Avis 20055081 Séance du 19/01/2006
Monsieur XXX, représentant le magazine Capital a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 22 novembre 2005, à la suite du refus opposé par le ministre de l'agriculture à sa demande de copie de la liste des cent plus importants bénéficiaires d'aides européennes, mentionnant à la fois leurs noms ainsi que les montants qu'ils ont perçus pour le dernier exercice comptable connu.
En réponse à la demande de l'intéressé, le ministre de l'agriculture lui a communiqué, après l'avoir rendue anonyme, la liste des montants des 35 plus importantes aides versées par l'office national interprofessionnel des céréales (ONIC) et des 10 plus importantes versées par l'office national interprofessionnel des viandes, de l'élevage et de l'aviculture (OFIVAL), ne laissant apparaître que le montant de l'aide perçue et le nombre d'hectares de l'exploitation. M. G. demande la communication de l'identité des bénéficiaires des aides dont le montant lui a été communiqué.
De façon générale, la commission estime que la liste des bénéficiaires d'aides versées par une personne publique et comportant le montant de ces aides, dès lors qu'elle existe ou peut être établie par un traitement automatisé d'usage courant, constitue un document administratif entrant dans le champ d'application de la loi du 17 juillet 1978. En conséquence, elle est communicable sous réserve que cette communication ne se heurte pas au secret de la vie privée ou au secret en matière industrielle et commerciale protégés par le II de l'article 6 de cette loi.
Il ressort des informations transmises par le ministre que les autorités françaises ne détiennent pas la liste des cent plus importants bénéficiaires d'aides européennes et que son établissement, qui dépasserait en tout état de cause un simple traitement automatisé d'usage courant, leur est matériellement impossible à ce jour dans la mesure où les organismes prestataires utilisent des identifiants différents pour chaque bénéficiaire, ne permettant pas de recoupement. La commission déclare en conséquence la demande sans objet en tant qu'elle tend à l'obtention de cette liste auprès des autorités françaises.
La commission relève également qu'en application de l'article 10 de la loi du 12 avril 2000, les autorités qui versent des subventions à des " organismes de droit privé " sont tenus de communiquer à toute personne qui en fait la demande les budgets et comptes de ces organismes, la convention accompagnant le versement de l'aide lorsqu'elle existe et le compte-rendu financier de la subvention. La commission estime que constituent des organismes au sens de ces dispositions les associations et les groupements. Dans ces conditions, la liste des bénéficiaires entrant dans cette catégorie et du montant cumulé des aides qu'ils ont perçues sur une année est un document communicable.
S'agissant d'aides versées à des personnes physiques ou à des sociétés à caractère civil ou commercial, la commission considère qu'il convient d'opérer une distinction selon la nature des aides versées et leur mode de calcul.
Pour les aides versées en considération de la situation d'une personne physique ou dont le calcul est fonction de celle-ci, la commission estime que le secret de la vie privée fait obstacle à la communication de la liste des bénéficiaires de telles aides et du montant des aides perçues par chacun.
En revanche, lorsqu'il s'agit d'aides versées pour l'exercice d'une activité économique ou culturelle ou encore pour améliorer l'état de l'environnement, indépendamment de la situation personnelle d'une personne physique, la commission estime que le nom des bénéficiaires de ces aides, que ce soient des personnes physiques ou des personnes morales, n'est pas couvert par le secret de la vie privée ni par le secret des affaires. Il en va de même du montant de l'aide perçue sous réserve que la révélation de ce montant ne permette pas d'en déduire une information couverte par le secret en matière industrielle et commerciale telle que le montant du chiffre d'affaires ou celui d'un investissement.
La commission relève que les aides distribuées par l'ONIC et l'OFIVAL sont des aides à l'exploitation dont le montant n'est pas déterminé par la situation personnelle du bénéficiaire. Elle estime que la divulgation du nom des personnes ayant bénéficié, au cours d'une année, des montants cumulés d'aides les plus importants versés par l'ONIC et l'OFIVAL n'est pas contraire aux dispositions du II de l'article 6 de la loi. La liste des bénéficiaires de ces aides assortie de l'indication des montants globaux perçus par chaque bénéficiaire est, à ce titre, communicable de plein droit à toute personne qui en fait la demande en application de l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978.
La commission émet, dès lors, un avis favorable à la communication, en face des montants cumulés d'aides les plus importants versés par l'ONIC et l'OFIVAL, du nom de leurs bénéficiaires.