Avis 20233606 Séance du 20/07/2023

Monsieur X, pour l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 12 juin 2023, à la suite du refus opposé par le préfet de l'Aveyron à sa demande de communication des documents suivants : 1) le plan de contrôle eau et nature 2023 ; 2) le bilan 2022 du département. La commission relève, à titre liminaire, que la présente demande s’inscrit dans le cadre d’une série de demandes au sens du deuxième alinéa de l'article L342-1 du code des relations entre le public et l'administration, portant sur des documents de même nature et ayant le même objet, adressées par le même demandeur à huit préfectures. En application des dispositions de l'article précité et du sixième alinéa de l’article R343-3-1 du même code, la commission ne peut être saisie que d'un refus de communication opposé au demandeur, cette saisine valant recours administratif préalable obligatoire pour chacune des demandes correctement identifiées ayant fait l'objet d'un refus de communication et pour laquelle il a été satisfait à la condition d'information de l'administration concernée prévue par le troisième alinéa de l'article L342-1, et elle n'émet qu'un avis. L'avis ainsi émis dégage les principes de communication communs aux documents demandés et s'applique à l’ensemble des demandes rattachées à cette série. 1. En ce qui concerne les questions liminaires : La commission rappelle, en premier lieu, qu’une demande de communication de documents administratifs qui lui est adressée est déclarée sans objet lorsque l'autorité saisie communique spontanément le document demandé postérieurement à l’enregistrement de la demande ou lorsqu'il résulte des indications fournies par cette autorité que le document demandé n'a jamais existé, a été détruit ou a été égaré. Elle précise, en deuxième lieu, que le refus de communication n’est pas établi et la demande d’avis est déclarée irrecevable, lorsque l’administration saisie d’une demande de communication, communique spontanément dans les délais qui lui sont impartis le document demandé au demandeur. La commission rappelle, enfin, qu’en application du quatrième alinéa de l'article L311-2 du code des relations entre le public et l’administration, le droit à communication des documents administratifs ne s'exerce plus lorsque les documents font l'objet d'une diffusion publique. Elle précise que seule une mise en ligne, par l'administration ou sous son contrôle, et dans des conditions permettant d'en garantir la pérennité, d'un document administratif dans un standard ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé dès lors qu'elle en dispose déjà ou qu'elle est susceptible d'en disposer à l'issue d'une opération de transfert, de conversion ou de reproduction courante, peut être regardée comme une diffusion publique au sens du quatrième alinéa de l'article L311-2 du code des relations entre le public et l'administration (avis du 17 octobre 2019, n° 20191393 ; CE, 27 septembre 2022, n° 450737 et 450739). La commission ajoute qu’il est de bonne administration que l’autorité saisie d’une demande de communication indique au demandeur le lien lui permettant de consulter le document concerné. 2. En ce qui concerne les principes de communication des documents sollicités : La commission relève que par une note technique du 22 août 2017, le ministre de la transition écologique et solidaire a recommandé la mise en place dans tous les départements d’une mission inter-services de l’eau et de la nature, associant l’ensemble des services et établissements exerçant des missions dans les domaines de l’eau et de la nature. Cette mission doit produire un plan de contrôle inter-services annuel, arrêté au premier trimestre et soumis à la validation du préfet et du ou des procureurs de la République, afin, notamment, de clarifier les priorités d'action par thème et par secteur géographique au regard des objectifs de préservation des ressources naturelles définis par les directives et règlements européens, de cibler prioritairement les secteurs, activités ou installations correspondant aux principales pressions exercées sur les ressources et milieux naturels et entraînant un risque de non atteinte des objectifs fixés par les directives européennes, de déterminer les objectifs opérationnels et sélectionner les typologies d’installations ou activités à contrôler sur la base d’une analyse de risques, de fixer par thématique les critères d'intervention et la contribution de chacun des acteurs, de définir, pour chaque priorité, la volumétrie globale des contrôles, de tenir compte de l'historique de contrôle et de maintenir une part de contrôle aléatoire des installations ou activités. La note du 22 août 2017 prévoit également qu’un bilan de l’activité de contrôle et des suites données aux contrôles non conformes doit être présenté en fin d’année devant la mission inter-services de l’eau et de la nature. En premier lieu, la commission rappelle qu’aux termes de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration : « Sont considérés comme documents administratifs, au sens des titres Ier, III et IV du présent livre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission. Constituent de tels documents notamment les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions, codes sources et décisions. La commission constate que les plans de contrôle eau et nature ainsi que leurs bilans prévus par la note technique du 22 août 2017 sont reçus et produits par les préfets dans le cadre de leurs missions de service public. Les documents sollicités constituent ainsi des documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande en vertu de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, dans les conditions et sous les réserves prévues par les articles L311-5 et L311-6 du même code. En deuxième lieu, la commission rappelle que l'article L124-2 du code de l'environnement qualifie d'informations relatives à l'environnement toutes les informations disponibles, quel qu'en soit le support, qui ont notamment pour objet : « / 1° L'état des éléments de l'environnement, notamment l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol, les terres, les paysages, les sites naturels, les zones côtières ou marines et la diversité biologique, ainsi que les interactions entre ces éléments ; / 2° Les décisions, les activités