Avis 20233531 Séance du 20/07/2023

Monsieur X, pour X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 22 mai 2023, à la suite du refus opposé par le président de CCI FRANCE à sa demande de publication en ligne en open data dans leur intégralité sur la plateforme data.gouv.fr des données du « fichier des professionnels de l'immobilier » géré par l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie ‐ CCI France, constitué dans le cadre de la loi Hoguet, celles-ci étant accessibles uniquement via un moteur de recherche. En premier lieu, après avoir pris connaissance de la réponse du président de CCI France, la commission rappelle qu’en vertu de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration : « Sont considérés comme documents administratifs, au sens des titres Ier, III et IV du présent livre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission (...) ». La commission observe qu'en application de l'article L711-5 du code de commerce, CCI France est l'établissement public, placé à la tête du réseau des chambres de commerce et d'industrie défini à l'article L710-1, habilité à représenter auprès de l'Etat et de l'Union européenne ainsi qu'au plan international les intérêts nationaux de l'industrie, du commerce et des services. A ce titre, cet établissement public assure l'animation de l'ensemble du réseau des chambres de commerce et d'industrie et, notamment, élabore la stratégie nationale du réseau des chambres de commerce et d'industrie, adopte les normes d'intervention pour les établissements membres du réseau et s'assure du respect de ces normes, développe une offre nationale de services mise en œuvre, éventuellement avec des adaptations locales, par chaque chambre de commerce et d'industrie de région et gère les projets de portée nationale intéressant le réseau. En vertu des articles 1er à 3 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, les activités d’achat, de vente et de location d’immeubles ou de fonds de commerce ainsi que les activités de gestion immobilière portant sur les biens d’autrui ne peuvent être exercées que par des personnes physiques titulaires d’une carte professionnelle délivrée par le président de la chambre de commerce d’industrie territoriale ou de région. L’établissement public CCI France est chargé d’établir et de tenir à jour un fichier des personnes titulaires de cette carte professionnelle, qui prend la forme d’un fichier automatisé régi par le décret n° 2015-703 du 19 juin 2015 relatif au fichier automatisé des personnes titulaires de la carte professionnelle délivrée pour l'exercice de transactions et d'opérations de gestion immobilière portant sur les immeubles et les fonds de commerce. L'article 2 de ce décret prévoit que, pour chaque titulaire de la carte professionnelle, sont enregistrées les données à caractère personnel et informations suivantes : 1° Lorsque le titulaire est une personne physique : - son identité, date et lieu de naissance et nationalité ; 2° Lorsque le titulaire est une personne morale : a) S'agissant de ses représentants légaux ou statutaires : - leur identité, date et lieu de naissance et nationalité ; b) S'agissant de la personne morale : - sa dénomination, sa forme sociale et l'adresse de son siège ; 3° Dans tous les cas : a) L'identité du président de la chambre de commerce et d'industrie territoriale ou départementale qui a délivré la carte ; b) Le numéro et la date de fin de validité de la carte professionnelle ; c) Le numéro unique d'identification de l'entreprise ; d) S'il en est utilisé, le nom commercial et l'enseigne ; e) S'agissant des personnes habilitées dans les conditions prévues à l'article 4 de la loi du 2 janvier 1970 susvisée et des personnes qui assument la direction des établissements secondaires, succursales, agences ou bureaux : - leur identité, date et lieu de naissance, nationalité et qualité ; f) L'adresse des établissements secondaires, succursales, agences ou bureaux ; g) Le numéro du récépissé de déclaration préalable d'activité délivré en application de l'article 8 du décret du 20 juillet 1972 susvisé ; i) Ainsi que les informations suivantes : - les activités exercées, telles que prévues à l'article 1er de la loi du 2 janvier 1970 susvisée ; - le nom de la chambre de commerce et d'industrie territoriale ou départementale qui a délivré la carte ; - le nom et l'adresse du garant et le montant de la garantie ; - le nom et l'adresse de l'établissement de crédit ou de la société de financement dans lequel est ouvert le compte mentionné à l'article 55 du décret du 20 juillet 1972 susvisé et numéro de ce compte ; - le cas échéant, la mention de la non-détention de fonds ; - le nom et l'adresse de l'assureur de responsabilité civile et professionnelle. En vertu de l'article 4 de ce décret, les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ainsi que les magistrats, pour les besoins des enquêtes de police judiciaire, des informations judiciaires ou de l'exercice de l'action publique, peuvent obtenir communication, à leur demande, des données et des informations du traitement. Par ailleurs, en application de l'article 5 de ce décret, CCI France met en œuvre un site public qui donne accès librement et à titre gratuit aux données à caractère personnel et informations contenues dans le fichier, à l'exception de celles relatives à la date et au lieu de naissance, à la nationalité des personnes mentionnées à l'article 2 et aux décisions d'interdiction temporaire ou définitive d'exercer. La commission estime, d'une part, qu’il résulte des dispositions précitées que le fichier des professionnels titulaires d'une carte professionnelle est détenu par l’établissement public CCI France dans le cadre de l’accomplissement de ses missions de service public. Elle en déduit que ce fichier est un document administratif, au sens et pour l'application des dispositions du titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration Elle estime, d'autre part, que les dispositions de l’article 5 du décret du 19 juin 2015 prévoyant la mise à disposition du public, en ligne, de certaines informations de ce fichier ne font pas obstacle à ce que l’accès à ce