Avis 20228139 Séance du 16/02/2023
Monsieur X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 28 décembre 2022, à la suite du refus opposé par le président de la communauté de communes du Grand Chambord à sa demande de publication en ligne sur le site grandchambord.fr des documents suivants issus du conseil communautaire du 21 novembre 2022 et des décisions prises par le président de la communauté de communes :
1) la convocation adressée aux conseillers communautaires ;
2) la note de synthèse ;
3) le compte rendu de la séance du conseil communautaire ;
4) le procès-verbal du conseil communautaire du 7 novembre 2022 ;
5) les pièces administratives relatives aux subventions accordées par la décision n° 2022-72 dans le cadre des interventions en matière d'aides à l'investissement matériel des très petites entreprises (TPE) ;
6) le marché attribué à l'entreprise X par décision n° 2022-87 pour les travaux de désamiantage, déplombage et de démolition partielle du gymnase de Bracieux.
En l’absence de réponse du président de la communauté de communes du Grand Chambord, la commission estime que la convocation adressée à un conseiller communautaire est un document librement communicable à toute personne en faisant la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve de l'occultation préalable des éventuelles mentions couvertes par le secret de la vie privée telles que, notamment, les adresses électroniques ou postales des élus. Elle émet donc un avis favorable au point 1) de la demande, sous cette réserve.
La commission, qui n'a pu prendre connaissance des documents visés aux points 2) et 3) de la demande et n'a pas été informée de leur contenu, ne peut qu'estimer que ces documents sont communicables à toute personne qui en fait la demande sur le fondement de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve, le cas échéant, de l'occultation des éventuelles mentions protégées en application des articles L311-5 et L311-6 de ce même code, notamment au titre du secret des affaires ou de la vie privée.
La commission rappelle ensuite qu'il résulte de l’article L5211-46 du code général des collectivités territoriales que : « Toute personne physique ou morale a le droit de demander communication des délibérations et des procès-verbaux des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale, des budgets et des comptes de ces établissements ainsi que des arrêtés de leur président ». L’ensemble des pièces annexées à ces documents, y compris les pièces justificatives des comptes, sont communicables à toute personne qui en fait la demande, selon les modalités prévues par le livre III du code des relations entre le public et l'administration. La commission estime que les décisions prises par le président d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) en application de la délégation que lui a confiée l'assemblée délibérante entrent dans le champ de ces dispositions.
La commission précise toutefois que si l'article L5211-46 du code général des collectivités territoriales a institué un régime spécifique d'accès aux documents des EPCI, distinct du régime général d'accès aux documents administratifs organisé par les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, et si les exceptions au droit d'accès prévues à l'article L311-6 de ce code ne sont pas opposables à une demande présentée sur le fondement de ces dispositions spéciales, l'exercice de ce droit d'accès particulier ne saurait faire obstacle, par principe, à la protection de secrets protégés par la loi sur d'autres fondements, tels que le secret de la vie privée (CE 10 mars 2010, n° 303814, commune de Sète ; conseil n° 20121509 du 19 avril 2012 et conseil n° 20123242 du 27 septembre 2012), le secret médical (conseil n° 20122788 du 26 juillet 2012), le secret des correspondances échangées entre le client et son avocat (avis n° 20111095 du 14 avril 2011), ou le secret industriel et commercial (CE, 17 mars 2022, n° 449620).
La commission estime par suite que les documents mentionnés aux points 4) et 5) sont communicables à toute personne en faisant la demande sur le fondement de ces dispositions ainsi que d'ailleurs de celles de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve de l’occultation préalable des éventuelles mentions couvertes par le secret des affaires, le secret de la vie privée ou de tous autres secrets protégés par la loi (CE, 27 septembre 2022, n° 452614). Elle précise à cet égard, s'agissant du point 5), que lorsqu'il s'agit d'aides versées pour l'exercice d'une activité économique, indépendamment de la situation personnelle d'une personne physique, la commission estime que le nom des bénéficiaires de ces aides, que ce soient des personnes physiques ou des personnes morales, n'est pas couvert par le secret de la vie privée, ni par le secret des affaires. Il en va de même du montant de l'aide perçue sous réserve que la révélation de ce montant ne permette pas d'en déduire une information couverte par le secret des affaires, telle que le montant du chiffre d'affaires ou celui d'un investissement.
Elle émet donc un avis favorable sur ces points, sous ces réserves.
La commission précise, enfin qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s'y rapportent sont considérés comme des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par les articles L300-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration.
Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte en effet de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, "Centre hospitalier de Perpignan" (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières…).
En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité concurrentiel et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers. Revenant sur sa doctrine antérieure, la Commission a également précisé dans son Conseil n° 20221455 du 21 avril 2022, qu’il en va aussi désormais ainsi des factures, bons de commande, états d’acompte, décomptes et autres pièces établies dans le cadre de l’exécution d’un marché public, qui ne sont communicables qu'après occultation des prix unitaires ou de la décomposition du prix forfaitaire, susceptibles, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé.
En outre, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics.
La commission estime ainsi que les documents mentionnés au point 6) sont communicables à toute personne qui en fait la demande sous réserve de l’occultation des mentions protégées par le secret des affaires.
Enfin, la Commission prend note des nombreuses demandes formulées par Monsieur X auprès de la communauté de communes du Grand Chambord et l’invite, à nouveau, à faire preuve de discernement et de modération dans l'usage qu'il fait du droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l’administration.