Avis 20233449 Séance du 06/07/2023
Madame X a saisi la Commission d’accès aux documents administratifs, par un courrier enregistré à son secrétariat le 7 juin 2023, à la suite du refus opposé par la directrice générale de l'association départementale pour la sauvegarde de l'enfance d'Indre-et-Loire à sa demande de communication d'une copie des rapports des actions éducatives concernant le dossier X-X et les enfants X X et X X.
La commission considère que le caractère communicable des pièces qui composent le dossier d’aide sociale à l’enfance dépend de l’état de la procédure et de l’objet en vue duquel elles ont été élaborées :
- l’ensemble des pièces qui composent ce dossier avant que le juge des enfants soit saisi ou que le procureur de la République soit avisé, revêtent un caractère administratif. Il en va ainsi, en particulier, des documents relatifs au placement administratif du mineur ;
- lorsque le juge des enfants a été saisi ou que le procureur de la République a été avisé en application des articles L226-4 du code de l’action sociale et des familles et de l’article 375-5 du code civil, les documents élaborés dans le cadre de la procédure ainsi ouverte, y compris le courrier de saisine ou d’information et la décision du juge des enfants ou du procureur de la République, constituent des documents judiciaires exclus du champ d’application du livre III du code des relations entre le public et l’administration. La commission n’est pas compétente pour se prononcer sur leur caractère communicable ;
- en cas de placement judiciaire du mineur, les documents établis par le juge, qu’il s’agisse de ses décisions (renouvellement du placement, modifications des mesures d’assistance éducative…) ou de courriers qu’il adresse aux services d’aide sociale à l’enfance, ainsi que ceux qui ont été élaborés à l’attention de ce dernier par l’administration, dans le cadre du mandat judiciaire qui lui a été confié, revêtent un caractère judiciaire. Il en va ainsi, en particulier, des rapports périodiques sur la situation et l’évolution du mineur obligatoirement adressés au juge des enfants en vertu de l’article 1199-1 du code de procédure civile et du dernier alinéa de l’article 375 du code civil. Il n’appartient qu’au juge de procéder à la communication de tels documents s’il l’estime opportun.
En revanche, les autres documents élaborés par les autorités administratives (en particulier les services d’aide sociale à l’enfance) dans le cadre du placement judiciaire du mineur revêtent un caractère administratif et le conservent alors même qu’ils auraient été transmis au juge pour information. Il en va ainsi des correspondances entre les services intéressés, des rapports et notes établis pour les besoins de l’administration, des pièces retraçant les échanges entre le président du conseil départemental et les parents du mineur ou les accueillants familiaux.
S’agissant spécifiquement de la compatibilité des dispositions du livre III des relations entre le public et l’administration avec celles plus restrictives de l'article 1187 du code de procédure civile, invoquées par l'association, la commission note que ces dernières prévoient que, dès l'avis d'ouverture de la procédure jusqu'à la veille de l'audition ou de l'audience, le dossier peut uniquement être consulté au greffe, par les parents, le tuteur, la personne ou le représentant du service à qui l'enfant a été confié et par le mineur capable de discernement, ou par les avocats de ces personnes, et que seuls les avocats peuvent se faire délivrer copie de tout ou partie des pièces du dossier pour l'usage exclusif de la procédure d'assistance éducative. Cette disposition leur interdit par ailleurs de transmettre les copies ainsi obtenues ou la reproduction de ces pièces à leur client. Par décision motivée, le juge peut enfin, en l'absence d'avocat, exclure tout ou partie des pièces de la consultation par l'un ou l'autre des parents, le tuteur, la personne ou le représentant du service à qui l'enfant a été confié ou le mineur lorsque cette consultation ferait courir un danger physique ou moral grave au mineur, à une partie ou à un tiers.
La commission relève toutefois que les dispositions de l'article 1187 du code de procédure civile n'ont vocation qu'à régir les conditions de communication des dossiers détenus par le juge des enfants, lesquels ne sont pas uniquement constitués des documents qui leur sont fournis par les services départementaux de la protection de l'enfance, mais qui peuvent comporter également d'autres pièces émanant d'autres personnes ou autorités.
En l’espèce, la commission comprend que les documents sollicités ont été élaborés dans le cadre du mandat judiciaire confié à l’association défenderesse. Si tel est en effet le cas, elle ne peut que se déclarer incompétente pour se prononcer sur la demande, qui porte sur des documents judiciaires.