Avis 20215934 Séance du 25/11/2021
Communication d'une copie, de préférence par courrier électronique à défaut par envoi postal, des documents suivants :
1) l’arrêté de recrutement de Madame X et de Monsieur X ;
2) les arrêtés d’attribution de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) et de la prime de responsabilité attribuées à Madame X et à Monsieur X ;
3) le relevé des payes versées (extrait du grand livre) entre le 1er juin 2021 et le 30 août 2021.
Madame X, pour X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 20 octobre 2021, à la suite du refus opposé par le maire de Saint-Jean-de-Braye à sa demande de communication d'une copie, de préférence par courrier électronique à défaut par envoi postal, des documents suivants :
1) l’arrêté de recrutement de Madame X et de Monsieur X ;
2) les arrêtés d’attribution de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) et de la prime de responsabilité attribuées à Madame X et à Monsieur X ;
3) le relevé des payes versées (extrait du grand livre) entre le 1er juin 2021 et le 30 août 2021.
La commission rappelle, à titre liminaire, qu’elle n’est pas compétente pour se prononcer sur le droit d’information que les représentants du personnel et les organisations syndicales peuvent tirer, en cette qualité, de textes particuliers. Ces derniers peuvent en revanche se prévaloir, comme tout administré, du livre III du code des relations entre le public et l'administration et des régimes particuliers énumérés aux articles L342-1 et L342-2 de ce code pour obtenir la communication de documents.
La commission rappelle ensuite qu’il résulte de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux du conseil municipal, des arrêtés municipaux, ainsi que des budgets et comptes de la commune. L’ensemble des pièces annexées à ces documents, y compris les pièces justificatives des comptes, sont communicables à toute personne qui en fait la demande, selon les modalités prévues par l’article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration.
La commission rappelle également que, dans sa décision Commune de Sète du 10 mars 2010 (n° 303814), le Conseil d'État a jugé, à propos des dispositions de l'article L2121-26 du code général des collectivités territoriales applicables aux communes, qu'elles ne sauraient être interprétées, eu égard à leur objectif d'information du public sur la gestion municipale, comme prescrivant la communication des arrêtés portant des appréciations d'ordre individuel sur les fonctionnaires communaux. Par suite, de tels arrêtés ne peuvent être communiqués qu’après occultation de la mention du nom des intéressés et le cas échéant des autres mentions permettant d’identifier la personne concernée. Dans le prolongement de cette jurisprudence, la commission a estimé que les objectifs de transparence de la vie locale ne justifiaient pas qu'il soit dérogé au secret médical (conseil n° 20122788 du 26 juillet 2012), au secret de la vie privée (conseil n° 20121509 du 19 avril 2012 et conseil n° 20123242 du 27 septembre 2012), ou au secret des correspondances échangées entre le client et son avocat (avis n° 20111095 du 14 avril 2011). La commission considère, en revanche, qu'il n'y a pas lieu, en principe, d'opposer le secret des affaires sur le fondement de l'article L2121-26 du code général des collectivités territoriales.
La commission qui a pris connaissance des arrêtés de nomination par voie de mutation et des arrêtés de détachement dans les emplois fonctionnels occupés par ces agents, correspondant au point 1) ainsi que des arrêtés portant attribution d'une nouvelle bonification indiciaire mentionnés au point 2) considère que ces documents administratifs sont communicables à toute personne qui en fait la demande en application des principes ci-dessus rappelés. Elle émet dès lors un avis favorable dans cette mesure.
S'agissant de l'arrêté de régularisation portant attribution de la prime de responsabilité à Monsieur X mentionné au point 2), dont elle a pu prendre connaissance, ainsi que de l'arrêté identique concernant Madame X, s'il existe, la commission précise que les arrêtés fixant individuellement le montant des primes, lorsque celles-ci comportent une part modulable en fonction de la manière de servir, font apparaître un jugement de valeur sur les agents concernés. En l'absence de précision quant aux modalités de fixation du montant de cette prime de responsabilité, la commission émet un avis favorable à la communication de ces arrêtés, sous réserve que ce montant soit entièrement déterminé par référence à des critères objectifs et ne dépende notamment, ni de la situation personnelle du bénéficiaire ni de sa manière de servir. Dans le cas contraire, elle ne pourrait qu'émettre un avis défavorable à leur communication.
