Conseil 20225435 Séance du 13/10/2022
La Commission d'accès aux documents administratifs a examiné lors de sa séance du 13 octobre 2022 votre demande de conseil relative au caractère communicable et modalités de communication, à un agent immobilier, des documents d'urbanisme suivants correspondant à un lotissement de 121 maisons d’habitations et 2 immeubles de 50 logements :
1) le plan de zonage avec classement au plan local d'urbanisme (PLU) de la commune ;
2) l'emprise de la parcelle ;
3) l'estimation des Domaines ;
4) les modalités de la transaction au profit de X et le signataire de la vente du terrain ;
5) la demande du permis d'aménager et de construire (formulaires d'affichage) ;
6) les permis de construire (formulaires d'affichage) ;
7) les arrêtés de demande de permis de construire ;
8) les arrêtés de délivrance des permis d’aménagement et de construire au profit de X ;
9) le plan format « A3 » de la zone constructible.
En premier lieu, s'agissant des points 1) et 9) de la demande, la Commission vous rappelle qu'en matière d'urbanisme, les documents qui se rapportent à un plan local d'urbanisme présentent le caractère de documents administratifs au sens du code des relations entre le public et l'administration, communicables, en tout état de cause, lorsque le projet de plan a été adopté par l'autorité compétente.
En deuxième lieu, s'agissant des points 2) et 4) de la demande, la Commission vous rappelle que le livre III du code des relations entre le public et l'administration garantit à toute personne un droit d’accès aux documents administratifs existants ou susceptibles d’être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant, mais ne fait pas obligation aux autorités administratives de répondre aux demandes de renseignements qui leur sont adressées. Par suite, elle estime que ces deux points portent en réalité sur des renseignements.
En troisième lieu, s'agissant du point 3) de la demande, la Commission vous indique qu'une estimation effectuée par les services de France Domaine constitue un document administratif communicable à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve que cette estimation ait perdu son caractère préparatoire, soit que la transaction ait été conclue, soit que l'administration ait renoncé à son projet d'acquisition ou d'aliénation.
En quatrième lieu, la Commission, qui a pris connaissance de la réponse exprimée par la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, rappelle que la demande de communication de documents administratifs doit être suffisamment précise pour permettre à l'administration d'identifier clairement le ou les documents souhaités, sans l'obliger à procéder à des recherches. En effet, le livre III du code des relations entre le public et l'administration ne fait pas obligation aux administrations de répondre aux demandes trop générales ou insuffisamment précises (CE 27 sept. 1985, Ordre des avocats au barreau de Lyon c/ X, req. n° 56543, X 267. – CE 30 juin 1989, OPHLM de la Ville de Paris, req. n° 83477).
En l'espèce, la Commission relève que l'administré qui vous a saisi sollicite la communication de l'ensemble des demandes et des arrêtés autorisant des constructions ou des aménagements sur un lotissement clairement identifié par votre commune. Bien que cette demande ne soit enfermée dans aucune borne temporelle, la Commission déduit des éléments portés à sa connaissance que cette demande est suffisamment précise pour vous permettre d’identifier les documents sollicités.
La Commission rappelle qu’elle a estimé dans son conseil de partie II n° 20181909 du 25 octobre 2018 que les documents produits et reçus par l’administration en matière d’autorisations individuelles d’urbanisme, tels que les permis de construire, sont en principe communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve que cette communication ne porte pas atteinte à un secret protégé par les articles L311-5 et L311-6 du même code, notamment la sécurité publique ou à la sécurité des personnes et la protection de la vie privée, et qu’ils ne revêtent plus un caractère préparatoire, soit que la décision ait été effectivement prise, y compris par expiration de du délai faisant naître une décision tacite, soit que l'autorité compétente ait renoncé à son projet. En vertu du principe de l’unité du dossier, le droit à communication s’applique à tous les documents du dossier soumis au maire, y compris ceux qui ne sont pas mentionnées par les articles R431-5 à R431-34-1 du code de l’urbanisme, qu’ils émanent du pétitionnaire ou aient été élaborés par l’administration.
