Avis 20226123 Séance du 03/11/2022
Madame X, pour X, intervenant au nom et pour le compte des sociétés X et X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 27 septembre 2022, à la suite du refus opposé par le directeur général des finances publiques à sa demande de communication, par courrier électronique ou courrier postal, des documents et renseignements suivants ayant servis au calcul de l’imposition concernant les invariants n°13 113 0519609, 13 113 0524846, 13 113 0479181 et 13 113 1032162 :
1) le relevé individuel de propriété 2016, servant de référence pour le lissage ;
2) le relevé individuel de propriété 2017 à 2021, suite à la réforme ;
3) la fiche de calcul du local retenu pour l’imposition en VL 70 et utilisée pour la détermination du planchonnement ;
4) la fiche de calcul du local retenu pour l’imposition à compter de 2017 ;
5) la copie du procès-verbal des locaux de référence de même nature dans la commune pour l’imposition en VL 70 ;
6) la copie de la fiche de calcul du local de référence retenu pour l’imposition en VL 70 ;
7) la copie de la déclaration modèle « CBD », souscrite à l’origine ;
8) la copie de la déclaration 6660 REV-K.
La Commission rappelle, en premier lieu, que les matrices cadastrales constituent un document littéral qui regroupe l'ensemble des relevés de propriété à savoir, pour chaque propriétaire, son adresse, la date et le lieu de naissance, le cas échéant le nom de son conjoint, la liste des parcelles situées sur le territoire de la commune lui appartenant, identifiées par leur numéro et leur adresse, le cas échéant la description du bâti par unité d'évaluation, ainsi que les principaux éléments ayant concouru à l'établissement de la taxe foncière et les éventuelles causes d'exonération de cette taxe. Elle relève que l’accès des tiers aux matrices cadastrales et aux relevés de propriété est régi par les dispositions de l’article L107A du livre des procédures fiscales sur l'application desquelles la Commission est compétente pour se prononcer en vertu du 12° du A de l’article L342-2 du code des relations entre le public et l'administration.
Il résulte des dispositions de l'article L107A du livre des procédures fiscales que sont seules communicables aux tiers les informations énumérées à cet article, à savoir les références cadastrales, l'adresse ou, le cas échéant, les autres éléments d'identification cadastrale des immeubles, la contenance cadastrale de la parcelle, la valeur locative cadastrale des immeubles, ainsi que les noms et adresses des titulaires de droits sur ces immeubles. En revanche, la date et le lieu de naissance du propriétaire, ainsi que, le cas échéant, les motifs d’exonération fiscale, doivent être occultés avant la communication. La Commission note également que la communication des extraits de relevés cadastraux ne saurait être, eu égard à ces dispositions, que « ponctuelle ».
La Commission émet en conséquence un avis favorable, sous ces réserves, à la communication des relevés de propriété sollicités aux points 1) et 2) de la demande.
En deuxième lieu, la Commission estime que les documents mentionnés aux points 7) et 8) sont des documents administratifs communicables au contribuable intéressé sur le fondement de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration. A cet égard, elle rappelle que l'article L103 du livre des procédures fiscales impose le secret professionnel « à toutes les personnes appelées à l'occasion de leurs fonctions ou attributions à intervenir dans l'assiette, le contrôle, le recouvrement ou le contentieux des impôts, droits, taxes et redevances prévus au code général des impôts » et que le même article prévoit que « le secret s'étend à toutes les informations recueillies à l'occasion de ces opérations ». Ces dispositions font notamment obstacle, en application du h) du 2° de l’article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration, à la communication à des tiers des informations concernant un contribuable, en l’absence d’accord exprès de sa part, dès lors que ce tiers n’est pas débiteur solidaire de cet impôt. Elle émet, en l’espèce, un avis favorable sur ces deux points, Madame X, pour X, intervenant au nom et pour le compte des sociétés intéressées.
En dernier lieu, s’agissant du surplus, la Commission relève, d’abord, s'agissant du document sollicité au point 5), que la demande porte sur le procès-verbal qui comporte les évaluations de la valeur locative des locaux commerciaux, des locaux industriels et des maisons exceptionnelles de référence visés aux articles 1497 et 1498 du code général des impôts, qui doivent servir de base au calcul des impositions directes locales. Concernant le cas particulier des locaux industriels et des établissements spéciaux, l’article 1499 du même code dispose que : « La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d’État ».
La Commission relève ensuite qu'en application de l'article 1504 du code général des impôts, les locaux de référence en question sont choisis par le représentant de l'administration et par la Commission communale des impôts directs. Après harmonisation avec les autres communes du département, la liste en est arrêtée par le service des impôts. Il en est de même en cas de désaccord entre le représentant de l'administration et la Commission.
La Commission en déduit, tout d'abord, que ces procès-verbaux, produits par l'Etat dans le cadre de ses missions de service public, au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, revêtent bien le caractère de documents administratifs soumis au droit de communication prévu par le livre III du même code. Il en va de même de la fiche de calcul procédant à une évaluation foncière.
Elle rappelle, ensuite, qu'en l'absence de révision générale récente des valeurs locatives, la méthode par comparaison prévue au 2° de l'article 1498 du code général des impôts pour l'évaluation des locaux commerciaux et biens divers constitue aujourd'hui une méthode d'évaluation très couramment pratiquée. La méthode par voie d'appréciation directe prévue au 3° du même article ne peut, en outre, être pratiquée que s'il est impossible de fixer la valeur locative par voie de comparaison (par ex. CE, 6 novembre 2006, GIE Good Year Mireval). Le Conseil d'Etat a également précisé, enfin, que le juge de l'impôt, saisi d'une contestation sur la méthode d'évaluation, a l'obligation, lorsqu'il estime irrégulière la méthode d'évaluation initialement retenue par l'administration, de lui substituer la méthode d'évaluation qu'il juge régulière et qu'il doit pour ce faire, dans le cas où il retient la méthode d'évaluation par comparaison, statuer d'office sur le terme de comparaison qu'il estime pertinent, y compris, le cas échéant, si celui-ci est proposé par le contribuable lui-même (CE, 19 novembre 2008, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie c/ SNC X Associés).
La Commission précise que, par suite, bien que les informations contenues dans les procès-verbaux demandés aient été portées à la connaissance de l'administration fiscale à l'occasion d'opérations d'établissement de l'impôt, l'économie générale de ce dispositif fait obstacle à ce que les dispositions de l'article L103 du livre des procédures fiscales puissent être opposées à une demande de communication de ces documents formulée sur le fondement du livre III du code des relations entre le public et l'administration, ainsi que le Conseil d’Etat l’a jugé (CE 18 juillet 2011, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat, porte-parole du Gouvernement, c. société X).
La Commission estime dès lors que les fiches de calcul, mentionnées aux 3), 4) et 6) de la demande, si elles existent, et le procès-verbal mentionné au point 5) sont communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve, le cas échéant, de l’occultation des seuls noms des propriétaires et occupants, couverts par le secret de la vie privée protégé par l'article L311-6 du même code, qui y figureraient en l’espèce.
La Commission émet donc, sous les réserves ainsi rappelées, un avis favorable à la demande et prend note de l'intention prochaine de l'administration de procéder à la communication des documents sollicités.