Avis 20226187 Séance du 24/11/2022

Maître X, conseil de la X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 10 octobre 2022, à la suite du refus opposé par le directeur général de l'établissement public foncier d'Ile-de-France à sa demande de communication des documents suivants servant de fondement à la décision du 6 juillet 2022 par laquelle l'établissement public foncier d'Ile-de-France (EPFIF) a exercé le droit de préemption sur la parcelle cadastrée section X située X, à Paris (75020) : 1) la délibération n° DU 2006‐127 des 16 et 17 octobre 2006 en dates des 16 et 17 octobre 2006 instaurant le droit de préemption sur les zones U du plan local d'urbanisme (PLU) ; 2) la preuve de l’affichage en mairie de cette délibération pendant un mois et la preuve de la mention de cette délibération insérée dans deux journaux diffusés dans le département ; 3) la délibération 2011 DLH 89 des 28, 29, 30 mars 2011 du conseil de Paris adoptant le programme local de l’habitat (PLH) ; 4) le PLH ; 5) le programme pluriannuel d’intervention arrêté par le conseil d’administration de l’EPFIF le 24 mars 2021 ; 6) la délibération 2020 DDCT 17 du 3 juillet 2020 du conseil de Paris portant délégation en matière d’exercice du droit de préemption ; 7) la délibération n° 2019 DLH 29 en dates des 4, 5, 6 février 2019 du conseil de Paris approuvant le renouvellement de la convention d’intervention foncière entre la ville de Paris et l’EPFIF ; 8) la convention d’intervention foncière conclue le 26 juin 2019 entre la ville de Paris et l’EPFIF ; 9) le règlement intérieur institutionnel adopté par le conseil d’administration de l’EPFIF ; 10) la preuve de la notification de la déclaration d'intention d'aliéner (DIA) le 19 avril 2022 ; 11) la demande de pièces complémentaires du 8 juin 2022 et la preuve de la notification de cette demande ; 12) le constat contradictoire établi à l’issue de la visite du bien ; 13) l’étude de faisabilité sur le bien mis en vente concluant à la possibilité de réaliser sur le bien 13 logements locatifs sociaux et un rez‐de‐chaussée commercial ; 14) l’avis de la Direction nationale d’interventions domaniales en date du 8 juin 2022 ; 15) la décision de préemption du 6 juillet 2022, revêtue du tampon du contrôle de légalité. En l'absence de réponse du directeur général de l'établissement public foncier d'Ile-de-France à la date de sa séance, la commission rappelle, en premier lieu, qu’il résulte de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux du conseil municipal, des arrêtés municipaux, ainsi que des budgets et comptes de la commune. L’ensemble des pièces annexées à ces documents, y compris les pièces justificatives des comptes, sont communicables à toute personne qui en fait la demande, selon les modalités prévues par l’article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration. Elle émet donc un avis favorable à la demande formulée aux points 1) à 4), ainsi qu’aux points 6) à 8). La commission estime, en second lieu, que les documents sollicités aux points 5), 9), 11), 13) et 15) sont communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve, s’agissant du point 13), que l’étude ne revête plus un caractère préparatoire. La commission rappelle, à cet égard, qu'un document préparatoire est exclu du droit d'accès prévu par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration aussi longtemps que la décision administrative qu'il prépare n'est pas intervenue ou que l'administration n'y a pas manifestement renoncé, à l'expiration d'un délai raisonnable. Toutefois lorsqu’un projet comporte des phases distinctes donnant lieu à l'édiction de plusieurs décisions successives, il importe d’identifier la nature des pièces dont le caractère préparatoire est levé par l’intervention de chacune de ces décisions Elle émet donc un avis favorable sur ces points, sous cette réserve. En troisième lieu, la commission rappelle, d’une part, qu’il ressort de la décision du Conseil d'État du 17 avril 2013, ministre de l'immigration nationale et du développement solidaire c/ M. X (n° 337194, mentionnée aux tables du recueil Lebon), que l'intéressé, au sens de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, est la personne directement concernée par le document, c'est-à-dire, s'agissant d'un document contenant des informations qui se rapportent à une personne, soit cette personne elle-même, soit un ayant droit direct de cette personne, titulaire d'un droit dont il peut se prévaloir à raison du document dont il demande la communication. La commission relève, d’autre part, que le constat