Avis 20227096 Séance du 15/12/2022
Monsieur X, X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 10 novembre 2022, à la suite du refus opposé par le président de la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée à sa demande de communication des documents suivants alors que l'administration invite le demandeur à soumettre sa requête par courrier postal :
1) le contrat liant la collectivité à un délégataire pour la fourniture de l'eau ;
2) les budgets et comptes du service « eau assainissement » pour les deux derniers exercices.
La commission relève que, par un courrier du 25 novembre 2022, postérieur à l’enregistrement de la demande, le président de la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée a transmis au demandeur les documents sollicités, après occultation, s’agissant du contrat de délégation de service public de l’eau potable et de l’assainissement conclu le 26 août 2016, des mentions couvertes par le secret des affaires.
La commission prend note de cette communication mais relève toutefois que Monsieur X conteste l’étendue des occultations opérées aux pages 57 et 58 du contrat de délégation de service public, relatives à la rémunération du délégataire, dans la mesure où celles-ci ont un impact direct sur la fixation du prix facturé au consommateur.
En l'absence de réponse de président de la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée à la date de sa séance, la commission rappelle qu'une fois signés, les délégations de service public définies comme des contrats de concession de travaux ou de service au sens du code de la commande publique (L1121-1 à L1121-3) et les documents qui s'y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit à ne pas lui attribuer le contrat ne permet pas de refuser la communication de ces documents.
En application de ces principes, la commission estime, en particulier, que les documents du dossier de consultation des entreprises se rapportant à la convention initiale, tels que le cahier des charges ou le règlement de consultation ne revêtent jamais un caractère préparatoire et ne sont pas couverts par le secret des affaires. Ces documents sont, dès lors, intégralement communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration. Il en va de même de la liste des entreprises ayant participé à la procédure.
Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Sont notamment visées par cette réserve, pour l’ensemble des candidats, y compris l’entreprise retenue, les mentions relatives à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des contrats publics.
La commission considère, en outre, de façon générale que sous réserve des particularités propres à chaque délégation :
- l'offre détaillée de l'entreprise retenue est en principe communicable, dans la mesure où elle reflète la qualité et le coût du service rendu à l’usager ;
- l'offre globale des entreprises non retenues est, en principe, elle aussi communicable. En revanche, le détail technique et financier de leurs offres ne l’est pas. De plus, doivent être occultées dans les documents préalables à la conclusion du contrat de concession (procès-verbaux, rapports de la commission de délégation de service public et de l'autorité habilitée à signer le contrat, documents relatifs à la négociation des offres…) les mentions relatives aux détails techniques et financiers de ces offres ;
- de la même manière, si les moyens techniques et humains mentionnés dans les offres des candidats sont protégés par le secret des affaires, certaines mentions se rapportant au cocontractant, tels que le montant de la masse salariale ou la liste des biens et équipements mis à sa disposition sont en revanche librement communicables, en ce qu’elles reflètent le coût du service ;
- les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du contrat sont librement communicables ;
- le contrat de délégation de service public est communicable ainsi que ses annexes, sous réserve de l'occultation des éléments couverts par le secret des affaires.
La commission considère, par ailleurs, qu'au stade de l'exécution, les informations relatives aux moyens humains et techniques du délégataire ainsi que celles reflétant sa stratégie commerciale sont couvertes par le secret des affaires. En revanche, les données permettant d'apprécier la qualité et le coût du service devant être rendu aux usagers, qui font partie intégrante du contrat, sont librement communicables.
Tel est le cas, en particulier, des informations suivantes :
- le montant et les modalités de calcul de la redevance perçue, dès lors que celle-ci a un impact sur le coût du service ;
- les données présentant la qualité du service rendu et la fréquentation des usagers, ainsi que la grille tarifaire pour les usagers ;
- la liste des biens et équipements mis à disposition du délégataire et, plus généralement, l’inventaire des biens incluant les biens de retour et les biens de reprise ;
- les tableaux d’amortissement des investissements en biens de retour réalisés par l’autorité délégante, à condition toutefois que la demande concerne les amortissements de la délégation et non les comptes de la société délégataire.
En application de ces principes, la commission émet un avis favorable au point 1) de la demande, et invite le président de la communauté d'agglomération Béziers Méditerranée à procéder à une nouvelle communication du contrat de délégation de service public sollicité sans occulter les mentions relatives aux modalités de calcul de la rémunération du fermier.
Par ailleurs, la commission, qui constate que les documents sollicités au point 2) de la demande ont été transmis à Monsieur X postérieurement à la saisine de la commission, ne peut que déclarer sans objet la demande sur ce point.
A toutes fins utiles, la commission rappelle qu'aucun formalisme n'est prescrit par le livre III du code des relations entre le public et l’administration pour les demandes de communication d'un document administratif adressées aux autorités administratives. L’administration ne peut donc, en principe, subordonner la communication d'un document à la présentation d'une demande sous une forme particulière (saisine écrite, saisine via son site internet), sauf considérations tirées de la continuité et du bon fonctionnement du service public.