Avis 20232107 Séance du 01/06/2023
Maître X, conseil de Monsieur et Madame X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 30 mars 2023, à la suite du refus opposé par le maire de Saint-Florentin à sa demande de communication des documents suivants relatifs à la démolition de la propriété du maire sise X :
1) le marché de travaux ;
2) les préconisations du bureau d'étude qui est intervenu ;
3) les rapports des entreprises intervenues notamment dans le cadre des risques d'effondrement et des effondrements intervenus ;
4) les documents relatifs aux modalités de démolition ;
5) les comptes rendus de chantier ;
6) les pièces relatives aux arrêtés de mise en conformité (requêtes au tribunal administratif, pièces jointes aux requêtes, éléments de la procédure devant le tribunal judiciaire en vue d'obtenir l'autorisation de démolir l'immeuble voisin de la SCI X).
En l’absence de réponse du maire de Saint-Florentin à la date de sa séance, la commission rappelle, en premier lieu, qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s'y rapportent sont considérés comme des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par les articles L300-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration.
Ce droit de communication doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte en effet de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, "Centre hospitalier de Perpignan" (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières…).
En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité concurrentiel et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers.
En outre, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants :
- les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ;
- dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises.
En application de ces principes, la commission estime que les documents sollicités au point 1) de la demande sont communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve de l'occultation des mentions protégées par le secret des affaires, dans les conditions précédemment rappelées.
En second lieu, la commission rappelle que les documents remis par l’attributaire d’un marché public dans le cadre de l’exécution du contrat sont des documents administratifs communicables au sens des articles L300-2 et L311-1 du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve qu'ils aient été remis à leur commanditaire et qu'ils ne revêtent plus un caractère préparatoire, et sous réserve des secrets protégés en application des articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l'administration.
Elle émet donc un avis favorable aux points 2) à 4) de la demande sous ces réserves et sous réserve que les documents existent.
La commission considère, en troisième lieu, que les comptes rendus des réunions de chantier, qui retracent l'exécution des projets, sont communicables à tout demandeur, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration. Elle émet donc un avis favorable sur le point 5).
En quatrième et dernier lieu, s'agissant du point 6), la commission rappelle que les documents produits ou reçus dans le cadre et pour les besoins d’une procédure juridictionnelle, qu'elle soit de nature civile, pénale ou commerciale, ne présentent pas un caractère administratif et n'entrent donc pas dans le champ d'application du livre III du code des relations entre le public et l’administration. Il en va ainsi, notamment des jugements, ordonnances, décisions ou arrêts rendus par les juridictions de l'ordre judiciaire ou administratif. C'est aussi le cas, plus largement, pour les dossiers de demande d'aide judiciaire (CE, 5 juin 1991, n° 102627, aux T. p. 948), des décisions du parquet, des dossiers d'instruction, des procès-verbaux d'audition, des rapports d'expertise ou des mémoires et observations des parties - c'est à dire de l'ensemble des pièces de procédure proprement dites - mais aussi des documents de travail internes à une juridiction, destinés à leurs membres et concourant à l'instruction des affaires ou à la formation des jugements (CE, 9 mars 1983, SOS Défense et CE, 28 avril 1993, n° 117480, T. p. 782). En l’espèce, la commission constate que les documents cités au point 6) revêtent un caractère juridictionnel. Par suite, Elle se déclare donc incompétente pour se prononcer sur ce point.