Avis 20231438 Séance du 20/04/2023

Maître X, conseil de la SARL X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 14 mars 2023, à la suite du refus opposé par le maire d'Ondres à sa demande de copie, de préférence au format électronique, des documents suivants : 1) l’ensemble des documents transmis aux conseillers municipaux pour leur permettre de voter en connaissance de cause la délibération n° 2022‐07‐01 du 7 juillet 2022 portant résiliation du contrat de concession dont sa cliente est titulaire ; 2) l’ensemble des documents transmis aux conseillers municipaux pour leur permettre de voter en connaissance de cause la délibération n° 2022‐11‐01 du 3 novembre 2022 portant création de la régie « camping municipal d’Ondres » ; 3) le marché public conclu avec la société X évoqué dans la délibération du 7 juillet 2022 et les livrables et leurs annexes remis par cette société à la commune, notamment ceux estimant la valeur nette comptable (VNC) des biens de retour de la concession dont sa cliente est titulaire outre son manque à gagner sur les années de contrat restant à courir ; 4) le powerpoint utilisé dans le cadre de la réunion publique du 16 janvier 2023 relative au camping municipal ; 5) l’intégralité des mandats de paiement émis par la commune à destination des cabinets X entre le 1er janvier 2021 et le 8 février 2023 ; 6) les comptes rendus ou procès-verbaux de réunions intervenues à la mairie au sujet de la création d’une SCOP destinée à reprendre le camping municipal ; 7) les comptes rendus ou procès-verbaux de réunions intervenues avec les salariés de la SARL X en préparation de la reprise de leurs contrats par la mairie ; 8) les comptes rendus ou procès-verbaux des réunions de la commission municipale « développement économique‐tourisme » intervenues entre le 1er janvier 2021 et le 8 février 2023 et relatives, même partiellement, au camping municipal ; 9) les comptes rendus des réunions intervenues avec les potentiels repreneurs du camping municipal, évoquées lors du conseil municipal du 7 juillet ayant abouti à l’adoption de la délibération n° 2022‐07‐01, ainsi que les déclarations d’intérêt / candidature reçues par la mairie pour la reprise du camping ; 10) le business plan de la régie municipale de camping avec sa date de création ; 11) le marché public conclu avec la société X, présente lors de la réunion concernant les installations électriques et réseaux du camping intervenue le 13 décembre 2022 au camping, et tous les livrables remis par cette société à la commune, notamment le compte rendu de cette réunion ; 12) les échanges intervenus avec les fournisseurs et partenaires de la SARL X listés dans le document joint, ainsi qu’avec les crédits bailleurs X et X relativement à la reprise des contrats dont est titulaire la SARL X ; 13) la police d’assurance n° X de la X, mentionnée à l’article 2.5 du contrat de concession dont sa cliente est titulaire. En premier lieu, en réponse à la demande d’observations qui lui a été adressée, le maire d'Ondres a informé la commission que les documents sollicités aux points 6) et 7), ainsi que les comptes rendus de réunions visés au point 9), n'existent pas, aucune des réunions visées n'étant intervenues. La commission ne peut, dès lors, que déclarer sans objet la demande d'avis sur ces points, dans cette mesure, comme portant sur des documents inexistants. En second lieu, la commission rappelle qu'il résulte de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales (CGCT) que : « Toute personne physique ou morale a le droit de demander communication des procès-verbaux du conseil municipal, des budgets et des comptes de la commune et des arrêtés municipaux ». L’ensemble des pièces annexées à ces documents sont communicables à toute personne qui en fait la demande, selon les modalités prévues par le livre III du code des relations entre le public et l'administration. La commission précise toutefois que si l'article L2121-26 du CGCT a institué un régime spécifique d'accès aux documents des communes, distinct du régime général d'accès aux documents administratifs organisé par les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, et si les exceptions au droit d'accès prévues à l'article L311-6 de ce code ne sont pas opposables à une demande présentée sur le fondement de ces dispositions spéciales, l'exercice de ce droit d'accès particulier ne saurait faire obstacle, par principe, à la protection de secrets protégés par la loi sur d'autres fondements, tels que le secret de la vie privée (CE 10 mars 2010, n° 303814, commune de Sète ; conseil n° 20121509 du 19 avril 2012 et conseil n° 20123242 du 27 septembre 2012), le secret médical (conseil n° 20122788 du 26 juillet 2012), le secret des correspondances échangées entre le client et son avocat (avis n° 20111095 du 14 avril 2011), ou le secret industriel et commercial (CE, 17 mars 2022, n° 449620). La commission estime, par suite, que les documents visés aux points 1) et 2) de la demande, dont elle comprend qu’ils ont été annexés aux délibérations correspondantes, sont communicables à toute personne en faisant la demande en application de l'article L2121-26 du CGCT, sous réserve de