Avis 20231887 Séance du 11/05/2023

Madame Aurélie X, X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 29 mars 2023, à la suite du refus opposé par le maire de Mazamet à sa demande de communication d'une copie des documents suivants : 1) l'ensemble des délibérations du conseil municipal portant sur les primes et indemnités actuellement versées ; 2) le montant total annuel des primes versées et ventilé prime par prime ; 3) les arrêtés individuels octroyant une prime ou une indemnité ; 4) les bulletins de salaire anonymisés avec maintien des noms et prénoms ; 5) l'ensemble des fiches de postes à jour. La commission, qui a pris connaissance de la réponse exprimée par le maire de Mazamet, précise, à titre liminaire, qu’elle n’est pas compétente pour se prononcer sur le droit d’information que les représentants du personnel et les organisations syndicales peuvent tirer, en cette qualité, de textes particuliers. Ces derniers peuvent en revanche se prévaloir, comme tout administré, du livre III du code des relations entre le public et l'administration et des régimes particuliers énumérés aux articles L342-1 et L342-2 de ce code pour obtenir la communication de documents. En ce qui concerne les points 1) et 2), la commission rappelle qu’il résulte de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux du conseil municipal, des arrêtés municipaux, ainsi que des budgets et comptes de la commune. L’ensemble des pièces annexées à ces documents sont communicables à toute personne qui en fait la demande, selon les modalités prévues par l’article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration. La commission considère que les délibérations relatives aux primes et indemnités actuellement versées, ainsi que le montant total annuel des primes versées et ventilé prime par prime sont communicables à toute personne qui en fait la demande, sur le fondement de ces dispositions. Elle émet donc un avis favorable sur ces points. En ce qui concerne les documents mentionnés au point 3), la commission précise que le Conseil d'État a jugé dans sa décision commune de Sète du 10 mars 2010 (n° 303814), que les dispositions de l'article L2121-26 précitées, dont la portée n'est pas limitée aux arrêtés réglementaires, ne sauraient être interprétées, eu égard à leur objectif d'information du public sur la gestion locale, comme prescrivant la communication des arrêtés portant des appréciations d'ordre individuel sur les fonctionnaires de la collectivité concernée. Elle précise que si la vie privée des fonctionnaires et agents publics doit bénéficier de la même protection que celle des autres citoyens, les fonctions et le statut de ces personnels justifient que certaines informations les concernant puissent être communiquées sur le fondement du livre III du code des relations entre le public et l'administration. Il en est ainsi, notamment, de la qualité d'agent public, de l'adresse administrative et, s'agissant de la rémunération, des composantes fixes de celle-ci : grade et échelon, indice de traitement, nouvelle bonification indiciaire (NBI), indemnités de sujétion. A l’inverse, elle estime que ces aménagements devant être limités à ce qui est strictement nécessaire à l’information légitime des citoyens, ne sont pas communicables sur ce fondement, la date de naissance, l’adresse privée, la situation de famille, les éléments individualisés de la rémunération liés soit à la situation familiale et personnelle de l’agent en cause (ex : supplément familial) soit à l’appréciation ou au jugement de valeur porté sur sa manière de servir (ex : primes de résultat). Elle émet, sous ces réserves, un avis favorable à la communication des arrêtés mentionnés au point 3). La commission rappelle, par ailleurs, que le bulletin de paie ou de traitement d'un agent public constitue, en vertu des articles L300-2 et article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, un document administratif communicable à toute personne qui en fait la demande. Toutefois, préalablement à cette communication, les mentions qui porteraient atteinte à la protection de la vie privée ou comporteraient une appréciation ou un jugement sur la valeur de l'agent public en cause doivent être occultées en application des articles L311-6 et L311-7 du code des relations entre le public et l'administration. A cet égard, la communication de la rémunération résultant de l'application des règles régissant l'emploi concerné, sa communication n'est pas susceptible de révéler