Avis 20181006 Séance du 14/06/2018

Communication du document de recueil et du compte rendu d'évaluation dans son intégralité la concernant.
Madame X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 27 février 2018, à la suite du refus opposé par le président du conseil départemental du Pas-de-Calais à sa demande de communication du document de recueil et du compte rendu d'évaluation dans son intégralité la concernant. La commission rappelle, à titre liminaire, que les dossiers et rapports établis par les services de l’aide sociale à l’enfance en vue de la saisine de l’autorité judiciaire ou à la demande de celle-ci ont le caractère de documents judiciaires, non celui de documents administratifs, et n’entrent donc pas dans le champ d’application du droit d’accès garanti par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration. La commission n’est pas compétente pour se prononcer sur la communication de tels documents. S’agissant des autres dossiers et rapports, qui n’ont pas été établis pour les besoins ou dans le cadre d’une procédure judiciaire et conservent un caractère administratif même dans le cas où ils auraient été néanmoins transmis à l’autorité judiciaire, ils sont en principe communicables à la personne directement concernée, ou, lorsqu’il s’agit d’un mineur, à ses représentants légaux, sous réserve, en application des articles L311-6 et L311-7 du code des relations entre le public et l’administration, de la disjonction des pièces ou de l’occultation des mentions dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée d’autres personnes ou au secret médical, ou portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable, ou faisant apparaître le comportement d’une personne, autre qu’une personne chargée d’une mission de service public, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice. La commission estime que l’identification de l’auteur d’un signalement fait apparaître de la part de celui-ci, lorsqu’il ne s’agit pas d’un agent d’une autorité administrative, agissant dans l’exercice de sa compétence, un comportement dont la divulgation pourrait porter préjudice à son auteur. La communication d’un signalement à l’un des parents de l’enfant n’est donc permise par le code des relations entre le public et l’administration que dans le cas où aucune des mentions qu’il comporte n’est susceptible de permettre d’en identifier l’auteur, s’il ne s’agit pas d’un agent d’une autorité administrative agissant dans le cadre de sa mission de service public, et ne met pas en cause la vie privée ou le comportement d’un tiers, y compris l’autre parent. En outre, les documents qui concernent directement, à un titre ou un autre, un enfant mineur ne sont pas communicables à une autre personne, même si celle-ci en assure la représentation légale, lorsque s’y oppose l’intérêt supérieur de l’enfant, protégé par l’article 3 de la convention internationale relative aux droits de l’enfant (cf avis CADA n°20152463 du 10 septembre 2015). C’est au vu des circonstances propres à chaque situation qu’il convient d’apprécier l’intérêt supérieur de l’enfant. Il s’oppose le plus souvent à la communication à ses parents des documents faisant apparaître que l'enfant les met gravement en cause. Enfin, la commission rappelle que le secret professionnel doit être regardé comme un secret protégé par la loi au sens du h) de l’article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration, justifiant un refus de communication. L’article L221-6 du code de l’action sociale et des familles dispose lui-même que « Toute personne participant aux missions du service de l’aide sociale à l’enfance est tenue au secret professionnel sous les peines et dans les conditions prévues par les articles 226-13 et 226-14 du code pénal ». La commission estime que les exceptions au droit d’accès aux documents administratifs qui résultent de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration et de l’article L226-9 du code de l’action sociale et des familles ou sont inspirées par l’intérêt supérieur de l’enfant protégé par l’article 3 de la convention internationale des droits de l’enfant couvrent, à l’égard des personnes directement concernées, la plupart des documents également susceptibles de relever du secret professionnel des agents de l’aide sociale à l’enfance. Ce secret professionnel ne trouvera donc à s’opposer de manière autonome à la communication de documents administratifs aux personnes directement concernées que dans un nombre limité de cas, qu’il convient d’apprécier, conformément à la jurisprudence pénale, en fonction des circonstances concrètes relatives tant à la teneur du document qu’aux conditions dans lesquelles les informations qu’il comporte ont été confiées aux personnes qui en sont dépositaires. Il est possible au service, en cas de doute, de demander conseil à la commission d’accès aux documents administratifs sur le caractère communicable ou non d’un document déterminé, en application des principes qui viennent d’être rappelés. En l'espèce, en réponse à la demande qui lui a été adressée, le président du conseil départemental a indiqué à la commission avoir communiqué à Madame X le compte rendu d'évaluation d'une information préoccupante après occultation de certains passages. Après avoir pris connaissance du compte rendu intégral, la commission estime que c'est à bon droit qu'il a été procédé à ces occultations avant communication à l'intéressée, à l'exception toutefois des mentions d'identification des adultes de la famille dans laquelle réside l'enfant et d’identification des détenteurs de l'autorité parentale relatives à l'état civil du père de Nolan (nom, prénom, date de naissance) et du passage débutant par les mots « L'IP fait suite » et se terminant par « sur le plan psychologique », dont la commission estime que sa communication à l'intéressée ne serait pas de nature à faire apparaître le comportement d'un tiers dans des conditions qui pourraient lui porter préjudice. Pour ce qui concerne ensuite le document de recueil de l'information préoccupante, la commission convient avec le président du conseil départemental que les mentions sous le paragraphe « nature, date et lieu des faits à l'origine de l'information préoccupante » font apparaître de la part d'un tiers un comportement dont la divulgation pourrait porter préjudice à son auteur. La commission considère toutefois que le document peut être communiqué à Madame X après occultation de ces mentions, sans priver ce document de tout son sens. La commission émet donc un avis défavorable à la communication de ces deux documents dans leur intégralité mais émet un avis favorable à la communication complémentaire des seuls éléments ci-dessus identifiés.