l’occultation préalable des éventuelles mentions couvertes par le secret des affaires ou de tous autres secrets protégés par la loi (CE, 27 septembre 2022, n° 452614). En réponse à la demande d’observations qui lui a été adressée, le maire d’Ondres a informé la commission que la SARL X avait déjà eu connaissance des documents sollicités au point 1), produits à l’appui du mémoire en défense de la commune contre la requête en référé-suspension introduite par l’entreprise le 23 novembre 2022. La commission, rappelle cependant les dispositions du f) du 2° de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration ne font obstacle à la communication de documents, au cours d’une procédure juridictionnelle, que dans l'hypothèse où celle-ci serait de nature à porter atteinte au déroulement de l'instruction, à retarder le jugement de l'affaire, à compliquer l'office du juge ou à empiéter sur ses compétences et prérogatives. En revanche, la seule circonstance que des documents administratifs aient été transmis au juge, ou qu’ils aient été versés au dossier d'une instance contentieuse à laquelle le demandeur est partie, selon les modalités fixées par le code de justice administrative, sur la mise en œuvre desquelles elle n'est pas compétente pour se prononcer, ne prive pas par elle-même d'objet la demande de communication présentée sur le fondement du livre III du code des relations entre le public et l'administration et ne saurait légalement justifier un refus de communication sur le fondement des dispositions précitées du code des relations entre le public et l’administration. Par ailleurs, le fait que l’exécution de la délibération du 7 juillet 2022 ait été suspendue par le juge des référés du tribunal administratif de Pau n’est pas de nature à lui ôter son caractère achevé. La commission estime, par suite que le document reste communicable sur le fondement de l'article L2121-26 du CGCT précité. Elle émet donc un avis favorable aux points 1) et 2) de la demande, sous les réserves sus-énoncées. En troisième lieu, s'agissant des points 3) et 11) de la demande, la commission rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit la commission d'appel d'offres à ne pas lui attribuer le marché ne permet pas de refuser la communication de ces documents. Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, Centre hospitalier de Perpignan (n°375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication. Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières…). En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers. La commission a précisé dans son Conseil n° 20221455 du 21 avril 2022 évoqué ci-dessus, revenant sur sa doctrine antérieure, qu’il en va aussi désormais des factures, bons de commande, états d’acompte, décomptes et autres pièces établies dans le cadre de l’exécution d’un marché public, en tant que ces documents mentionnent les prix unitaires. L'examen de l’offre d’une entreprise attributaire au regard du respect du secret des affaires conduit ainsi la commission à considérer que l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ne sont pas communicables aux tiers, sans qu’il soit besoin de s’interroger sur le mode de passation, notamment répétitif, du marché ou du contrat, sa nature, sa durée ou son mode d’exécution. L’examen de l’offre des entreprises non retenues au regard des mêmes principes conduit de même la commission à considérer que leur offre de prix globale est, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’est pas. En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants : - les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ; - dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises. La commission estime par ailleurs que les documents remis par l’attributaire d’un marché public dans le cadre de l’exécution du contrat sont librement communicables à toute personne en faisant la demande, en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve de l'occultation des éventuelles mentions protégées au titre des articles L311-5 et 6 du même code, notamment celles relevant du secret des affaires contenues dans ces livrables, et sous réserve qu’ils aient été remis à leur commanditaire qu'ils ne revêtent plus un caractère préparatoire. En application de ces principes, la commission, qui a pris connaissance de la réponse du maire d'Ondres, estime que les documents mentionnés aux points 3) et 11), ainsi que les déclarations d'intérêt visées au point 9) de la demande, sont communicables aux tiers dans les conditions et sous les réserves ainsi énoncées. Elle émet donc un avis favorable sur ces points, sous ces réserves. En quatrième lieu, après avoir pris connaissance des observations du maire d’Ondres, la commission estime que les documents mentionnés aux points 4) et 12) de la demande sont librement communicables en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration sous réserve, le cas échéant, de l'occultation préalable des mentions couvertes par le secret de la vie privée ou le secret des affaires. Elle précise que la diffusion d’un document à l’occasion d’une réunion publique ne s’apparente pas à une diffusion publique au sens de l’article L311-2 