Avis 20225510 Séance du 03/11/2022
Madame X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 13 septembre 2022, à la suite du refus opposé par la directrice générale du centre hospitalier François Quesnay à sa demande de communication, par voie postale à son domicile, afin de défendre la mémoire de la défunte et de faire valoir ses droits, sur le fondement de l'article L1110-4 du code de la santé publique, des documents suivants relatifs à sa mère, Madame X, née le X et décédée le X :
1) les documents signés, entre 2015 et 2021, désignant la personne de confiance ;
2) l'intégralité du dossier médical, pour la période de janvier à avril 2021, dans les services cardiologie, pneumologie, et autres ;
3) le document écrit de sa mère, dans lequel elle s’opposerait à la communication des pièces de son dossier.
En l’absence de réponse de la directrice générale du centre hospitalier François Quesnay à la demande qui lui a été adressée, la commission rappelle qu'en application des dispositions combinées des articles L1110-4 et L1111-7 du code de la santé publique, telles que le Conseil d'État les a interprétées, les informations médicales concernant une personne décédée sont communicables à ses ayants droit sous réserve que cette demande se réfère à l'un des trois motifs prévus à l'article L1110-4 - à savoir connaître les causes du décès, faire valoir leurs droits ou défendre la mémoire du défunt -, dans la mesure strictement nécessaire au regard du ou des objectifs poursuivis et à condition que le patient ne s'y soit pas opposé de son vivant.
Ces dispositions n'instaurent donc au profit des ayants droit d'une personne décédée qu'un droit d'accès limité à certaines informations médicales, et non à l’entier dossier médical.
A cette fin, la commission souligne que si l’objectif relatif aux causes de la mort n’appelle, en général, pas de précisions supplémentaires de la part du demandeur, il en va différemment des deux autres objectifs. Invoqués tels quels, ils ne sauraient ouvrir droit à communication d’un document médical. Le demandeur doit ainsi préciser les circonstances qui le conduisent à défendre la mémoire du défunt ou la nature des droits qu’il souhaite faire valoir, afin de permettre à l’équipe médicale d’identifier le ou les documents nécessaires à la poursuite de l’objectif correspondant.
La commission précise ensuite que l’application de ces dispositions à chaque dossier d’espèce relève de l’équipe médicale qui a suivi le patient décédé, ou, à défaut, d’autres médecins compétents pour apprécier si l’ensemble du dossier médical ou seulement certaines pièces se rattachent à l’objectif invoqué, quel qu’il soit (causes du décès, mémoire du défunt, défense de droits). Il n’appartient pas aux médecins chargés de cet examen du dossier d’apprécier l’opportunité de la communication de tout ou partie du dossier, mais seulement l’adéquation des pièces communiquées aux motifs légaux de communication invoqués par le demandeur. L’établissement peut ainsi être conduit, selon les cas, à transmettre l’ensemble du dossier ou bien à se limiter à la communication des pièces répondant strictement à l’objectif poursuivi. L’équipe médicale n’est, en outre, nullement liée par une éventuelle liste de pièces réclamées par le demandeur.
Toutefois, la commission précise que le souhait du patient exprimé de son vivant de s’opposer à la communication d’informations relatives à son dossier médical doit être exprimé de façon claire et non équivoque de sa volonté libre et éclairée de s’opposer à la communication à ses ayants droit des informations visées à l’article L1110-4 du code de la santé publique, comme par un écrit ou, à défaut, tout élément de preuve circonstancié.
Ainsi, à supposer que le patient n’ait pas exprimé de son vivant son opposition à la communication d’informations relatives à son dossier médical, la commission estime que les informations sollicitées au point 2) contenues dans le dossier médical du défunt, si elles se rapportent aux objectifs poursuivis par la demanderesse, lui sont communicables, sous les réserves et selon les modalités précitées. La commission émet donc, dans cette mesure, un avis favorable à la demande sur ce point.
S’agissant des documents sollicités aux points 1) et 3) de la demande, la commission relève, d’une part, que la désignation d’une personne de confiance par un patient et, d’autre part, que la volonté de s’opposer à la communication d’informations relatives au dossier médical du patient ne constituent a priori pas une information concernant la santé de ce dernier au sens et pour l’application de l’article L1111-7 du code de la santé publique, mais a trait à son dossier administratif.
La commission estime, en conséquence, que ces documents sont communicables à « l’intéressé » sur le fondement de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration.
Il ressort de la décision du Conseil d'État du 17 avril 2013, ministre de l'Immigration nationale et du Développement solidaire c/ M. X (n° 337194, mentionnée aux tables du recueil Lebon), que « l'intéressé », au sens de ces dispositions, est la personne directement concernée par le document, c'est-à-dire, s'agissant d'un document contenant des informations qui se rapportent à une personne, soit cette personne elle-même, soit un ayant droit direct de cette personne, titulaire d'un droit dont il peut se prévaloir à raison du document dont il demande la communication.
En l'espèce, la commission observe que Madame X a précisé qu’elle souhaitait obtenir ces documents afin de connaître les causes du décès de sa mère et faire valoir ses droits. En l’état des informations dont elle dispose, la commission estime que les documents sollicités aux points 1) et 3) ne contiennent pas d’information qui se rapporterait aux droits dont se prévaut la fille de la défunte. Par suite, elle émet un avis défavorable à la communication des documents sollicités aux points 1) et 3).