Avis 20227115 Séance du 12/01/2023

Monsieur X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 14 novembre 2022, à la suite du refus opposé par le directeur général des patrimoines à sa demande de consultation, par dérogation aux délais fixés par l'article L213-2 du code du patrimoine, de la partie du dossier d'aide sociale à l'enfance portant sur la période 1970-1974 de sa sœur, X, décédée le 17 novembre 2001, non transmise lors d'une précédente communication, conservé aux Archives départementales de la Haute-Savoie sous la cote 1008 W 10. La commission, qui a pris connaissance des observations du directeur général des patrimoines, rappelle à titre liminaire que, par principe, les documents d'archives sont communicables de plein droit, en vertu de l'article L213-1 du code du patrimoine. Néanmoins, par dérogation, certaines catégories de documents, en raison des informations qu'ils contiennent, ne sont pas immédiatement communicables et ne le deviennent qu’aux termes des délais et dans les conditions fixés par l'article L213-2 du même code. En l'espèce, la commission relève que les documents sollicités sont susceptibles d'être couverts par un triple délai de communicabilité : d’une part un délai de cinquante ans à compter de la clôture du dossier pour ce qui relève des mentions portant atteinte à la vie privée et d'autre part, un délai de vingt-cinq ans à compter de la date du décès de l'intéressé, pour les éléments relatifs aux affaires portées devant les juridictions et les documents couverts par le secret médical. La commission précise, par ailleurs, qu'en vertu de l'article L213-3 du code du patrimoine, une autorisation de consultation, par anticipation aux délais prévus par l'article L213-2 précité, peut cependant être accordée par l’administration des archives aux personnes, physiques ou morales, qui en font la demande dans la mesure où l'intérêt qui s'attache à la consultation des documents ne conduit pas à porter une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. Cette autorisation requiert l’accord préalable de l'autorité dont émanent les documents, l’administration des archives étant tenue par l’avis donné. La commission rappelle que pour apprécier l'opportunité d'une communication anticipée, elle s'efforce, au cas par cas, de mettre en balance les avantages et les inconvénients d'une communication anticipée, en tenant compte d'une part de l'objet de la demande et, d'autre part, de l'ampleur de l'atteinte aux intérêts protégés par la loi. Conformément à sa doctrine constante (avis de partie II, n° 20050939, du 31 mars 2015), cet examen la conduit à analyser le contenu du document (son ancienneté, la date à laquelle il deviendra librement communicable, la sensibilité des informations qu'il contient au regard des secrets justifiant les délais de communication) et à apprécier les motivations, la qualité du demandeur (intérêt scientifique s'attachant à ses travaux mais aussi intérêt administratif ou familial) et sa capacité à respecter la confidentialité des informations dont il souhaite prendre connaissance. En l'espèce, le chef du service de la protection de l'enfance du département de la Haute-Savoie a motivé son refus en faisant valoir que les documents qui n'ont pas été consultés par le demandeur ne lui apporteront aucun éclairage à la compréhension de son histoire familiale et des raisons ayant justifié le placement de sa sœur. La commission relève, toutefois, la proximité de l’échéance des délais de communicabilité. En effet, l'intégralité du dossier demandé, clos en 1974, deviendra librement communicable en 2026, soit vingt-cinq ans après le décès de l’intéressée intervenu le 17 novembre 2001. Elle a par ailleurs été informée que plusieurs pièces, sauf informations couvertes par le secret médical, sont d'ores et déjà librement communicables depuis le 1er janvier 2023 en raison de l'expiration du délai de cinquante ans protégeant la vie privée. La commission estime, dès lors, que la consultation anticipée de l’intégralité du dossier par Monsieur X, qui s'inscrit dans une démarche purement personnelle et familiale, ne porterait pas, en l'espèce, une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. Elle émet donc un avis favorable à la demande.