Avis 20232069 Séance du 11/05/2023
Maître X, conseil de la société X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 5 avril 2023, à la suite du refus opposé par la maire de Paris à sa demande de copie, par courrier électronique, des documents suivants concernant l'appel à projets « Réinventer Paris 2 » pour laquelle sa cliente est co-lauréate aux côtés de X et de la X, pour l’exploitation du projet OASIS Montparnasse, sur le site de l’ancien Musée de la Libération (15e arrondissement) :
I) s'agissant des manifestations d’intérêt remises le 15 novembre 2017 pour le site du « Musée de la Libération », les documents ci-après prévus par l’article B.4.1. du règlement de l’appel à projets « Réinventer Paris » :
1) l'analyse technique de la manifestation d’intérêt du groupement X – X, pour le site du « Musée de la Libération », avec l’appréciation pour chaque critère de sélection défini à l’art. B.3 du règlement de l’appel à projets ;
2) les remarques du comité de sélection mis en place pour le site du « Musée de la Libération », sur cette même manifestation d’intérêt ;
3) le classement du 14 février 2018 du comité de sélection du site du « Musée de la Libération », sur la manifestation d’intérêt remise par le groupement X – X, avec le détail de la notation attribuée pour chaque critère de sélection ;
4) les orientations générales définies par les autres candidats dans leur manifestation d’intérêt, pour ce même site ;
II) s'agissant des documents concernant les offres remises le 11 juillet 2018 pour le site du « Musée de la Libération », prévus par l’article 2.10 de l’additif n° 2 au règlement de l’appel à projets « Réinventer Paris » :
1) l'analyse technique de l’offre remise par le groupement X – X pour le site du « Musée de la Libération », avec l’appréciation pour chaque critère de sélection défini à l’article B.3 du règlement de l’appel à projets, et le détail de la notation et du classement proposé ;
2) l'analyse et le classement de l’offre du groupement X – X, proposés par le Jury, avec l’appréciation pour chaque critère de sélection défini à l’article B.3 du règlement de l’appel à projets, et le détail de la notation et du classement proposé ;
3) les orientations générales définies par les autres candidats dans leur offre, pour ce même site ;
III) tous les documents remis par le groupement X – X entre le 11 juillet 2018 et les délibérations du 8 au 11 juillet 2019, au titre de l’appel à projets, notamment mais pas exclusivement, les documents mentionnés dans l'exposé des motifs de la délibération 2019 DU 153 :
a) les documents de levée des réserves formulées par le jury et ;
b) l'offre définitive d’acquisition de volumes nécessaires à son projet au prix global minimum de 7 000 000 € net vendeur, remise par le groupement lauréat X‐X, dont sa cliente était membre ;
IV) tous les documents remis par le groupement X – X, au titre de l’appel à projets « Réinventer Paris », pour le site du Musée de la Libération, entre le 11 juillet 2018 et les délibérations du 8 au 11 juillet 2019 ;
V) s'agissant de la substitution de la SCI X au profit de la SAS X, de la promesse de vente portant sur l’immeuble du projet OASIS signée le 7 février 2020, l'accord de la ville de Paris par lettre du 25 février 2022, la confirmation par courriel de son notaire du 10 juin 2022, l'accord de SNCF Gares & Connexions par lettre du 2 juin 2022, ainsi que le dossier de substitution fourni à cet effet, prévu à l’article 3.1 de l’additif au règlement de l’appel à projets.
1. En l’absence de réponse exprimée par la maire de Paris à la date de sa séance, la commission relève que l’appel à projets n’est pas une procédure formalisée définie et encadrée par le législateur ou le pouvoir réglementaire à l’instar des contrats de la commande publique mais une procédure de consultation préparatoire définie par la collectivité publique dans le but de sélectionner différents projets préalablement à la vente d'un bien immobilier, à la conclusion d'une convention de subventionnement ou à l’attribution d'une aide publique.
Elle estime que les documents se rapportant à une procédure d’appel à projets que la ville de Paris peut décider d’organiser, alors même qu’elle n’y serait pas légalement tenue, constituent des documents administratifs soumis au droit d’accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. Elle rappelle également que la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique a ajouté un article L300-3 au code des relations entre le public et l'administration en vertu duquel les administrations visées sont désormais tenues de communiquer les documents relatifs à la gestion de leur domaine privé, et la commission est compétente pour se prononcer sur d'éventuels refus de communication concernant ces documents.
2. La commission rappelle que les documents préparatoires à une décision administrative sont en principe exclus provisoirement du droit à la communication aussi longtemps que cette décision n’est pas intervenue ou que l'administration n'y a pas manifestement renoncé, à l'expiration d'un délai raisonnable. Toutefois, lorsqu’un projet comporte des phases distinctes donnant lieu à l'édiction de plusieurs décisions successives, il importe d’identifier la nature des pièces dont le caractère préparatoire est levé par l’intervention de chacune de ces décisions
La commission rappelle également sa position constante selon laquelle (conseil n° 20120845 du 8 mars 2012, avis n° 20160147 du 3 mars 2016) le droit de communication, dont bénéficient tant les candidats non retenus que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s’exercer dans le respect du secret des affaires protégé par les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. Sont notamment visées par cette réserve, les mentions relatives aux moyens techniques et humains, aux rapports d’évaluation, au chiffre d’affaires, aux bilans financiers et aux coordonnées bancaires du candidat. Lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents administratifs, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
Elle précise à cet égard que, dans le cas d’un appel à projets tel que celui d’espèce, devant déboucher notamment sur la conclusion d’un contrat de vente d’un bien immobilier, seules les orientations générales définies par les candidats, qu’ils soient ou non retenus, dans leurs offres sont communicables (avis de partie II n° 20224903 du 13 octobre 2022). Elle ajoute que les notes et classements des candidats non retenus ne sont communicables qu'à ceux-ci, chacun en ce qui le concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations du lauréat de l’appel à projets sont librement communicables.
En l'espèce, la commission observe que la demande de communication émane d'une société membre du groupement ayant remporté l'appel à projets « Réinventer Paris - Musée de la Libération ».
Elle estime dès lors que les documents sollicités qui portent sur l'offre du groupement auquel elle appartient, lui sont communicables, en application de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, à savoir ceux visés aux 1), 2) et 3) du I), 1) et 2) du II), a) du III), IV) et au V), sans que le secret des affaires ne puisse lui être opposé dès lors que les documents demandés portent sur l'offre du groupement lui-même auquel elle appartient et donc sur l'engagement de cette société. La commission réserve toutefois l'hypothèse de documents ou mentions ayant trait ou mettant en cause, non pas le groupement, mais un autre membre de celui-ci et relevant du secret de ses affaires, qui ne seraient alors pas communicables à la demanderesse.
La commission estime également, compte tenu des principes susmentionnés, que les orientations générales visées aux 4) du I) et 3) du II) lui sont communicables en application de l'article L311-1 du même code. Elle estime aussi que les documents relatifs à la cession du bien immobilier, soit le b) du III) et certains documents visés au V), lui sont communicables, en application de l'article L300-3 du même code, ainsi que les délibérations visées au IV) en application de l'article L2121-26 du code général des collectivités territoriales.
La commission ajoute que de tels documents sont communicables dans ces conditions, sous réserve cependant que l'acte de vente finalisant cette consultation ait été conclu, à l'exception néanmoins des délibérations visées au IV) qui sont immédiatement communicables.
Elle émet donc, sous ces réserves, un avis favorable.