du code des relations entre le public et l'administration. Elle estime en effet qu'une diffusion publique au sens de ces dispositions requiert que le document soit aisément accessible techniquement, géographiquement et financièrement, ce qui n'est pas le cas lorsqu'un document est uniquement affiché de façon temporaire à un endroit déterminé. De la même façon, la circonstance qu'un document soit disponible sur le site internet d'une administration n'est pas de nature à le faire regarder comme ayant fait l'objet d'une diffusion publique, si cette mise en ligne ne présente pas un caractère pérenne. Elle émet, par suite, un avis favorable aux points 4) et 12) de la demande, sous réserve, s’agissant des documents visés au point 12), que ceux-ci existent. En cinquième lieu, la commission rappelle, d'une part, qu’aux termes de l’article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques : « En toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères à l'exception pour ces dernières de celles portant la mention « officielle », les notes d'entretien et, plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel ». En application de ces dispositions, le Conseil d’État (CE, ass., 27 mai 2005, n° 268565) a jugé que l'ensemble des correspondances échangées entre un avocat et son client, en l’espèce une commune, notamment les consultations juridiques rédigées par l'avocat à son intention, sont des documents administratifs couverts par le secret professionnel. Il résulte également de la jurisprudence de la Cour de cassation que le secret professionnel de l’avocat couvre la convention d'honoraires et les facturations y afférentes (Cass., Civ-1, 13 mars 2008, pourvoi n° 05-11-314). La Cour de cassation a par ailleurs précisé qu’alors même qu’il s’agit de pièces comptables, les factures d’avocat jointes à une correspondance d'avocats sont couvertes par le secret professionnel, sans qu'il y ait lieu d'opérer une distinction entre la correspondance elle-même et les pièces qui s'y trouvent jointes (Cass., Civ, 6 décembre 2016, pourvoi n° 15 14.554). La commission réaffirme, d'autre part, sa doctrine constante selon laquelle les documents comptables produits par une commune en vue du paiement des factures d’honoraires d’avocats ne peuvent être regardés comme des « correspondances échangées entre le client et son avocat », protégées par le secret professionnel. Seules les factures d’avocats, bien que constituant des pièces justificatives du paiement, sont protégées par ce secret, dès lors qu’elles constituent des correspondances échangées entre la commune et son avocat. La commission relève que devront en revanche être occultées les éventuelles mentions couvertes par le secret des affaires. Elle souligne ainsi que le détail des prix susceptible, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé, doit être occulté (avis n° 20221246 et n° 20221455 du 21 avril 2022). La commission émet donc, sous cette réserve, un avis favorable à la communication des mandats de paiement émis par la commune à destination des cabinets X entre le 1er janvier 2021 et le 8 février 2023, visés au point 5) de la demande, et prend note de l'intention manifestée par le maire d'Ondres de faire prochainement droit à cette demande. En sixième lieu, la commission rappelle que l'article L2121-22 du code général des collectivités territoriales prévoit la possibilité pour les conseils municipaux de créer en leur sein des commissions municipales destinées à améliorer le fonctionnement du conseil municipal dans le cadre de la préparation des délibérations. Elle ajoute qu'à moins qu'ils présentent un caractère préparatoire, les documents produits ou reçus par ces commissions sont des documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve, le cas échéant, de l'occultation des mentions protégées par les articles L311-5 et L311-6 du même code. Elle précise que ces documents perdent leur caractère préparatoire dès l’adoption de la délibération du conseil municipal qu’ils préparent. La commission émet donc, sous ces réserves, un avis favorable au point 8) de la demande, et prend note de l'intention manifestée par le maire d'Ondres de faire prochainement droit à cette demande. En septième lieu, s'agissant du point 10) de la demande, la commission estime que ce document administratif, s'il existe, est communicable à toute personne qui en fait la demande en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sans que la réserve relative au secret des affaires puisse être opposée dès lors qu’il s’agit, en l’espèce, d’une régie municipale. Elle émet donc un avis favorable sur ce point. Enfin, la commission rappelle qu’aux termes du dernier alinéa de l’article L311-2 du code des relations entre le public et l’administration : « L’administration n’est pas tenue de donner suite aux demandes abusives, en particulier par leur nombre ou leur caractère répétitif ou systématique ». Elle estime que le point 13) de la demande, qui vise la police d’assurance souscrite par la SARL X dans le cadre du contrat de concession de service public dont celle-ci est titulaire revêt un tel caractère. Elle émet donc un avis défavorable à la demande sur point.