Avis 20231926 Séance du 20/04/2023
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 23 mars 2023, à la suite du refus opposé par la maire de Merten à sa demande de communication des documents suivants, pour la période comprise entre le 1er septembre 2021 et le 31 janvier 2023 :
1) les factures anonymisées émises vers les parents pour l'utilisation du service périscolaire ;
2) les factures anonymisées du prestataire pour les repas de la cantine ;
3) les fiches de paie des personnes intervenant dans l'accueil périscolaire : directrice, animatrice, accompagnatrice pour les repas, personnel de ménage ;
4) toutes les factures d'électricité dont celles de régularisation des mensualisations ;
5) le détail du calcul des répartitions des charges du périscolaire avec les autres communes du regroupement pédagogique intercommunal concentré (RPIC) et les facturations correspondantes pour l'année, ou toute autre forme comptable que ce paiement peut prendre pour la période.
S'agissant de la demande mentionnée au point 3), la commission rappelle que si la vie privée des fonctionnaires et agents publics doit bénéficier de la même protection que celle des autres citoyens, les fonctions et le statut de ces personnels justifient que certaines informations les concernant puissent être communiquées sur le fondement du livre III du code des relations entre le public et l'administration. La commission estime cependant que si les administrés doivent pouvoir accéder à certains renseignements concernant la qualité de leur interlocuteur, la protection, par l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, de la vie privée, impose que ces aménagements soient limités à ce qui est strictement nécessaire à leur information légitime.
En application de ces principes, la commission estime que les composantes fixes de la rémunération (notamment grade et échelon, indice de traitement, nouvelle bonification indiciaire (NBI), indemnités de sujétion) figurant sur les bulletins de salaire sont en principe communicables à toute personne qui en fait la demande. Doivent en revanche être occultés, en application des articles L311-6 et L311-7 du code des relations entre le public et l’administration, les éléments y figurant qui seraient liés, soit à la situation familiale et personnelle de l'agent en cause (supplément familial), soit à l'appréciation ou au jugement de valeur porté sur sa manière de servir (primes pour travaux supplémentaires, primes de rendement) ou encore aux horaires de travail, indemnités et heures supplémentaires. Il en serait de même, dans le cas où la rémunération comporterait une part variable, du montant total des primes versées ou du montant total de la rémunération, dès lors que ces données, combinées avec les composantes fixes, communicables, de cette rémunération, permettraient de déduire le sens de l'appréciation ou du jugement de valeur porté sur l'agent. En outre, dans le cas où le montant total de la rémunération doit être occulté, les rubriques de paie qui permettraient, par une opération simple, de reconstituer ce montant, telles que les montants de cotisations sociales ou les cumuls de paie, doivent également faire l'objet d'une occultation. Les mentions intéressant la vie privée des agents (date de naissance, adresse personnelle, situation familiale, numéro de sécurité sociale, dates de congés, etc.) doivent également être occultées en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration.
Dans son avis de partie II, n° 20210741, du 11 février 2021, la commission a par ailleurs fait évoluer sa position en ce qui concerne le temps de travail des agents publics et fonctionnaires et considère désormais qu'en tant qu'il se rapporte à l’exercice des fonctions publiques de l’agent, le temps de travail réglementaire, c’est-à-dire celui que l’agent doit théoriquement effectuer pour s’acquitter de ses obligations indépendamment des heures effectivement réalisées, de même que la quotité de travail, ne relèvent pas par eux-mêmes de la vie privée des agents concernés. Il en est de même du point de savoir si l’agent occupe un emploi à temps complet ou incomplet et la quotité correspondante, qui constituent des caractéristiques objectives du poste, et de la situation de temps partiel, alors même qu’elle procèderait d’un choix de la part de l’agent, dès lors que cette seule information ne révèle par elle-même aucune information mettant en cause la protection de la vie privée due à l’agent eu égard à la diversité des motifs autorisant cette situation. Seuls les horaires de travail des agents publics et le motif invoqué par l’agent à l’appui d'une demande de temps partiel demeurent ainsi protégés par la protection de sa vie privée.
Enfin, s'agissant des mentions supplémentaires présentes sur le bulletin de paie des agents publics depuis l'entrée en vigueur du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu, la commission estime que la mention du taux d'imposition, qui apparaît soit comme un taux personnalisé soit comme un taux « neutre », est susceptible, d'une part, de permettre la révélation d'informations liées à la situation personnelle et familiale de l'agent concerné, notamment par le biais de croisement de ces informations avec d'autres éléments disponibles. D'autre part, le taux d'imposition constitue une information propre à la situation fiscale de l'agent qui relève du champ d'application de l'article L103 du livre des procédures fiscales, dispositions particulières dérogeant au droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration, et de la vie privée.
En application de ces principes, la commission émet, par suite, un avis favorable au point 3) de la demande sous les réserves ainsi énoncées.
S'agissant des demandes visées aux points 1), 2), 4) et 5), la commission prend acte de la décision du 8 février 2023 n° 452521 par laquelle le Conseil d’État a jugé que le droit de communication qu’instituent les dispositions de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales ne s’étend pas aux pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité qu’il appartient à l’ordonnateur et au comptable public de conserver, en vertu des dispositions de l’article 52 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (avis de partie II n° 20230165 du 9 mars 2023).
La commission en déduit que les documents sollicités sont communicables à toute personne qui en fait la demande dans les conditions prévues par le livre III du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve, le cas échéant, de l’occultation préalable des mentions qui porteraient atteinte à la protection de la vie privée ou relèveraient du secret des affaires, en application de l'article L311-6 de ce code.
La commission précise à ce titre que les factures transmises aux usagers du service périscolaire, visées au point 1), sont des documents administratifs communicables à toute personne en faisant la demande sur le fondement de ces dispositions, sous réserve de l’occultation préalable des éventuelles mentions couvertes par le secret de la vie privée des personnes physiques nommément désignées. En l'espèce, elle précise que relève notamment de ce secret, le nom et l'adresse de l'usager, ainsi que, le cas échéant, ses coordonnées bancaires.
Elle souligne également, s'agissant des factures réglées par la commune, sollicitées aux points 2) et 4), que le détail des prix (prix unitaires ou décomposition du prix forfaitaire) susceptible, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé, doit être occulté (avis n° 20221246 et n° 20221455 du 21 avril 2022). Le prix global des prestations reste, quant à lui, librement communicable. En outre, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des mentions relatives aux détails techniques de l'offre du prestataire, aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics.
La commission, qui prend acte de la volonté de la maire de Merten de publier les documents demandés sur le site internet de la commune, émet, en l'état, un avis favorable à la communication des documents sollicités aux points 1), 2), 4) et 5), sous les réserve précitées.