Conseil 20234061 Séance du 07/09/2023
La Commission d'accès aux documents administratifs a examiné lors de sa séance du 7 septembre 2023 votre demande de conseil relative au caractère communicable à une administrée des noms des avocats mentionnés à l'article 6226 de la version PDF des grands livres de 2021 et 2022 de la commune.
En premier lieu, la commission rappelle qu’il résulte de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux du conseil municipal, des arrêtés municipaux, ainsi que des budgets et comptes de la commune. L’ensemble des pièces annexées à ces documents sont communicables à toute personne qui en fait la demande, selon les modalités prévues par l’article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration.
La commission souligne que si l'article L2121-26 du code général des collectivités territoriales a institué un régime spécifique d'accès aux documents des communes, distinct du régime général d'accès aux documents administratifs organisé par les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, et si les exceptions au droit d'accès prévues aux articles L311-5 et L311-6 de ce code ne sont pas opposables à une demande présentée sur le fondement de ces dispositions spéciales, l'exercice de ce droit d'accès particulier ne saurait faire obstacle, par principe, à la protection de secrets protégés par la loi sur d'autres fondements, tels que le secret de la vie privée (CE 10 mars 2010, n° 303814, commune de Sète ; conseil n° 20121509 du 19 avril 2012 et conseil n° 20123242 du 27 septembre 2012), le secret médical (conseil n° 20122788 du 26 juillet 2012), le secret des correspondances échangées entre le client et son avocat (avis n° 20111095 du 14 avril 2011), ou le secret industriel et commercial (CE, 17 mars 2022, n° 449620).
Par ailleurs, la commission prend acte de la décision du 8 février 2023 n° 452521 par laquelle le Conseil d’État a jugé que s’agissant des budgets et des comptes des communes, le droit de communication qu’instituent les dispositions de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales ne s’étend pas aux pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité qu’il appartient à l’ordonnateur et au comptable public de conserver, en vertu des dispositions de l’article 52 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.
En l’espèce, la commission comprend des documents que vous avez produits que les grands livres de comptes constituent des fichiers de comptabilisation des mandats de dépenses et des titres de recettes, tenus par l'ordonnateur par ordre chronologique, sous la forme d’une série continue, avec rattachement au chapitre et à l’article budgétaire correspondant. Elle en conclut que ces documents sont des documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande dans les conditions prévues par le livre III du code des relations entre le public et l’administration et sous les réserves prévues par les articles L311-5 et L311-6 de ce code.
En deuxième lieu, la commission souligne qu’ainsi que l’a jugé le Conseil d’État (CE, Ass., 27 mai 2005, Département de l’Essonne), l’ensemble des correspondances échangées entre un avocat et son client, et notamment les consultations juridiques rédigées par l’avocat à son intention et ses factures de frais et d’honoraires (CCASS 1re Ch, 13 mars 2008, n° 05-11314), sont couvertes par le secret professionnel, protégé par l’article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971. Une autorité mentionnée l’article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration peut, dès lors, légalement se fonder sur les dispositions du h) du 2° de l’article L311-5 de ce code pour en refuser la communication. Il résulte également de la jurisprudence de la Cour de cassation que le secret professionnel de l’avocat couvre l’ensemble des pièces du dossier ainsi que l’ensemble des correspondances échangées entre l’avocat et son client, y compris celles de ces correspondances qui n’ont pas de rapport direct avec la stratégie de défense, comme la convention d'honoraires, ou les facturations afférentes émises par l’avocat (Cour de cassation, Civ-1, 13 mars 2008, pourvoi n°B05 – 11314).
Toutefois, dans son avis de partie II du 15 décembre 2022 n°20226583, la commission a rappelé que les documents comptables produits par une commune en vue du paiement des factures d’honoraires d’avocats ne peuvent être regardés comme des « correspondances échangées entre le client et son avocat », protégées par le secret professionnel. Seules les factures d’avocats sont protégées par ce secret, dès lors qu’elles constituent des correspondances échangées entre la commune et son avocat.
En troisième lieu, la commission rappelle également que les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité concurrentiel et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. La commission a précisé dans son conseil n° 20221455 du 21 avril 2022, qu’il en va ainsi notamment des factures et bons de commande, qui ne sont communicables qu'après occultation des prix unitaires ou de la décomposition du prix forfaitaire, susceptibles, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé.
En l’espèce, la commission comprend que vous avez d’ores et déjà communiqué copie des grands livres de comptes retraçant les honoraires versés à des avocats, en occultant le seul nom de ces derniers.
La commission vous indique à cet égard que le nom des avocats auquel la commune fait appel n’est pas, en soi, couvert par le secret professionnel protégeant les correspondances échanges entre un avocat et son client.
Elle estime par suite qu’une copie non occultée de ces mentions est en principe communicable à toute personne qui en fait la demande, à la condition que ne soient pas ainsi révélés des prix unitaires reflétant la stratégie commerciale des intéressés.