9) à 16).
La commission constate également que l’acte d’engagement de l’attributaire relatif au lot n° 2 et ses annexes, ainsi que son offre de prix globale pour les deux lots, ont été communiqués à Maître X par le courrier du 18 juillet 2022. Elle ne peut donc que déclarer sans objet la demande de communication des documents sollicités au point 8) dans cette mesure.
S’agissant du point 7) de la demande, la commission estime que ces documents sont communicables à toute personne en faisant la demande en application des articles L300-2 et L311-1 du code des relations entre le public et l’administration.
S’agissant du surplus des documents sollicités au point 8) de la demande, la commission rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit à ne pas lui attribuer le marché ne permet pas de refuser la communication de ces documents.
Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte en effet de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, Centre hospitalier de Perpignan, n° 375529, que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables, les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières, etc.).
En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité concurrentiel et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers. Revenant sur sa doctrine antérieure, la commission a également précisé dans son conseil n° 20221455 du 21 avril 2022, qu’il en va aussi désormais ainsi des factures, bons de commande, états d’acompte, décomptes et autres pièces établies dans le cadre de l’exécution d’un marché public, en tant que ces documents mentionnent les prix unitaires.
L’examen de l’offre des entreprises non retenues au regard des mêmes principes conduit de même la commission à considérer que leur offre de prix globale est, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’est pas.
En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants :
- les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ;
- dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres), les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises.
La commission précise enfin que si la liste des entreprises ayant participé à la procédure est librement communicable, en revanche les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du marché sont librement communicables.
En application de ces principes, la commission estime que l’acte d’engagement de l’attributaire relatif au lot n° 1 et ses annexes sont communicables à toute personne en faisant la demande, sous la réserve tenant au secret des affaires s’agissant des annexes financières.
La commission considère également que les pièces de candidature, en tant qu’elles concernent l’attributaire (DC1 et DC2) sont librement communicables à toute personne en faisant la demande sous la réserve tenant au secret des affaires et, le cas échéant (extrait K-Bis notamment), au secret de la vie privée.
Elle estime, en outre, que les attestations de régularité fiscale et sociale du candidat retenu participent des pièces d'un marché public, dans la mesure où leur production est exigible, sur le fondement du code de la commande publique, pour toute candidature à un marché public. Compte-tenu du caractère général de ces attestations fournies par la direction générale des finances publiques et l’URSSAF, visant à attester de la régularité de la situation des entreprises vis-à-vis de leurs obligations fiscales et sociales, et de l’absence de mentions couvertes par le secret des affaires, la commission estime que ces documents sont communicables à toute personne en faisant la demande.
Elle émet donc un avis favorable sur ce point, dans cette mesure et sous ces réserves.
Elle estime, en revanche, que les prestations proposées par l’entreprise attributaire, qui sont contenues dans le mémoire technique de l’attributaire, sont couvertes par le secret des affaires.
Elle émet donc un avis défavorable à la communication de ce document.