Avis 20212746 Séance du 23/09/2021

Communication du protocole transactionnel et de ses annexes signé avec la société X en mars 2021.
Monsieur X, X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 22 avril 2021, à la suite du refus opposé par le président de Paris La Défense à sa demande de communication du protocole transactionnel et de ses annexes, signé avec la société X en mars 2021. La commission précise, à titre liminaire, qu’en application du 1er alinéa de l'article 2044 du code civil, une transaction est « un contrat par lequel les parties […] terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître ». Une transaction conclue par une personne morale de droit public présente le caractère de contrat administratif ou de droit privé, selon qu’elle se rapporte à un litige relevant dans le premier cas, de la compétence du juge administratif et dans le second, de celle du juge judiciaire. Revenant sur sa doctrine antérieure, la commission estime désormais qu’un protocole transactionnel est détachable de la fonction de juger et donc de la phase juridictionnelle qu’elle tend à éviter. La commission souligne en outre, qu’aux termes de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, « Sont considérés comme documents administratifs, au sens des titres Ier, III et IV du présent livre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission. (…) ». La commission déduit de ces dispositions que les documents élaborés ou détenus par les établissements publics à caractère industriel et commercial constituent des documents administratifs s'ils sont élaborés ou détenus dans le cadre de la mission de service public de ces établissements. Les documents relatifs à des contrats conclus entre ces établissements et des personnes privées ne constituent des documents administratifs que s'ils entretiennent un lien suffisamment direct avec la gestion du service public. La commission souligne, ensuite, que le Conseil d'État a jugé qu'un protocole transactionnel conclu par l’administration afin de prévenir ou d’éteindre un litige relevant de la compétence de la juridiction administrative, constituait un contrat administratif et présentait le caractère d’un document administratif au sens du code des relations entre le public et l’administration (CE, n° 403465, 18 mars 2019). La commission considère, par ailleurs, qu’un protocole transactionnel ayant, d’une part, pour co-contractante une des personnes mentionnées à l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration et, d’autre part, un objet en rapport direct avec l'exercice de missions de service public dont cette autorité est investie ou en relation avec la gestion du domaine privé de l’État ou d'une collectivité territoriale, revêt le caractère de document administratif au sens du code des relations entre le public et l’administration, fût-il un contrat de droit privé ayant pour objet de prévenir ou d’éteindre un litige relevant de la compétence de la juridiction judiciaire. La commission précise que lorsqu’un tel contrat vise à éteindre un litige porté devant la juridiction administrative ou judiciaire, sa communication est toutefois de nature à porter atteinte au déroulement de la procédure juridictionnelle engagée. Elle ne peut, dès lors, intervenir, sous réserve du respect des autres secrets protégés par la loi tel notamment le secret des affaires, qu’après que l’instance en cause a pris fin. En l’espèce, la commission relève que Paris la Défense est un établissement public local à caractère industriel et commercial (EPIC) chargé d’une mission de service public consistant, notamment, à conduire toute action de nature à favoriser l'aménagement, le renouvellement et le développement urbains et durables dans un périmètre couvrant le quartier de la Défense (L328-2 du code de l’urbanisme). Elle observe, en outre, que la demande de communication vise le protocole transactionnel que le conseil d’administration de cet EPIC a approuvé avec la société X, le 26 mars 2021. Ce contrat, qui se rapporte au projet de construction « Hermitage Plazza » dans le quartier de La Défense, porté par Paris La Défense et confié à la société X, a été élaboré dans le cadre d’une médiation engagée à l’automne 2020, sous l’égide d’un médiateur désigné par le tribunal judiciaire de Nanterre. La commission comprend des informations portées à sa connaissance que ce contrat, dont elle n’a pas pu prendre connaissance, met fin aux désaccords contractuels entre Paris La Défense et la société X, en redéfinissant leurs obligations respectives, en fixant un nouveau calendrier et en précisant les conditions financières de son exécution. Elle estime que ce document, bien que constituant un contrat de droit privé ayant pour objet de prévenir ou d’éteindre un litige relevant de la compétence de la juridiction judiciaire, présente un lien direct avec les missions de service public de l’établissement Paris La Défense et doit donc être regardé comme un document administratif au sens de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration. La commission observe, cependant, qu’en réponse à la demande qui lui a été adressée, l’établissement public Paris La Défense lui a indiqué que le protocole transactionnel sollicité avait été élaboré dans le cadre d’une médiation, soumise au principe de la confidentialité. La commission estime que la confidentialité imposée par le législateur (article 131-14 du code de procédure civile et article 21-3 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative), qui constitue un principe directeur des processus de médiation, indispensable pour garantir la transparence et la confiance des personnes y ayant recours et, par suite, l’effectivité de ce mode alternatif de règlement des différends, doit être regardée comme un secret protégé par la loi au sens du h) du 2° de l’article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration (à rapprocher pour une médiation administrative de l’avis n° 20202442 du 8 octobre 2020). La commission en déduit que le protocole transactionnel demandé, document administratif non détachable d’un processus de médiation initié devant le tribunal judiciaire de Nanterre, n’est pas communicable à un tiers sur le fondement des dispositions du titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l'administration. Elle émet, dès lors, un avis défavorable à la demande.