et les facteurs, notamment les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements, les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets, susceptibles d'avoir des incidences sur l'état des éléments visés au 1°, ainsi que les décisions et les activités destinées à protéger ces éléments ; / 3° L'état de la santé humaine, la sécurité et les conditions de vie des personnes, les constructions et le patrimoine culturel, dans la mesure où ils sont ou peuvent être altérés par des éléments de l'environnement, des décisions, des activités ou des facteurs mentionnés ci-dessus ; / 4° Les analyses des coûts et avantages ainsi que les hypothèses économiques utilisées dans le cadre des décisions et activités visées au 2° ; / 5° Les rapports établis par les autorités publiques ou pour leur compte sur l'application des dispositions législatives et réglementaires relatives à l'environnement ». En l’espèce, la commission estime que les plans de contrôle eau et nature ainsi que leurs bilans, compte tenu de leurs finalités, contiennent des informations relatives à l’environnement ainsi que des informations relatives à des émissions de substances dans l'environnement. A cet égard, elle souligne que selon les articles L124-1 et L124-3 du code de l’environnement, le droit de toute personne d'accéder à des informations relatives à l’environnement lorsqu'elles sont détenues, reçues ou établies par les autorités publiques ou pour leur compte, s'exerce dans les conditions définies par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre I du code de l'environnement. Les articles L124-4 et L124-5 de ce code précisent les cas dans lesquels l'autorité administrative peut rejeter une demande d'information relative à l'environnement, au nombre desquels ne figure pas le caractère préparatoire du document ou des informations, à condition que le document sollicité soit lui-même achevé (avis n° 20054612 du 24 novembre 2005 et n° 20060930 du 16 mars 2006). Il appartient en particulier à l'autorité administrative, en application des dispositions de l'article L124-4 du code de l'environnement, d'apprécier l'intérêt d'une communication et elle n'est fondée à rejeter une demande d'information relative à l'environnement que si elle porte atteinte : « 1° Aux intérêts mentionnés aux articles L311-5 à L311-8 du code des relations entre le public et l'administration, à l'exception de ceux visés au e et au h du 2° de l'article L. 311-5 ; 2° A la protection de l'environnement auquel elle se rapporte ; (...) ». La commission précise également qu’une information environnementale, lorsqu’elle se rapporte à une personne morale, est non seulement communicable à l’intéressée mais aussi à toute autre personne qui en ferait la demande, sur le fondement des articles L124-1 et suivants du code de l’environnement, sans que l’exception prévue au 3° de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration ne puisse s’y opposer, dès lors que cette information est détenue, reçue ou établie par les autorités publiques mentionnées à l'article L124-3 du code de l'environnement ou pour leur compte (avis de partie II n° 20132830 du 24 octobre 2013). En revanche, l’administration peut, en principe, en application de ce 3°, refuser d’accéder à la demande de communication d’un document administratif - ou de la partie d’un tel document - qui ne comporterait pas d’information relative à l’environnement, au motif que cette communication ferait apparaître le comportement d’une personne, même lorsqu’il s’agit d’une personne morale, si la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice. Par ailleurs, la commission souligne qu'en vertu des dispositions du II de l'article L124-5 du code de l’environnement, interprétées conformément aux dispositions de la directive du 28 janvier 2003 concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement (avis de partie II n° 20090271 du 29 janvier 2009), l'autorité publique ne peut rejeter une demande portant sur une information relative à des « émissions de substances dans l'environnement », telles que les émissions sonores, atmosphériques ou aquatiques, que dans le cas où sa communication porterait atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, ou encore au déroulement des procédures juridictionnelles, à la recherche d'infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales ou enfin à des droits de propriété intellectuelle. Ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce que l'autorité administrative en refuse la communication au motif qu'elles comporteraient des mentions couvertes par le secret des affaires ou le secret de la vie privée. Enfin, la commission rappelle que le droit à communication posé par le livre III du code des relations entre le public et l'administration ne s'applique qu'à des documents existants et ne fait pas obligation aux autorités administratives de répondre aux demandes de renseignements qui leur sont adressées, ni d'élaborer un document nouveau en vue de procurer les renseignements ou l'information souhaités (CE, 30 janvier 1995, Ministre d'État, Ministre de l’éducation nationale, n° 128797 ; CE, 22 mai 1995, Association de défense des animaux victimes d'ignominie ou de désaffection, n° 152393). Elle relève toutefois que le régime particulier prévu par le chapitre IV du titre II du livre Ier du code de l’environnement porte, à la différence du régime général d'accès aux documents administratifs, sur les « informations » et non uniquement sur les documents relatifs à l’environnement. Elle en déduit que dès lors que l’administration détient de telles informations, figurant ou non sur un document existant, elles sont communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L124-3 de ce code, ce dernier n’imposant aucune exigence de formalisation préalable de l'information demandée, et qu’il appartient alors à l’administration, saisie d’une demande en ce sens, d’élaborer un document comportant les informations sollicitées. La commission émet par suite un avis favorable à la demande de communication du plan de contrôle eau et nature 2023 et du bilan de ce plan pour l’année 2022, sous réserve de l'occultation préalable des éventuelles mentions relevant d'un secret protégé, dans les conditions qui viennent d'être rappelées, selon la catégorie d'informations environnementales concernée.