Avis 20230369 Séance du 09/03/2023
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 19 janvier 2023, à la suite du refus opposé par le directeur de l’École normale supérieure Paris-Saclay à sa demande de communication, dans un format numérique, ouvert et réutilisable, du protocole d'accord mentionné dans le document : https://ens‐paris‐saclay.fr/actualite/nouveau‐partenariat‐entre‐dassault‐systemes‐et‐lens‐paris‐saclay, notamment ses éventuelles annexes.
En réponse à la demande qui lui a été adressée, le directeur de l’École normale supérieure Paris-Saclay a maintenu son refus de communication en faisant valoir que le document sollicité est protégé par le secret des affaires.
La commission rappelle, en premier lieu, qu'aux termes du décret n° 2011-21 du 5 janvier 2011, l’École normale supérieure Paris-Saclay est un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel au sens de l'article L716-1 du code de l'éducation. En vertu de l’article 3 de ce décret, « L'école prépare, par une formation scientifique et culturelle de haut niveau, des élèves se destinant à la recherche scientifique fondamentale ou appliquée, à l'enseignement universitaire et dans les classes préparatoires aux grandes écoles ainsi qu'à l'enseignement secondaire et, plus généralement, au service des administrations de l’État et des collectivités territoriales, de leurs établissements publics ou des entreprises. Des étudiants se destinant notamment aux différents métiers de l'enseignement et de la recherche bénéficient également de ses formations.
Elle exerce ses missions principalement dans les disciplines technologiques, scientifiques, de gestion et des sciences sociales. Elle assure la préparation de diplômes nationaux par délégation et au nom de l'université Paris-Saclay ainsi que la délivrance de diplômes spécifiques, dont le diplôme de l’École normale supérieure Paris-Saclay valant grade de master, dans le respect de l'article 5 des statuts de l'université Paris-Saclay. Elle peut délivrer des diplômes propres. Elle peut préparer à des concours des fonctions publiques. Elle conduit des activités de formation continue. Elle définit et met en œuvre une politique de recherche scientifique et technologique qu'elle valorise par ses publications, ses productions scientifiques et pédagogiques, ses brevets et licences d'exploitation. Elle promeut la création et le soutien de jeunes entreprises innovantes. Elle collabore avec des organismes de recherche ou d'enseignement supérieur français ou étrangers dans une perspective multidisciplinaire et internationale. Elle facilite les poursuites d'études de ses diplômés, notamment en doctorat ».
La commission en déduit que les conventions par lesquelles l’École normale supérieure Paris-Saclay définit un programme de recherche et développe des collaborations avec des entreprises privées, qui ont trait au financement et à la mise en œuvre des missions de service public qu’elle mène conformément à l’article 3 du décret du 5 janvier 2011, sont des documents administratifs au sens de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration, communicables dans les conditions prévues aux articles L311-1 et suivants de ce code.
La commission rappelle, ensuite, que l’article L311-6 s’oppose à ce que soient divulgués à des tiers les documents dont la « communication porterait atteinte (…) au secret des affaires, lequel comprend le secret des procédés, des informations économiques et financières et des stratégies commerciales ou industrielles et est apprécié en tenant compte, le cas échéant, du fait que la mission de service public de l'administration mentionnée au premier alinéa de l'article L300-2 est soumise à la concurrence ».
Elle rappelle également qu’aux termes de l’article L151-1 du code de commerce, est protégée par le secret des affaires toute information répondant aux critères suivants : « (…) 1° Elle n'est pas, en elle-même ou dans la configuration et l'assemblage exacts de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d'informations en raison de leur secteur d'activité ; 2° Elle revêt une valeur commerciale, effective ou potentielle, du fait de son caractère secret ; 3° Elle fait l'objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret ».
Elle estime que lorsque les informations contenues dans un document administratif relèvent du secret des procédés, des informations économiques et financières ou des stratégies commerciales ou industrielles, il y a lieu de présumer que les exigences prévues par le code de commerce sont satisfaites et que le document relève du secret des affaires. Il appartient, le cas échéant, au demandeur ou à l’administration de constater que ces exigences ne sont pas remplies pour contester ou remettre en cause une telle présomption (avis n° 20224385 du 13 octobre 2022).
La commission constate qu'un protocole d'accord par lequel un établissement public développe des collaborations avec des entreprises privées, a pour vocation première de retracer les conditions dans lesquelles un établissement public exerce sa mission de service public administratif, de sorte que cet établissement ne saurait se prévaloir, en son endroit, du secret des stratégies commerciales ou industrielles, ni davantage du secret des informations économiques et financières (comp. avis n° 20210291 du 4 mars 2021 ; n° 20216119 du 16 décembre 2021). La commission constate, en revanche, qu'un protocole d'accord, compte tenu du caractère hautement concurrentiel du secteur économique en cause, peut contenir, pour le partenaire privé, des informations relevant du secret des stratégies industrielles et donc du secret des affaires au sens des dispositions précitées. Elle relève, en effet, qu’une convention de partenariat de recherche n’est, en principe, pas conclue de façon désintéressée par le partenaire mais participe de sa propre politique de recherche et développement. La commission estime que, sous réserve des spécificités propres à chaque convention, peuvent relever du secret des affaires, des informations précises quant à la participation de l’entreprise privée, au champ des recherches menées ou aux avantages retirés par le partenaire. Tel n’est, en revanche, pas le cas du montant global des apports du partenaire, de l’objet général des recherches ou des principes généraux de répartition des droits, des connaissances et/ou des technologies issues de ces recherches.
En l'espèce, la commission relève que le document sollicité porte sur l'organisation d'un partenariat institutionnel entre l’École normale supérieure (ENS) de Paris-Saclay et une entreprise privée afin de renforcer les connaissances et le savoir-faire, dans un domaine d'innovation, celui des jumeaux virtuels. Elle estime que ce document, dont elle a pu prendre connaissance, eu égard notamment à la généralité des termes employés, n'est pas couvert par le secret des affaires.
Elle émet donc un avis favorable à sa communication.