Avis 20227553 Séance du 12/01/2023
Maître X, X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 2 décembre 2022, à la suite du refus opposé par le maire de Corbeil-Essonnes à sa demande de comunication des documents suivants relatifs au projet de l'ancienne imprimerie X :
1) le dossier de l’enquête publique annoncée dans la délibération n° 5.7 du 20 juin 2022 du conseil municipal de Corbeil‐Essonnes ;
2) les comptes rendus et les rapports établis par les comités techniques et les comités de pilotage ;
3) les comptes rendus et les rapports établis à l’issue des réunions publiques qui ont eu lieu, à l’exception des documents déjà accessibles en ligne relatifs à la première concertation qui s’est achevée en mars 2022 ;
4) la totalité des échanges (courriers, mails, etc.) intervenus entre X, d’une part, et les élus et services de la mairie, d’autre part, y compris, le cas échéant, sur leurs adresses personnelles ;
5) l’ensemble des documents transmis par X portant sur le projet (descriptifs, plans, documents financiers, plannings, etc.).
En l'absence de réponse du maire de Corbeil-Essonnes à la date de sa séance, la commission rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas compétente pour se prononcer sur les droits d'information que les conseillers municipaux tirent, en cette qualité, de textes particuliers tel l'article L2121-13 du code général des collectivités territoriales, qui dispose que : « Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ». Toutefois, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que les élus puissent se prévaloir du droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration, qui est ouvert à toute personne, indépendamment des fonctions qu'elle exerce ou des mandats qu'elle détient.
La commission estime que, de manière générale, l'ensemble des documents qui résultent d'une enquête publique (rapport et conclusions du commissaire-enquêteur, registre de l'enquête, observations) constituent des documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration, une fois l'enquête close et dès leur remise à l'autorité compétente. La communication du registre d'enquête ne suppose aucune occultation préalable, la communication des informations librement consignées sur les registres par les personnes ayant formulé des observations sur le projet soumis à enquête ne pouvant porter atteinte à l'un des secrets protégés par l’article L311-6 de ce code. Si les documents qui résultent de cette enquête ne sont, en principe, communicables qu’à la clôture de l’enquête publique, les informations relatives à l’environnement, au sens de l’article L124-2 du code de l’environnement, sont toutefois communicables selon les modalités particulières prévues par les articles L124-1 et suivants du même code.
Selon les articles L124-1 et L124-3 du code de l’environnement, le droit de toute personne d'accéder à des informations relatives à l’environnement lorsqu'elles sont détenues, reçues ou établies par les autorités publiques ou pour leur compte, s'exerce dans les conditions définies par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre I du code de l'environnement. A cet égard, les articles L124-4 et L124-5 précisent les cas dans lesquels l'autorité administrative peut rejeter une demande d'information relative à l'environnement, au nombre desquelles ne figure pas le caractère préparatoire du document ou des informations. Il appartient en particulier à l'autorité administrative d'apprécier l'intérêt d'une communication et elle n'est fondée à rejeter une demande d'information relative à l'environnement que si elle porte atteinte : 1° Aux intérêts mentionnés aux articles L311-5 à L311-8 du code des relations entre le public et l'administration, à l'exception de ceux visés au e et au h du 2° de l'article L. 311-5 ; 2° A la protection de l'environnement auquel elle se rapporte ; (...).
La commission émet, en application des principes et sous les réserves qui viennent d’être rappelés, un avis favorable au point 1).
La commission considère par ailleurs que les documents sollicités au point 2), 3) et 5), dont elle n'a pas pu prendre connaissance, sont communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, à condition qu'ils ne présentent pas un caractère préparatoire et sous réserve de l'occultation des éventuelles mentions couvertes par les secrets protégés par l'article L311-6 du du code des relations entre le public et l'administration, en particulier le secret des affaires. Les mentions relatives à l'environnement que contiendraient ces documents sont librement communicables en application des articles L311-1 du code des relations entre le public et l'administration et L124-1 et suivants du code de l'environnement, sous réserve de l'occultation des mentions couvertes par un secret protégé et dont l'intérêt pour l'environnement ne justifierait pas qu'il soit dérogé à ce secret.
S'agissant, enfin, du point 4), la commission rappelle qu'il résulte de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration que « sont considérés comme des documents administratifs, (...) les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission ». Constituent notamment de tels documents, les correspondances ainsi que les minimessages textes (SMS) et les courriers électroniques émanant des autorités administratives ou de leurs services.
La commission souligne que la circonstance qu'un message électronique ou un SMS soit émis ou reçu sur une adresse de messagerie ou un téléphone personnels privés ne permet pas, par elle-même, de le soustraire au droit d'accès aux documents administratifs régi par le livre III du code des relations entre le public et l'administration. Elle considère, en effet, que ces messages, dès lors qu'ils sont produits ou reçus dans le cadre des missions de service public exercées et des compétences détenues à ce titre, constituent des documents administratifs au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, communicables sur le fondement de ce code (avis n° 20210990 du 25 mars 2021).
La commission précise, ensuite, que dans sa décision du 3 juin 2022, n° 452218, le Conseil d’État a jugé que seules les correspondances émises ou reçues, dans le cadre des fonctions exercées au nom de la commune, par le maire, ses adjoints ou les membres du conseil municipal auxquels le maire a délégué une partie de ses fonctions, ont le caractère de documents administratifs au sens de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration. Tel n’est en revanche pas le cas des correspondances des élus locaux qui ne peuvent être regardées comme émanant de la commune dès lors qu’elles expriment, notamment, des positions personnelles ou des positions prises dans le cadre du libre exercice de leur mandat électif.
La commission en a déduit, dans un avis n° 20226034, du 3 novembre 2022, que les documents produits par l’exécutif d’une commune revêtent un caractère administratif, dès lors que ces autorités sont réputées agir au nom de cette collectivité. L’utilisation d’une messagerie ou d’un téléphone personnel privé est, à cet égard, sans incidence, à condition que les échanges concernés ne soient pas détachables de ces fonctions. Les documents produits ou reçus par le conseil municipal constituent également des documents administratifs, dès lors que les élus délibèrent, à cette occasion, au nom de la commune. En revanche, échappent à la qualification de document administratif les messages des élus, y compris des membres de l’exécutif local, qui ne sont pas échangés au nom de la commune dans le cadre d’une fonction élective, mais qui le sont à titre personnel dans le cadre de leur fonction politique. Le caractère administratif ou politique des messages émanant des élus locaux s’apprécie ainsi, au cas par cas, notamment à partir d’un critère matériel, tenant à leur contenu et à leur objet, le critère organique et le critère formel constituant, pour leur part, de simples indices.
En l’espèce, la commission estime que les documents sollicités au point 4), sous réserve qu'il s'agisse de documents administratifs en application des principes rappelés ci-dessus, sont communicables à toute personne qui en fait la demande, sous réserve de l'occultation des éventuelles mentions protégées par le secret de la vie privée ou le secret des affaires, en application de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration. Les éventuelles informations environnementales contenues dans ces documents sont communicables sur le fondement de l'article L124-1 et suivants du code de l'environnement, dans les conditions rappelées ci-dessus.
La commission émet, sous ces réserves, un avis favorable sur ce point.