Conseil 20230533 Séance du 09/03/2023

La Commission d'accès aux documents administratifs a examiné lors de sa séance du 9 mars 2023 votre demande de conseil relative au caractère communicable, par voie de publicité, des listes nominatives des bénéficiaires des aides financières aux travaux de rénovation de l’habitat privé, lesquelles constituent des annexes à la décision du président de la communauté d’agglomération prise par délégation du conseil de communauté, dans le cadre de la mise en œuvre de sa politique en matière d’habitat, sachant que lesdites listes font figurer les données personnelles suivantes : 1) les noms et prénoms ; 2) la qualité du bénéficiaire : propriétaire ou bailleur ; 3) l’adresse personnelle ; 4) la nature des travaux ; 5) le montant de l’aide attribuée. A titre liminaire, la commission vous rappelle que, lorsque des membres du conseil d’une communauté d’agglomération entendent faire valoir les droits d'information qu'ils tirent des dispositions particulières de l'article L2121-13 du code général des collectivités territoriales (« Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération »), que l’article L5211-1 du même code rend applicable au établissements publics de coopération intercommunale, les dispositions générales du livre III du code des relations entre le public et l'administration ne sont pas applicables. Toutefois, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que les élus puissent se prévaloir par ailleurs, indépendamment des fonctions qu'ils exercent ou des mandats qu'ils détiennent, du droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration, qui est ouvert à toute personne. La commission vous rappelle également que les dispositions du livre III du code des relations entre le public et l’administration qu’elle est compétente pour interpréter régissent l’accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques. Ces règles sont distinctes des formalités de notification rendant une décision individuelle opposable à son destinataire ou des formalités de publicité, publication ou affichage, nécessaires à l’entrée en vigueur d’un acte réglementaire ou d’une décision ni réglementaire ni individuelle. Sous cette réserve, la commission vous précise qu’il résulte de l'article L5211-46 du code général des collectivités territoriales que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale, des arrêtés de leur président, ainsi que de leurs budgets et de leurs comptes. L’ensemble des pièces annexées à ces documents sont communicables à toute personne qui en fait la demande, selon les modalités prévues par l’article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration. La commission souligne que le Conseil d'État a jugé, dans sa décision Commune de Sète n° 303814 du 10 mars 2010, complétée par la décision du 17 mars 2022, n° 449620, que si les exceptions au droit d’accès prévues à l’article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration ne sont pas opposables à une demande présentée sur le fondement des dispositions spéciales de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales, l’exercice de ce droit d’accès particulier ne saurait faire obstacle, par principe, à la protection de secrets protégés par la loi sur d’autres fondements, tels que le secret de la vie privée ou le secret industriel et commercial. Pour ce qui concerne des aides versées à des personnes physiques, la commission considère qu'il convient d'opérer une distinction selon la nature des aides versées et leur mode de calcul. Pour les aides versées en considération de la situation d'une personne physique ou dont le calcul est fonction de celle-ci, la commission estime que la protection de la vie privée fait obstacle à la communication de l'identité des bénéficiaires de telles aides et du montant des aides perçues par chacun. En revanche, lorsqu'il s'agit d'aides versées indépendamment de la situation personnelle d'une personne physique, elle estime que le nom des bénéficiaires de ces aides ne concerne pas leur vie privée. Il en va de même du montant de l'aide perçue. La commission vous indique donc que si les aides financières aux travaux de rénovation de l’habitat privé sont versées en considération de la situation des demandeurs ou si leur calcul est fonction de cette situation, la liste sur laquelle vous l’interrogez ne peut être communiquée à des tiers qu’après occultation de toutes les mentions couvertes par le secret de la vie privée. Elle précise que l'occultation peut consister à anonymiser un document, à condition que cette anonymisation soit suffisante pour prévenir tout risque d'identification des personnes intéressées. En l’espèce, la commission estime, en l’état des informations dont elle dispose, que devraient être occultés à ce titre, à tout le moins, les nom, prénom et adresse des bénéficiaires. Si ces aides financières sont versées indépendamment de la situation personnelle des demandeurs, peuvent être en revanche communiquées à des tiers les mentions portant sur les nom et prénom des personnes concernées et le montant de la subvention accordée. La commission estime que devront néanmoins en ce cas être occultées les mentions portant sur l’adresse, la qualité des demandeurs (propriétaire, occupant, bailleur) et l’objet du projet de travaux, comme relevant du secret de la vie privée. Enfin, la commission souligne que l’article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration prévoit que l'accès aux documents administratifs s'exerce, au choix du demandeur et dans la limite des possibilités techniques de l'administration : « 1° Par consultation gratuite sur place, sauf si la préservation du document ne le permet pas ; 2° Sous réserve que la reproduction ne nuise pas à la conservation du document, par la délivrance d'une copie sur un support identique à celui utilisé par l'administration ou compatible avec celui-ci et aux frais du demandeur (…) ; 3° Par courrier électronique et sans frais lorsque le document est disponible sous forme électronique ; 4° Par publication des informations en ligne, à moins que les documents ne soient communicables qu'à l'intéressé en application de l'article L. 311-6 ». La publication en ligne de documents administratifs par l’administration ne peut toutefois s’effectuer que sous réserve du respect des conditions posées à l’article L312-1-2 du même code, qui dispose que : « Sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires, lorsque les documents et données mentionnés aux articles L312-1 ou L312-1-1 comportent des mentions entrant dans le champ d'application des articles L311-5 ou L311-6, ils ne peuvent être rendus publics qu'après avoir fait l'objet d'un traitement permettant d'occulter ces mentions. Sauf dispositions législatives contraires ou si les personnes intéressées ont donné leur accord, lorsque les documents et les données mentionnés aux articles L312-1 ou L312-1-1 comportent des données à caractère personnel, ils ne peuvent être rendus publics qu'après avoir fait l'objet d'un traitement permettant de rendre impossible l'identification de ces personnes. Une liste des catégories de documents pouvant être rendus publics sans avoir fait l'objet du traitement susmentionné est fixée par décret pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. (...) ». La commission en déduit que, s’il peut être procédé à la publication d’un document administratif dès lors que son contenu respecte les secrets protégés par les articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, ce document doit, en outre, satisfaire aux conditions posées au deuxième alinéa de l’article L312-1-2 s’agissant de la protection des données à caractère personnel, s’il comporte des données de cette nature. Il résulte de ces dispositions que des documents comportant des données personnelles ne peuvent être publiés en ligne que s'ils ont fait l'objet d'un traitement permettant de rendre impossible l'identification de ces personnes, ou dans les trois hypothèses suivantes : - si une disposition législative autorise une telle publication sans anonymisation ; - si les personnes intéressées ont donné leur accord ; - si les documents figurent dans la liste prévue par l'article D312-1-3 du code des relations entre le public et l'administration. La commission vous indique ainsi, à toutes fins utiles, que la publication en ligne de la liste sur laquelle vous l’interrogez ne pourrait intervenir qu’après la mise en œuvre d’un traitement permettant de rendre impossible l’identification des bénéficiaires.