Conseil 20110444 Séance du 03/03/2011

- réponse à apporter à la nouvelle demande formulée par la société Notrefamille.com, éditeur des sites internet www.notrefamille.com et www.genealogie.com, en vue d'obtenir la communication à des fins de réutilisation, des documents suivants déposés auprès des archives départementales : 1) les cahiers nominatifs de recensement des années 1841 à 1906, 2) les registres de naissance de l'état civil des années 1789 à 1890, 3) les registres de mariage de l'état civil des années 1789 à 1906, 4) les registres de décès de l'état civil des années 1789 à 1935 ; sachant que : - d'une part, bien que le demandeur s'engage à effectuer lui-même le travail d'anonymisation des données à caractère personnel concernant les personnes susceptibles d'être encore en vie, il ressort de l'article 13 de la loi du 17 juillet 1978 que l'obligation d'anonymisation incombe à l'administration détentrice et non au réutilisateur ; - d'autre part, les documents, pour les périodes demandées, n'étant disponibles que sous forme de microfilms sur lesquels figurent également également des documents plus récents, susceptibles de concerner des personnes encore en vie, l'obligation d'anonymiser ces derniers documents pourrait être considérée comme entraînant pour l'administration des efforts disproportionnés au sens de l'article 40 du décret n° 2005-1355 du 30 décembre 2005.
La commission d'accès aux documents administratifs a examiné dans sa séance du 3 mars 2011 votre demande de conseil relative à la réponse à apporter à la nouvelle demande formulée par la société Notrefamille.com, éditeur des sites internet www.notrefamille.com et www.genealogie.com, en vue d'obtenir la communication à des fins de réutilisation, des documents suivants déposés auprès des archives départementales : - les cahiers nominatifs de recensement des années 1841 à 1906 ; - les registres de naissance de l'état civil des années 1789 à 1890 ; - les registres de mariage de l'état civil des années 1789 à 1906 ; - les registres de décès de l'état civil des années 1789 à 1935. Plus précisément, la commission relève que la demande de conseil pose deux questions : 1) celle de savoir si le travail d’anonymisation des données personnelles concernant les personnes susceptibles d’être encore en vie, imposé par l’article 13 de la loi du 17 juillet 1978, peut être confié au réutilisateur ou si l’administration doit obligatoirement y procéder elle-même ; 2) celle de savoir si, dès lors que les documents pour les périodes demandées ne sont disponibles que sous forme de microfilms sur lesquels figurent également également des documents plus récents, susceptibles de concerner des personnes encore en vie, l'obligation d'anonymiser ces derniers documents pourrait être considérée comme entraînant pour l'administration des efforts disproportionnés au sens de l'article 40 du décret n° 2005-1355 du 30 décembre 2005. La commission rappelle à titre liminaire qu’ainsi qu’elle l’a déjà estimé dans son avis n° 20103187-PN rendu le 13 septembre 2010 sur la demande de la société Notrefamille.com, les informations en cause figurent dans des archives publiques devenues librement communicables en vertu de l’article L. 213-2 du code du patrimoine. Elles n’ont pas été produites ou reçues dans le cadre d’un service public à caractère industriel et commercial. Elles ne sont pas grevées de droits d’auteur de tiers. Elles constituent par conséquent des informations publiques au sens de l’article 10 de la loi du 17 juillet 1978. La commission souligne également qu’ainsi qu’elle l’a relevé dans le même avis, le projet de la société Notrefamille.com de réaliser une base de données mise en ligne à partir de ces informations constitue bien une réutilisation au sens du même article. Enfin la commission estime que ne peuvent être regardées comme des données personnelles au sens du premier alinéa de l’article 13 de la même loi que celles des mentions figurant sur les registres qui se rapportent à des personnes encore en vie. Elle souligne notamment qu’eu égard à leur nature, les mentions des registres sollicités relatives à des personnes décédées ne sont pas de nature à porter préjudice aux descendants encore en vie de ces personnes et ne sauraient donc être assimilées pour ce motif à des données personnelles. 1) Sur la question de savoir à qui incombe la charge d’un éventuel travail d’anonymisation : Le premier alinéa de l’article 13 de la loi du 17 juillet 1978 dispose que : « Les informations publiques comportant des données à caractère personnel peuvent faire l’objet d’une réutilisation soit lorsque la personne intéressée y a consenti, soit si l’autorité détentrice est en mesure de les rendre anonymes ou, à défaut d’anonymisation, si une disposition législative ou réglementaire le permet ». La commission rappelle, en premier lieu, que ces dispositions ne sont pas applicables à la réutilisation des informations publiques détenues par les services d’archives, en vertu de l’article 11 de la même loi, selon lequel : « Par dérogation au présent chapitre, les conditions dans lesquelles les informations peuvent être réutilisées sont fixées, le cas échéant, par les administrations mentionnées aux a et b du