S'agissant du point 3), la commission relève que le grand livre comptable constitue un document administratif communicable à toute personne qui en fait la demande en application des dispositions précitées de l'article L2121-26 du code général des collectivités territoriales, sous réserve toutefois de l'occultation des mentions protégées en application de la jurisprudence Commune de Sète.
La commission, qui a pris connaissance des extraits du livre de paie concernant Madame X et Monsieur X, considère qu'ils sont communicables à toute personne qui en fait la demande après occultation des éléments individualisés de la rémunération liés soit à la situation familiale et personnelle des agents en cause, notamment le supplément familial, les allocations familiales, l'impôt sur le revenu prélevé à la source, soit à l’appréciation ou au jugement de valeur porté sur sa manière de servir, tels que l'IFSE.
Le maire de Saint-Jean-de-Braye a également interrogé la commission sur le caractère communicable de l’arrêté d’attribution d’IFSE à Madame X.
S'agissant de cet arrêté, la commission rappelle à titre liminaire sa position constante selon laquelle les bulletins de paie des agents publics sont des documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve toutefois de l’occultation préalable de toutes les mentions dont la communication porterait atteinte au secret de la vie privée de l’agent concerné (par exemple la date et le lieu de naissance, l’adresse personnelle, la situation familiale) ainsi que celles révélant une appréciation ou un jugement de valeur concernant celui-ci, par exemple les éléments de rémunération liés à la façon de servir de l’agent (notamment les primes de rendement, les primes pour travaux supplémentaires ou le montant total des rémunérations si la communication de ce montant permet de déduire celui des primes liées à la manière de servir).
La commission note ensuite que le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel, créé par le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 et dont les modalités de mise en œuvre ont été précisées par une circulaire du 5 décembre 2014 de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique et du secrétaire d'État chargé du budget, est composé de deux primes distinctes :
- l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE), d’une part, versée mensuellement aux agents ;
- le complément indemnitaire annuel lié à l'engagement professionnel et à la manière de servir, d’autre part, versé en un ou deux fois au cours d’une année.
La commission souligne, en premier lieu, que ce complément indemnitaire est une composante facultative du RIFSEEP qui permet de rémunérer la valeur professionnelle de l'agent, son investissement personnel, son sens du service public, sa capacité à travailler en équipe et sa contribution au travail collectif. Elle considère donc que son montant, en ce qu'il révèle l’appréciation ou le jugement de valeur porté sur la manière de servir, doit être occulté lors de la communication du bulletin de paie d'un agent public.
La commission constate, en second lieu, que le montant de l’IFSE est calculé en tenant compte de la nature des fonctions exercées par l'agent, ce qui la distingue donc d'une prime variable qui ne dépendrait que de l’appréciation de la valeur et de l'engagement professionnels de l'agent. Toutefois, elle souligne que le montant de cette indemnité intègre une part relative à l'expérience professionnelle acquise par l'agent, qui est susceptible de varier en fonction de l'élargissement des compétences professionnelles, de l'approfondissement des savoirs et de la consolidation des connaissances pratiques. Ainsi, comme le précise la circulaire du 5 décembre 2014, le réexamen périodique de l'IFSE n'implique pas une revalorisation automatique de celle-ci. La commission considère que les modalités de calcul de l’IFSE, en tant qu’elles intègrent cette appréciation sur l’évolution des compétences d’un agent public, sont susceptibles de révéler un jugement de valeur concernant cet agent. Elle estime donc que le montant de l’IFSE doit également être occulté lors de la communication du bulletin de paie d'un agent public.
La commission en déduit que l'arrêté individuel pris au titre de l'IFSE, en tant qu'il a pour objet de fixer le montant de cette dernière, n'est communicable qu'à l'agent concerné. Elle émet donc un avis défavorable sur ce point.