Avis 20230824 Séance du 30/03/2023

Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 13 février 2023, à la suite du refus opposé par le maire de Saint Jeoire Prieuré à sa demande de communication de la liste électorale de la commune. La commission, qui a pris connaissance des observations du maire de Saint Jeoire Prieuré, rappelle qu'aux termes de l'article L37 du code électoral, dans sa rédaction issue de l'article 7 de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 : « Tout électeur peut prendre communication et obtenir copie de la liste électorale de la commune à la mairie ou des listes électorales des communes du département à la préfecture, à la condition de s'engager à ne pas en faire un usage commercial (...) ». Ainsi que l’a rappelé le Conseil d’État dans son arrêt du 2 décembre 2016 n° 388979, au recueil, ces dispositions, qui ont pour objet de concourir à la libre expression du suffrage, ouvrent au profit de tout électeur, régulièrement inscrit sur une liste électorale, le droit de prendre communication et copie de la liste électorale d’une commune. La demande doit être adressée à la mairie. Si elle porte sur plusieurs communes d'un département, elle peut l'être à la préfecture de ce département. La commission précise que la communication des listes électorales est subordonnée à la condition que le demandeur fasse la preuve de sa qualité d'électeur. La commission estime, dans le silence des textes, que la preuve de la qualité d’électeur peut se faire par tout moyen, sans qu’il y ait lieu d’exiger la production d’un titre d’identité ou de la carte d’électeur. Elle considère qu’une attestation sur l’honneur peut suffire, dès lors que le demandeur produit les éléments permettant à l’administration de vérifier l’effectivité de son inscription sur une liste électorale, à savoir ses nom et prénom(s) et le nom de la commune où il allègue être inscrit. Elle observe ensuite que le législateur a subordonné l'exercice du droit d'accès aux listes électorales à l'engagement, de la part du demandeur, de ne pas en faire un usage commercial afin d'éviter toute exploitation commerciale des données personnelles. Elle considère dès lors que l'autorité compétente est fondée à rejeter la demande de communication dont elle est saisie s'il existe, au vu des éléments dont elle dispose, nonobstant l'engagement pris par le demandeur, des raisons sérieuses de penser que l'usage des listes électorales risque de revêtir, en tout ou partie, un caractère commercial. La commission considère que le caractère commercial ou non de l’usage des listes s’apprécie notamment au regard de l’objet de la réutilisation envisagée et de l’activité dans laquelle elle s’inscrit, la forme juridique retenue par le demandeur pour poursuivre cet objectif et l'existence ou l'absence de ressources tirées de cet usage constituant à cet égard de simples indices. A cet effet, la commission estime qu'il est loisible à l'autorité compétente de solliciter du demandeur qu'il produise tout élément d'information de nature à lui permettre de s'assurer de la sincérité de son engagement de ne faire de la liste électorale qu'un usage conforme aux dispositions de l'article L37 du code électoral. L'absence de réponse à une telle demande peut être prise en compte, parmi d'autres éléments, par l'autorité compétente afin d'apprécier, sous le contrôle du juge, les suites qu'il convient de réserver à la demande dont elle est saisie. Ainsi qu’elle l’a déjà relevé dans son conseil n° 20190154 du 24 janvier 2019, la commission constate que les dispositions particulières de l'article L37 du code électoral dérogent ainsi à celles du 1° de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, lesquelles font obstacle à la communication aux tiers d'informations mettant en cause la vie privée de personnes physiques identifiables, telles que les dates et lieux de naissance ainsi que le domicile. Elle relève que les dispositions particulières de l’article L37 ne permettent pas davantage de refuser la communication de listes électorales au motif qu’elle serait susceptible de porter atteinte à la sécurité des personnes, sur le fondement du d) du 2° de l’article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration. En l'espèce, la commission constate que Monsieur X a certifié ne pas formuler sa demande dans un but commercial. En effet, l'intéressé a indiqué, dans sa demande initiale, agir à des fins de curiosité personnelle. La commission considère, en l'état des informations portées à sa connaissance, qu'elle ne dispose pas d'élément suffisamment probant lui permettant de penser que l'usage de la liste électorale sollicitée risquerait de revêtir, en tout ou partie, un caractère commercial. En revanche, l'intéressé n'a pas justifié, de manière certaine, de sa qualité d'électeur. Dans ces conditions la commission émet un avis favorable, sous réserve que Monsieur X justifie de sa qualité d'électeur, y compris dans une commune autre que celle dont la liste électorale est sollicitée, selon les modalités précédemment exposées. Elle rappelle enfin que le demandeur, en qualité de réutilisateur de la liste ainsi communiquée, devra se conformer aux dispositions de la loi du 6 janvier 1978 et du règlement général sur la protection des donnée (RGPD) dès lors qu'il sera alors regardé comme un responsable de traitement de données à caractère personnel. Il devra notamment s'assurer que l'usage qu'il entend faire de la liste respecte les principes relatifs au traitement des données à caractère personnel, les conditions de licéité d'un tel traitement et les droits des personnes concernées, définis respectivement aux articles 5, 6, 7 et au chapitre III du RGPD.