contradictoire établi conformément aux dispositions de l’article D213-13-2 du code de l’urbanisme est destiné au seul propriétaire et au titulaire du droit de préemption. En conséquence, la commission estime que ce document n’est communicable qu’aux personnes intéressées, à l’exclusion des tiers, en application des dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. De la même manière, elle rappelle que les déclarations d'intention d'aliéner (DIA), qui contiennent des informations relatives au patrimoine des particuliers, ne sont pas communicables à des tiers mais uniquement aux intéressés, en application de l'article L311-6 précité protégeant le secret de la vie privée, que ces déclarations aient été suivies ou non d’une préemption. La commission estime, dès lors, que sont directement concernés par une DIA et le constat de visite contradictoire, tant le vendeur que l'acquéreur, ainsi que, le cas échéant leurs ayants droit. Il en résulte en revanche qu'un tiers n'est pas recevable à demander l'accès à ces documents sur le fondement des dispositions des articles L311-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration. En l’espèce, elle relève que la X, pour le compte de laquelle la communication est demandée, constitue X. La commission émet donc un avis défavorable aux points 10) et 12) de la demande. En quatrième et dernier lieu, s'agissant du pont 14) de la demande, la commission rappelle que la procédure de préemption, organisée, dans le cas général, par les articles R213-4 à D213-13-4 du code de l’urbanisme, comporte plusieurs étapes. Dans un premier temps, au vu de la déclaration d’intention d’aliéner présentée par le propriétaire conformément à l’article R213-5, du prix d’estimation ou du droit offert en contrepartie mentionné dans cette déclaration et, le cas échéant, de l’avis des services des finances publiques, le titulaire du droit de préemption peut, dans le délai prévu à l’article R213-7, renoncer à l’exercice de ce droit ou, ainsi que le prévoient les articles R213-8 et R213-9, notifier au propriétaire soit sa décision d’acquérir aux prix et conditions proposés, soit son offre d’acquérir à un prix proposé par lui et, à défaut d’acceptation de cette offre, son intention de faire fixer le prix du bien par la juridiction compétente en matière d’expropriation. Selon l’article R213-10, à compter de la réception d’une telle offre d’acquérir, le propriétaire dispose d’un délai de deux mois pour notifier au titulaire du droit de préemption soit qu’il renonce à l’aliénation, soit qu’il accepte le prix offert, soit qu’il maintient le prix ou l’estimation figurant dans sa déclaration et accepte que le prix soit fixé par le juge de l’expropriation. Dans ce dernier cas, le titulaire du droit de préemption, s’il estime que le prix demandé est exagéré, peut, conformément à l’article R213-11, saisir le juge de l’expropriation, dans un délai de quinze jours. A défaut, il est réputé avoir renoncé à l’exercice de son droit. Enfin, dans le cas de fixation judiciaire du prix, et pendant un délai de deux mois après que la décision juridictionnelle soit devenue définitive, les parties peuvent accepter le prix fixé par la juridiction ou renoncer à la mutation, ainsi que le second alinéa de l’article L213-7 leur en laisse la faculté. Dans ces conditions, la commission estime que l’avis prévu à l’article R213-6 n’a pas pour seul objet de préparer la décision du titulaire du droit de préemption, mentionnée aux articles R123-8 et R213-9, de préempter ou de renoncer à l’exercice de ce droit, en réponse au dépôt de la déclaration d’intention d’aliéner, mais également, si la procédure se poursuit, de préparer la décision, mentionnée à l’article R213-11, de saisir le juge de l’expropriation ou, à nouveau, de renoncer à l’exercice du droit de préemption, ainsi que, le cas échéant, la décision éventuelle, prévue à l’article L213-7, de renoncer à l’acquisition du bien au prix fixé par le juge de l’expropriation. La commission en a déduit (voir notamment son conseil n° 20180773 du 31 mai 2018), en revenant sur sa précédente position, que l’avis de l’administration compétente relatif à l’estimation du bien ne perd son caractère de document préparatoire à une décision administrative qui n’aurait pas encore été prise qu’à compter de la conclusion de la vente ou de la décision du titulaire du droit de préemption de renoncer à l’acquérir. En application de ces principes, la commission émet donc, en l'état des informations portées à sa connaissance, un avis favorable sur ce point de la demande, sous ces réserves.