document, et la réutilisation des informations publiques qu’il contient, soient régis par les dispositions générales du livre III du code des relations entre le public et l'administration. En deuxième lieu, la commission comprend que la demande de Monsieur X porte sur la publication en ligne des mentions du fichier dont l’article 5 du décret du 19 juin 2015 prévoit qu’elles doivent être accessibles librement et gratuitement au public. La commission souligne à cet égard qu'en application de l’article L311-2 du code des relations entre le public et l'administration, le droit de communication ne s’exerce plus lorsque les documents font l’objet d’une diffusion publique. Elle rappelle sa doctrine constante selon laquelle il résulte de ces dispositions que seule une mise en ligne, par l'administration ou sous son contrôle, et dans des conditions permettant d'en garantir la pérennité, d'un document administratif dans un standard ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé dès lors qu'elle en dispose déjà ou qu'elle est susceptible d'en disposer à l'issue d'une opération de transfert, de conversion ou de reproduction courante, peut être regardée comme une diffusion publique (avis n° 20191393 du 17 octobre 2019 ; CE, 27 septembre 2022, n° 450737 et 450739). En l'espèce, la commission relève que si certaines des données correspondant à la demande de Monsieur X sont accessibles à l’adresse https://www.cci.fr/ressources/formalites-en-ligne/fichier-des-professionnels-de-limmobilier, elle estime, en l’état des informations dont elle dispose, que cette mise en ligne ne saurait être regardée comme une diffusion publique de ces données, dès lors que celles-ci sont uniquement accessibles via un moteur de recherche permettant à l’internaute d’interroger une base de données à partir de certains champs de recherche et qu’elles ne sont pas diffusées selon un standard ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé. La commission rappelle en troisième lieu, d’une part, qu’aux termes de l’article L311-9 du code des relations entre le public et l'administration, l'accès aux documents administratifs s'exerce, au choix du demandeur et dans la limite des possibilités techniques de l'administration, notamment par publication des informations en ligne, à moins que les documents ne soient communicables qu'à l'intéressé en application de l'article L311-6 et, d’autre part, qu’en application des dispositions de l’article L312-1-1 du même code, sous réserve des articles L311-5 et L311-6 et lorsque ces documents sont disponibles sous forme électronique, les administrations mentionnées au premier alinéa de l'article L300-2, à l'exception des personnes morales dont le nombre d'agents ou de salariés est inférieur à un seuil fixé par décret, publient en ligne les bases de données, mises à jour de façon régulière, qu'elles produisent ou qu'elles reçoivent et qui ne font pas l'objet d'une diffusion publique par ailleurs ainsi que les données, mises à jour de façon régulière, dont la publication présente un intérêt économique, social, sanitaire ou environnemental. La commission précise également qu’aux termes de l'article L312-1-2 du code des relations entre le public et l'administration, « Sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires, lorsque les documents et données mentionnés aux articles L312-1 ou L312-1-1 comportent des mentions entrant dans le champ d'application des articles L311-5 ou L311-6, ils ne peuvent être rendus publics qu'après avoir fait l'objet d'un traitement permettant d'occulter ces mentions. / Sauf dispositions législatives contraires ou si les personnes intéressées ont donné leur accord, lorsque les documents et les données mentionnés aux articles L312-1 ou L312-1-1 comportent des données à caractère personnel, ils ne peuvent être rendus publics qu'après avoir fait l'objet d'un traitement permettant de rendre impossible l'identification de ces personnes. Une liste des catégories de documents pouvant être rendus publics sans avoir fait l'objet du traitement susmentionné est fixée par décret pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ». Aux termes de l'article D312-1-3 du même code : « Les documents et informations mentionnés aux articles L312-1 ou L312-1-1 et qui sont communicables ou accessibles à toute personne, sous réserve des articles L311-5 et L311-6 et d'autres dispositions législatives ou réglementaires en vigueur, peuvent être rendus publics sans avoir fait l'objet du traitement prévu au deuxième alinéa de l'article L312-1-2, lorsqu'ils relèvent de l'une des catégories suivantes : (...) 3° Les documents nécessaires à l'information du public relatifs aux conditions d'organisation et d'exercice des professions réglementées et des activités professionnelles soumises à la réglementation, notamment celles relatives à l'exercice des professions de notaire, avocat, huissier de justice (...) ». En l’espèce, la commission estime que les mentions dont l’article 5 du décret du 19 juin 2015 prévoit qu’elles doivent être rendues accessibles sur un site internet, et dont sont expressément exclues les informations relatives à la date et au lieu de naissance ainsi qu'à la nationalité des personnes, constituent des informations nécessaires à l’information du public quant à l’exercice d’activités professionnelles réglementées. La commission en déduit qu'il peut être procédé à la publication du fichier dont s'agit dès lors que son contenu respecte les secrets protégés par les articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l’administration et que le 3° de l’article D312-1-3 autorise sa publication sans traitement préalable permettant de rendre impossible l’identification des personnes concernées. La commission émet, en conséquence, un avis favorable à la mise en ligne, dans un format ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé, des informations contenues dans le fichier des professionnels de l'immobilier, actuellement uniquement consultables par l’intermédiaire d’un moteur de recherche sur le site de CCI France, dans la limite des informations accessibles au public en application de l'article 5 du décret du 19 juin 2015.