une appréciation ou un jugement de valeur. Il en est autrement lorsque cette rémunération est arrêtée d'un commun accord entre les parties sans référence à des règles la déterminant. Dans ce cas, la communication du contrat de travail est subordonnée à l'occultation des éléments relatifs à la rémunération, tandis que le bulletin de paie ou de traitement, « qui serait privé de toute portée sans la rémunération », ne peut être communiqué (CE, 26 mai 2014, Communauté agglomération Bayonne-Anglet-Biarritz, n° 342339). En outre, il convient, en application de l'article L311-7 du code précité, d'occulter les éléments figurant dans le bulletin, si ce dernier est communicable, qui seraient liés soit à la situation familiale et personnelle de l'agent en cause (supplément familial), soit à sa vie privée (date de naissance, adresse privée), soit à l'appréciation ou au jugement de valeur porté sur sa manière de servir (primes pour travaux supplémentaires, primes de rendement et, dans le cas où la rémunération comporterait une part variable, du montant total des primes versées ou du montant total de la rémunération), dès lors que ces données, combinées avec les composantes fixes, communicables, de cette rémunération, permettraient de déduire le sens de l'appréciation ou du jugement de valeur porté sur l'agent. La commission précise qu'elle a fait évoluer sa position, ancienne (conseils n° 20101148 du 29 mars 2010 et n° 20104024 du 14 octobre 2010), en ce qui concerne le temps de travail des agents publics et fonctionnaires et considère désormais qu'en tant qu'il se rapporte à l’exercice des fonctions publiques de l’agent, le temps de travail réglementaire, c’est-à-dire celui que l’agent doit théoriquement effectuer pour s’acquitter de ses obligations indépendamment des heures effectivement réalisées, de même que la quotité de travail, ne relèvent pas par eux-mêmes de la vie privée des agents concernés. Il en est de même du point de savoir si l’agent occupe un emploi à temps complet ou incomplet et la quotité correspondante, qui constituent des caractéristiques objectives du poste, et de la situation de temps partiel, alors même qu’elle procéderait d’un choix de la part de l’agent, dès lors que cette seule information ne révèle par elle-même aucune information mettant en cause la protection de la vie privée due à l’agent eu égard à la diversité des motifs autorisant cette situation. Seuls les horaires de travail des agents publics et le motif invoqué par l’agent à l’appui d'une demande de temps partiel demeurent ainsi protégés par la protection de sa vie privée. S'agissant des mentions supplémentaires présentes sur le bulletin de paye des agents publics depuis l'entrée en vigueur du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu, la commission estime ensuite que la mention du taux d'imposition, qui apparaît soit comme un taux personnalisé soit comme un taux « neutre », est susceptible, d'une part, de permettre la révélation d'informations liées à la situation personnelle et familiale de l'agent concerné, notamment par le biais de croisement de ces informations avec d'autres éléments disponibles. D'autre part, le taux d'imposition constitue une information propre à la situation fiscale de l'agent qui relève du champ d'application de l'article L103 du livre des procédures fiscales, dispositions particulières dérogeant au droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration, et de la vie privée. En conséquence, la commission considère que la mention du taux doit faire l'objet d'une occultation en application du 1° de l'article L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration. La commission considère qu'il en va de même pour les mentions, qui ne sont que la conséquence arithmétique de l'application de ce taux, du montant qui aurait été versé au salarié en l'absence de retenue à la source, du montant de l'impôt prélevé et du montant net à payer. En l’espèce, la commission estime que les bulletins de salaire mentionnés au point 4), sont, sous ces réserves, communicables à toute personne qui en fait la demande, après occultation des mentions protégées par le secret de la vie privée conformément aux principes qui viennent d’être rappelés. Elle émet donc un avis favorable sur ce point sous les réserves mentionnées. La commission estime enfin que les documents mentionnés au point 5) sont communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration. Elle émet donc un avis favorable sur ce point.