Avis 20181074 Séance du 12/07/2018

Copie par courriel ou sur CD-ROM des documents suivants concernant les conventions de rejets d'eaux usées non domestiques dans le réseau d'égout, actuellement en vigueur : 1) l'intégralité des conventions ; 2) l'intégralité des délibérations approuvant la signature de ces conventions.
Monsieur X, X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 26 février 2018, du refus opposé par la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée à sa demande de communication d'une copie, par courriel ou sur CD-ROM, des documents suivants concernant les conventions de rejets d'eaux usées non domestiques dans le réseau d'égout, actuellement en vigueur : 1) l'intégralité des conventions ; 2) l'intégralité des délibérations approuvant la signature de ces conventions. Ayant pris connaissance de la réponse de la communauté d’agglomération à la demande qui lui a été adressée, la commission rappelle que le droit d'accès aux documents contenant des « informations relatives à l’environnement » au sens de l’article L124-2 du code de l’environnement s'exerce dans les conditions définies par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre I du code de l'environnement, qui doivent être interprétées conformément aux dispositions de la directive du 28 janvier 2003 concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement. Par deux arrêts C-673/13 et C-442/14 du 23 novembre 2016, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a jugé que constituent des « émissions dans l'environnement » au sens de celles-ci les rejets directs ou indirects, dans l’air, l’eau ou le sol, de substances, vibrations, chaleur ou bruit à partir de sources ponctuelles ou diffuses de certaines installations industrielles y définies, sans qu'il y ait lieu ni de distinguer la notion d’« émissions » de celles de « déversements » et de « rejets » dans l’environnement, ni de caractériser un lien suffisamment direct entre les informations en cause et les émissions. La Cour a précisé en outre que la finalité de la directive, à l'aune de laquelle doivent être interprétées ses dispositions, est de garantir le droit d’accès aux informations concernant des facteurs, tels que les émissions, qui ont ou sont susceptibles d’avoir des incidences sur les éléments de l’environnement, notamment sur l’air, l’eau et le sol et de permettre au public de vérifier si les émissions, rejets ou déversements ont été correctement évalués et de raisonnablement comprendre la manière dont l’environnement risque d’être affecté par lesdites émissions. En l'espèce, les documents demandés portent sur des informations relatives au déversement d'eaux résiduaires non domestiques dans le réseau collectif d'assainissement de l'agglomération de Béziers, aux fins de leur traitement par la station d'épuration de cette commune. La commission relève que l'article L1331-10 du code de la santé publique prévoit que « Tout déversement d'eaux usées autres que domestiques dans le réseau public de collecte doit être préalablement autorisé par le maire ou, lorsque la compétence en matière de collecte à l'endroit du déversement a été transférée à un établissement public de coopération intercommunale ou à un syndicat mixte, par le président de l'établissement public ou du syndicat mixte, après avis délivré par la personne publique en charge du transport et de l'épuration des eaux usées ainsi que du traitement des boues en aval, si cette collectivité est différente. Pour formuler un avis, celle-ci dispose d'un délai de deux mois, prorogé d'un mois si elle sollicite des informations complémentaires. A défaut d'avis rendu dans le délai imparti, celui-ci est réputé favorable./(...)/L'autorisation prévue au premier alinéa fixe notamment sa durée, les caractéristiques que doivent présenter les eaux usées pour être déversées et les conditions de surveillance du déversement./Toute modification ultérieure dans la nature ou la quantité des eaux usées déversées dans le réseau est autorisée dans les mêmes conditions que celles prévues au premier alinéa./L'autorisation peut être subordonnée à la participation de l'auteur du déversement aux dépenses d'investissement entraînées par la réception de ces eaux./Cette participation s'ajoute, le cas échéant, aux redevances mentionnées à l'article L2224-12-2 du code général des collectivités territoriales et aux sommes pouvant être dues par les intéressés au titre des articles L1331-2, L1331-3, L1331-6, L1331-7 et L1331-8 du présent code. » La commission estime que les flux concernés ont nécessairement une incidence sur l'état chimique de l'ensemble des eaux à l'issue de leur traitement, et notamment sur le respect des objectifs fixés par le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux en application de l'article L212-1 du code de l'environnement, issus de la loi n° 2004-338 du 21 avril 2004 portant transposition de la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau et qu'un droit d'accès aux informations relatives à ces flux est nécessaire pour permettre au public de raisonnablement comprendre la manière dont l'environnement est susceptible d'être affecté par ceux-ci. Dès lors, les informations relatives aux conventions de déversement autorisées en application de l'article L1331-10 du code de la santé publique revêtent le caractère d'informations relatives à l'environnement au sens de l'article L124-2 du code de l'environnement. La commission souligne qu'en vertu des dispositions du II de l'article L124-5 du même code, l'autorité publique ne peut rejeter une demande portant sur une information relative à des « émissions de substances dans l'environnement » que dans le cas où sa communication porterait atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, ou encore au déroulement des procédures juridictionnelles, à la recherche d'infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales ou enfin à des droits de propriété intellectuelle. En l'espèce, la communauté d'agglomération s'interroge sur les risques d'atteintes à la sécurité publique susceptibles de découler de la communication de l'annexe de certaines conventions, en particulier des plans de masse ou plans des installations ainsi que de la liste des produits chimiques utilisés. La commission relève que les informations contenues dans les plans de masse ou plans des installations ne sont pas relatives à des émissions de substances dans l'environnement au sens de l’article L124-5 du code de l'environnement, elles sont donc couvertes par la sécurité publique, en application du d) de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration et par le secret industriel et commercial protégé par le 1° de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration. En ce qui concerne la liste des produits chimiques, la commission rappelle qu'il appartient en première intention à l'autorité détentrice des documents d'apprécier de manière concrète les risques au regard de la sécurité publique, le cas échéant à l'issue d'une consultation avec le co-contractant et le représentant de l'Etat dans le département, notamment à la lumière de l'Instruction du Gouvernement du 6 novembre 2017 relative à la mise à disposition et aux conditions d’accès des informations potentiellement sensibles pouvant faciliter la commission d’actes de malveillance dans les installations classées pour la protection de l’environnement, et de les justifier de manière circonstanciée, substance par substance, et convention par convention. La commission relève par ailleurs que l'instruction en cause souligne l'intérêt de contribuer à une bonne information du public et au développement de la culture de sécurité, et recommande l'organisation en préfecture, dans des conditions contrôlées, de l’accès à des documents contenant des informations relevant de l’annexe II-A pour des personnes en justifiant un intérêt, soit d'informations relevant de l'exception relative à la sécurité publique. Enfin, la commission rappelle qu’il résulte de l’article L5211-46 du code général des collectivités territoriales que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale et que le secret en matière commerciale et industrielle n'est pas, dans ce cadre, opposable à une demande d'accès à de tels documents (CE, 10 mars 2010, Commune de Sète, n° 303814). La commission émet, dès lors, un avis favorable à la communication des documents visés au point 1) de la demande, à l'exclusion des annexes portant sur les plans de masse et plans des installations, et sous réserve, en ce qui concerne les listes de substances, de l'absence de risque au regard de la sécurité publique, et, en toute hypothèse, à celle des délibérations mentionnées au point 2). La commission invite la communauté d'agglomération, à l'issue des consultations qui lui paraissent nécessaires, à déterminer de manière précise et motivée, substance par substance, et convention par convention, les mentions dont la communication lui paraissent susceptibles de porter atteinte à la sécurité publique.