Avis 20233008 Séance du 22/06/2023

Madame X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 17 mai 2023, à la suite du refus opposé par le président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine à sa demande de communication de l'entier dossier relatif à l'information préoccupante déposée par Monsieur X, relatif à son fils X, notamment la lettre de saisine qu'il a rédigée au procureur de la République. En l'absence de réponse du président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine à la date de sa séance, la commission, rappelle que les documents élaborés par les services de l'aide sociale à l'enfance avant l'ouverture éventuelle d'une procédure judiciaire ou juridictionnelle, et sans être établis en vue de celle-ci, qu'ils aient ou non été ensuite transmis à l'autorité judiciaire, constituent des documents administratifs, communicables dans les conditions et sous les réserves prévues par le livre III du code des relations entre le public et l'administration. Il en va ainsi des correspondances entre les services intéressés, des rapports et notes établis pour les besoins de l’administration, des pièces retraçant les échanges entre le président du conseil départemental et les parents du mineur ou les accueillants familiaux (avis n° 20152463 du 10 septembre 2015). Revenant sur ses avis antérieurs, elle précise que revêtent également un caractère administratif, les rapports d'évaluation sociale établis par les services de l'aide sociale à l'enfance en dehors de toute sollicitation de l'autorité judiciaire, y compris lorsque les services préconisent, en application des dispositions de l'article L226-4 du code de l'action sociale et des familles (CASF), la transmission du dossier au procureur de la République en vue de la saisine du juge des enfants. La commission estime, en effet, que ces rapports ont été élaborés par l'administration dans le cadre de ses missions de service public définies par le CASF et qu'ils n'ont pas été élaborés, à la différence du courrier de transmission lui-même, en vue de la saisine de l'autorité judiciaire, cette transmission résultant d'une obligation légale prévue par l'article L226-4 du CASF lorsque certaines circonstances sont réunies, lesquelles sont révélées par la mission administrative d'évaluation confiée au service de l'aide sociale à l'enfance. Ainsi, la commission considère que les rapports établis pour les besoins de l’administration sont en principe communicables à la personne directement concernée, ou, lorsqu'il s'agit d'un mineur, à ses représentants légaux, sous réserve, en application des articles L311-6 et L311-7 du code des relations entre le public et l'administration, de la disjonction des pièces ou de l'occultation des mentions dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée d'autres personnes ou au secret médical, ou portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable, ou faisant apparaître le comportement d'une personne, autre qu'une personne chargée d'une mission de service public, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice. La commission estime que l'identification de l'auteur d'un signalement fait apparaître de la part de celui-ci, lorsqu'il ne s'agit pas d'un agent d'une autorité administrative, agissant dans l'exercice de sa compétence, un comportement dont la divulgation pourrait porter préjudice à son auteur. La communication d'un signalement à l'un des parents de l'enfant n'est donc permise par le code des relations entre le public et l'administration que dans le cas où aucune des mentions qu'il comporte n'est susceptible de permettre d'en identifier l'auteur, s'il ne s'agit pas d'un agent d'une autorité administrative agissant dans le cadre de sa mission de service public, et ne met pas en cause la vie privée ou le comportement d'un tiers, y compris l'autre parent. En outre, les documents qui concernent directement, à un titre ou un autre, un enfant mineur ne sont pas communicables à une autre personne, même si celle-ci en assure la représentation légale, lorsque s'y oppose l'intérêt supérieur de l'enfant, protégé par l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant (cf avis CADA n° 20152463 du 10 septembre 2015). C'est au vu des circonstances propres à chaque situation qu'il convient d'apprécier l'intérêt supérieur de l'enfant. Il s'oppose le plus souvent à la communication à ses parents des documents faisant apparaître qu'il les met gravement en cause. La commission rappelle enfin qu'un document préparatoire est exclu du droit d'accès prévu par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration aussi longtemps que la décision administrative qu'il prépare n'est pas intervenue ou que l'administration n'y a pas manifestement renoncé, à l'expiration d'un délai raisonnable. La commission observe au vu de la demande adressée à la commission par Madame X que le père de son fils a saisi par courrier, en août 2022, le procureur de la République. Ce document ayant été produit pour les besoins d'une procédure juridictionnelle, il présente, par suite, un caractère juridictionnel et la commission ne peut que se déclarer incompétente pour se prononcer sur la communication de ce document, en dépit de la circonstance, à la supposer établie, que le tribunal judiciaire se serait dessaisi au profit du centre départemental d’action social (CDAS) d’Ille-et-Vilaine. S’agissant des autres documents sollicités, la commission estime qu’ils sont communicables à l’intéressée, sous les réserves qui précèdent, et dans la mesure où la décision administrative est intervenue.