Avis 20230469 Séance du 09/03/2023
Maître X, conseil de Monsieur X, en sa qualité de maire de la commune de Bonneuil-en-France, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 24 janvier 2023, à la suite du refus opposé par le président de la communauté d'agglomération de Roissy Pays de France à sa demande de copie, par courrier électronique, wetransfer ou tout autre lien, des documents suivants :
1) tous les marchés publics conclus entre la collectivité et chacune des sociétés attributaires, notamment ceux conclus avec les sociétés X (dont le marché public EUROCOPTER),X, et afférents au territoire de la commune de Bonneuil-en-France durant la période allant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2020, ayant trait à des travaux ou prestations réalisés sur le territoire de la commune de Bonneuil-en-France et/ou pour le compte de cette commune :
2) le procès-verbal d'ouverture des candidatures ;
3) le procès-verbal d'ouverture des offres ;
4) le rapport d'analyse des offres et le rapport d'analyse des candidatures ;
5) la liste des candidats avec leur dénomination respective.
La commission rappelle d’une part, que selon le I de l'article 1er de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique : « Sous réserve des articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l'administration (…), les administrations mentionnées au premier alinéa de l'article L300-2 dudit code sont tenues de communiquer, dans le respect de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, les documents administratifs qu'elles détiennent aux autres administrations mentionnées au même premier alinéa de l'article L300-2 qui en font la demande pour l'accomplissement de leurs missions de service public. / Les informations figurant dans des documents administratifs communiqués ou publiés peuvent être utilisées par toute administration mentionnée audit premier alinéa de l'article L300-2 qui le souhaite à des fins d'accomplissement de missions de service public autres que celle pour les besoins de laquelle les documents ont été produits ou reçus ».
La commission précise, d’autre part, que les communes ont vocation à gérer, par leurs délibérations, l'ensemble des éléments affectant la vie de la collectivité dans le cadre des missions de service public les plus larges qui leur ont été dévolues par une clause générale de compétence. Ce n'est que dans l'hypothèse, résiduelle, où l'intervention de la commune s'exercerait en dehors de tout intérêt public qu'elle ne peut pas être regardée comme sollicitant auprès d'une administration publique la communication de documents pour l'accomplissement de ses missions de service public au sens de l'article 1er précité.
En l'espèce, eu égard à la nature des documents sollicités et aux éléments de contexte qui lui ont été apportés dans le dossier n° 20230471, inscrits à la même séance, la commission considère que les documents sollicités doivent être regardés comme demandés par la commune de Bonneuil-en-France pour l'accomplissement de ses missions de service public.
En l'espèce, elle relève, en premier lieu, que le 28 février 2023, Maître X a été destinataire d'un courrier du président de la communauté d'agglomération de Roissy Pays de France lui indiquant d'une part n'avoir connaissance d'aucun marché EUROCOPTER conclu avec la société X et lui précisant d'autre part, qu'aucun contrat n'a été conclu avec les sociétés X. La commission déclare, dès lors, la demande d'avis sans objet sur ces points en tant que portant sur des documents inexistants.
En second lieu, la commission relève que par ce même courrier, plusieurs contrats ont été transmis à la demanderesse. La commission, qui n'a connaissance d'aucun autre contrat mentionné au point 1) susceptible de lui être transmis par ailleurs déclare dès lors, la demande d'avis sans objet sur ce point, en tant que portant sur des documents communiqués. Elle relève, toutefois, que ne lui ont éventuellement pas été transmis les documents mentionnés aux points 2) à 5) de la demande.
En supposant que ces documents existent et n'aient effectivement pas été communiqués à Maître X, la commission rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration.
Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, Centre hospitalier de Perpignan (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières…).
En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers. La commission a précisé dans son Conseil n° 20221455 du 21 avril 2022 qu’il en va aussi désormais des factures, bons de commande, états d’acompte, décomptes et autres pièces établies dans le cadre de l’exécution d’un marché public, qui ne sont communicables qu'après occultation des prix unitaires ou de la décomposition du prix forfaitaire, susceptibles, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé.
L’examen de l’offre des entreprises non retenues au regard des mêmes principes conduit de même la Commission à considérer que leur offre de prix globale est, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’est pas.
En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants :
- les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ;
- dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises.
La commission précise enfin que si la liste des entreprises ayant participé à la procédure est librement communicable, en revanche les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du marché sont librement communicables.
La commission émet un avis favorable à la communication du surplus des documents demandés, s'ils existent, sous la réserve tenant au secret des affaires appréciée dans les conditions rappelées ci-dessus.