La Commission indique, par ailleurs, que lorsque le maire statue, au nom de la commune, par une décision expresse (favorable ou défavorable) sur une demande d’autorisation individuelle d’urbanisme, celle-ci est alors communicable sur le fondement de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales, aux termes duquel : « Toute personne physique ou morale a le droit de demander communication des délibérations et des procès-verbaux du conseil municipal, des budgets et des comptes de la commune et des arrêtés municipaux ». Ce droit d’accès s’étend à l’ensemble des pièces annexées à ces actes (Conseil d’État, 11 janvier 1978, n° 04258, recueil X p. 5). La Commission estime que, s’agissant d’un arrêté portant permis de construire, doivent être regardées comme annexées à l’arrêté les seules pièces qui doivent obligatoirement figurer dans le dossier soumis au maire, en application des articles R431-5 à R431-34-1 du code de l’urbanisme. Les autres pièces, s’il en existe, relèvent du régime du code des relations entre le public et l'administration exposé ci-dessus.
La Commission précise que si l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales a institué un régime spécifique d'accès aux documents des communes, distinct du régime général d'accès aux documents administratifs organisé par les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, et si les exceptions au droit d'accès prévues à l'article L311-6 de ce code ne sont pas opposables à une demande présentée sur le fondement de ces dispositions spéciales, l'exercice de ce droit d'accès particulier ne saurait faire obstacle, par principe, à la protection de secrets protégés par la loi sur d'autres fondements, tel que notamment le secret de la vie privée (CE, 17 mars 2022, n° 449620 ; Conseil d’État, 11 janvier 1978, n° 04258, recueil X p. 5).
En application de ces principes, la Commission considère que doivent être occultés au titre du secret de la vie privée, avant toute communication :
- la date et le lieu de naissance du pétitionnaire ;
- les coordonnées téléphoniques et l'adresse de messagerie électronique du pétitionnaire, qu'il s'agisse d'une personne morale ou d'une personne physique ;
- les coordonnées téléphoniques et l'adresse de messagerie électronique de l'architecte ;
- le nom et les coordonnées (adresse, téléphone et adresse de messagerie électronique) de la personne à laquelle le pétitionnaire souhaite que les courriers de l’administration (autres que les décisions) soient adressés, sauf s'il s'agit de l'architecte, à l'exception de ses coordonnées téléphoniques et de son adresse de messagerie électronique ;
- le nom et les coordonnées (adresse, téléphone et adresse de messagerie électronique) du propriétaire ou du bénéficiaire du permis de construire qui doit s'acquitter de la participation pour voirie et réseaux, s'il est différent du pétitionnaire ;
- la finalité du projet (logement destiné par exemple à la vente ou à la location).
En revanche, la Commission estime qu'il n’y a pas lieu d’occulter le nom et l'adresse du pétitionnaire, cette dernière pouvant s’avérer au demeurant nécessaire à une personne pour notifier son recours contentieux contre le permis de construire, en application de l’article R600-1 du code de l’urbanisme. Sont également communicables le nom et l'adresse de l'architecte, l'objet du permis de construire, la date d'autorisation et la déclaration d'ouverture de chantier.
La Commission vous invite donc à communiquer les documents sollicités aux points 5), 6), 7) et 8), sous les réserves sus-énoncées.
Au surplus, la Commission vous rappelle que, dans le cas de demandes de communication portant sur un volume important de documents, l’administration est fondée à aménager les modalités de communication afin que l’exercice du droit d’accès reste compatible avec le bon fonctionnement de ses services. La Commission en déduit que si la demande porte sur une copie de documents volumineux que l’administration n’est pas en mesure de reproduire aisément compte tenu de ses contraintes matérielles, celle-ci peut inviter le demandeur à venir consulter ces documents sur place et à emporter copie des seuls éléments qu’il aura sélectionnés. Si le demandeur maintient son souhait de recevoir copie des documents, et que la reproduction des documents n’excède pas les possibilités techniques et les moyens de l’administration, celle-ci est fondée à en échelonner l’envoi dans le temps. Elle doit alors en aviser l’intéressé et, dans la mesure du possible, convenir avec lui d’un échéancier de communication. Par ailleurs, si l’administration ne dispose pas des moyens de reproduction nécessaires pour satisfaire une demande de communication portant sur un volume important de documents, elle peut faire établir un devis auprès d’un prestataire de service extérieur. Il lui appartiendra alors d'adresser le devis de ce dernier au demandeur pour qu'il y donne suite, s'il y a lieu.