présent article lorsqu’elles figurent dans des documents produits ou reçus par : a) Des établissements et institutions d’enseignement et de recherche ; b) Des établissements, organismes ou services culturels. » Il résulte en effet de ces dispositions, d’une part, que les articles 12 à 18 de la même loi ne s’appliquent pas à la réutilisation des informations publiques détenues par les services d’archives et, d’autre part, qu’il appartient à ces derniers de définir leurs propres règles de réutilisation. Elle relève toutefois qu’il est loisible aux services d’archives de s’inspirer des règles posées au chapitre II de la loi du 17 juillet 1978 pour définir leurs propres règles de réutilisation et, en particulier, de se prévaloir, à l’occasion d’une demande de réutilisation portant sur des données personnelles, des dispositions du premier alinéa de l’article 13, ainsi que semble vouloir le faire, en l’espèce, le service départemental d’archives des Hauts-de-Seine. La commission estime, en second lieu, qu’il résulte des termes mêmes de l’article 13 que le législateur a entendu, par ces dispositions, confier à l’autorité détentrice des informations publiques contenant des données à caractère personnel dont la réutilisation est envisagée le soin de procéder elle-même, si nécessaire, à leur anonymisation. Ces dispositions, dont l’objet est de permettre à l’administration de s’assurer, avant toute réutilisation, de ce que l’anonymisation des données, réalisée par ses soins, est complète et effective, exclut par conséquent que l’administration confie au réutilisateur lui-même la charge d’y procéder. La commission estime en revanche que les dispositions de l’article 13 ne font pas obstacle à ce que l’administration recoure, si elle l’estime opportun, notamment au cas où elle ne disposerait pas des moyens techniques nécessaires à la réalisation des opérations d’anonymisation, à un prestataire de service extérieur pour qu’il y procède en son nom. Elle relève d’ailleurs que dans une telle hypothèse et à condition qu’une licence soit conclue avec le réutilisateur, l’administration pourrait soumettre la réutilisation au paiement d’une redevance dont le montant tiendrait compte du coût d’un tel recours à un prestataire extérieur. 2) Sur l’existence, au cas d’espèce, d’une charge disproportionnée pour l’administration : L’article 40 du décret du 30 décembre 2005 pris pour l’application de la loi du 17 juillet 1978 précise que : « Lorsque la réutilisation n'est possible qu'après anonymisation des données à caractère personnel, l'autorité détentrice y procède sous réserve que cette opération n'entraîne pas des efforts disproportionnés. » L’administration s’interroge sur l’existence, en l’espèce, d’une charge disproportionnée qui ferait obstacle à l’anonymisation et, par voie de conséquence, à la réutilisation. La commission rappelle que l’exigence d’anonymisation des données personnelles posée par l’article 13 de la loi du 17 juillet 1978 ne vaut que lorsqu’est sollicitée la réutilisation de celles-ci. Elle ne saurait ainsi faire obstacle à ce que soient communiqués, en l’absence de toute demande de réutilisation, des documents contenant ces données devenus librement communicables par expiration du délai de protection posé à l’article L. 213-2 du code du patrimoine. Elle en déduit qu’au cas d’espèce, l’article 13 n’oblige l’administration à anonymiser que celles des données personnelles figurant sur les microfilms qui correspondent aux registres dont la société Notrefamille.com demande à réutiliser le contenu. Dès lors que, ainsi qu’il a été dit, ne peuvent être regardées comme des données personnelles devant être occultées que celles de ces mentions qui se rapportent à des personnes encore en vie, la commission estime que la charge que font peser en l’espèce les dispositions de l’article 13 sur l’administration ne revêt pas un caractère disproportionné. S’agissant des informations figurant sur les microfilms se rapportant à des périodes plus récentes et pour lesquelles aucune demande de réutilisation n’est formulée, la commission estime qu’il convient de distinguer deux cas de figure. En premier lieu, celles de ces mentions correspondant à des registres devenus librement communicables en vertu de l’article L. 213-2 du code du patrimoine peuvent être communiquées à la société Notrefamille.com sans qu’aucune disposition de la loi n’oblige à procéder à leur anonymisation, pourvu que la société s’engage à ne pas les réutiliser. En second lieu, les dispositions de l’article L. 213-2 font obstacle à ce que soient communiqués à la société, à défaut de toute demande d’accès par dérogation sur le fondement de l’article L. 213-3 du même code, et même si aucune réutilisation n’est envisagée, des registres qui ne sont pas encore devenus librement communicables. L’administration doit donc procéder à l’occultation de ces registres avant de communiquer les microfilms. La commission estime qu’une telle occultation est possible en l’espèce, par la réalisation d’une copie des microfilms limitée aux registres devenus librement communicables. Cette circonstance ne saurait donc faire obstacle à la communication à la société Notrefamille.com des données qu’elle sollicite.