Conseil 20221558 Séance du 21/04/2022

La Commission d'accès a examiné lors de sa séance du 21 avril 2022 votre demande de conseil relative à la possibilité de solliciter des preuves complémentaires et notamment un acte de notoriété pour justifier la qualité d'ayant droit dans le cadre d’une demande de communication, formulée par une société d’assurance intervenant au nom et pour le compte d’une assurée, du dossier médical de son fils décédé au sein de l’établissement hospitalier le 10 septembre 2021 afin de connaître la cause de sa mort et faire valoir ses droits en application des dispositions des articles L1110-4 et L1110-7 du code de la santé publique, considérant ce qui suit : 1) les éléments transmis par l’assurée, le livret de famille et l'acte de naissance de son fils, ne permettent pas d'attester formellement l'absence d'enfant du défunt, et donc sa qualité d'ayant droit à titre légal ; 2) la société de protection juridique estime par ailleurs qu'en application de l'arrêté du 5 mars 2004 portant homologation des recommandations de bonnes pratiques relatives à l'accès aux informations concernant la santé d'une personne, et notamment l'accompagnement de cet accès, il n' y a pas d'obligation pour un ayant droit de fournir un acte de notoriété et que la demande de son assurée est fondée dans la mesure où les pièces fournies sont suffisamment probantes pour vérifier sa qualité d'ayant droit. La Commission vous rappelle qu'en application des dispositions combinées des articles L1110-4 et L1111-7 du code de la santé publique, telles que le Conseil d'État les a interprétées, les informations médicales concernant une personne décédée sont communicables à ses ayants droit, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité sous réserve que cette demande se réfère à l'un des trois motifs prévus à l'article L1110-4 - à savoir connaître les causes du décès, faire valoir leurs droits ou défendre la mémoire du défunt, dans la mesure strictement nécessaire au regard du ou des objectifs poursuivis et à condition que le patient ne s'y soit pas opposé de son vivant. Ces dispositions n'instaurent donc au profit des ayants droit d'une personne décédée qu'un droit d'accès limité à certaines informations médicales, et non à l’entier dossier médical. Les ayants droit ainsi visés sont, en premier lieu, les successeurs légaux du défunt, déterminés conformément aux articles 731 et suivants du code civil, comme l'a rappelé l'arrêté du 3 janvier 2007 portant modification de l'arrêté du 5 mars 2004 portant homologation des recommandations de bonnes pratiques relatives à l'accès aux informations concernant la santé d'une personne. La commission vous précise que l'article 734 de ce code prévoit qu'en l'absence de conjoint successible, les parents sont appelés à succéder ainsi qu'il suit : / 1° Les enfants et leurs descendants ; / 2° Les père et mère ; les frères et sœurs et les descendants de ces derniers ; / 3° Les ascendants autres que les père et mère ; / 4° Les collatéraux autres que les frères et sœurs et les descendants de ces derniers. Chacune de ces quatre catégories constitue un ordre d'héritiers qui exclut les suivants. En vertu de l'article R1111-1 du code de la santé publique, l'établissement de santé est tenu de s'assurer de l'identité du demandeur avant de procéder à la communication du dossier médical sollicité. Il est ainsi fondé à exiger du demandeur la production préalable des pièces de nature à établir cette identité, telles que, par exemple, une carte d'identité, un livret de famille, un certificat d’hérédité ou encore un acte de notoriété. La Commission relève par ailleurs que, face aux refus de nombreuses mairies de délivrer des certificats d’hérédité et au coût lié à l’établissement par un notaire d’un acte de notoriété, la loi n° 2015-177 du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures a modifié l’article L312-1-4 du code monétaire et financier, afin de faciliter la preuve de la qualité d’héritier et l’accomplissement des démarches de gestion en lien avec des successions portant sur de faibles montants. Cet article dispose désormais que : « La personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles du défunt peut obtenir, sur présentation de la facture des obsèques, le débit sur les comptes de paiement du défunt, dans la limite du solde créditeur de ces comptes, des sommes nécessaires au paiement de tout ou partie des frais funéraires, auprès des banques teneuses desdits comptes, dans la limite d'un montant fixé par arrêté du ministre chargé de l'économie. Sous réserve de justifier de sa qualité d'héritier, tout successible en ligne directe peut : 1° Obtenir, sur présentation des factures, du bon de commande des obsèques ou des avis d'imposition, le débit sur les comptes de paiement du défunt, dans la limite des soldes créditeurs de ces comptes, des sommes nécessaires au paiement de tout ou partie des actes conservatoires, au sens du 1° de l'article 784 du code civil, auprès des établissements de crédit teneurs desdits comptes, dans la limite d'un montant fixé par arrêté du ministre chargé de l'économie ; 2° Obtenir la clôture des comptes du défunt et le versement des sommes y figurant, dès lors que le montant total des sommes détenues par l'établissement est inférieur à un montant fixé par arrêté du ministre chargé de l'économie. Pour l'application des 1° et 2°, l'héritier justifie de sa qualité d'héritier auprès de l'établissement de crédit teneur desdits comptes soit par la production d'un acte de notoriété, soit par la production d'une attestation signée de l'ensemble des héritiers, par lequel ils attestent : a) Qu'il n'existe pas de testament ni d'autres héritiers du défunt ; b) Qu'il n'existe pas de contrat de mariage ; c) Qu'ils autorisent le porteur du document à percevoir pour leur compte les sommes figurant sur les comptes du défunt ou à clôturer ces derniers ; d) Qu'il n'y a ni procès, ni contestation en cours concernant la qualité d'héritier ou la composition de la succession. Pour l'application du présent 2°, l'attestation mentionnée au cinquième alinéa doit également préciser que la succession ne comporte aucun bien immobilier. Lorsque l'héritier produit l'attestation mentionnée au cinquième alinéa, il remet à l'établissement de crédit teneur des comptes : – son extrait d'acte de naissance ; – un extrait d'acte de naissance du défunt et une copie intégrale de son acte de décès ; – le cas échéant, un extrait d'acte de mariage du défunt ; – les extraits d'actes de naissance de chaque ayant droit désigné dans l'attestation susmentionnée ; – un certificat d'absence d'inscription de dispositions de dernières volontés. » La Commission en déduit que l'attestation dressée en mairie, par laquelle une personne désigne les héritiers apparents laissés par la personne décédée et atteste se porter fort et caution au nom des autres cohéritiers, n'a pas la même valeur juridique qu'un acte de notoriété dressé par un notaire dans les conditions prévues par les articles 730-1 à 730-3 du code civil. La commission considère toutefois que, conformément à l'article 730 du code civil, la preuve de la qualité d'héritier s'établit par tous moyens et que rien ne fait obstacle à ce que des héritiers puisse se prévaloir d’une attestation de porte-fort afin d’obtenir la communication de dossier médical d’une personne décédée. En l’espèce, la Commission relève que la mère du défunt vous a seulement produit le livret de famille la concernant, ainsi que l’acte de naissance de son fils. La commission estime qu’elle ne justifie pas au regard de l'article 734 du code civil précité, par ces seules productions, de sa qualité d’ayant droit. Compte tenu de ce qui précède, la Commission estime qu’il vous appartient dès lors d’inviter la mère du défunt, si elle le souhaite, à justifier auprès de vos services de sa qualité d’ayant droit de son fils (par tout moyen : par exemple, par un acte de notoriété, un certificat d'hérédité ou une attestation de porte-fort). En l’absence de précision suffisante sur la qualité d’ayant droit, après avoir invité l’intéressée à justifier de cette qualité, vous pourrez légalement refuser de faire droit à la demande dont vous êtes saisi.