Avis 20225256 Séance du 13/10/2022

Maître X, conseil de Monsieur X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 29 août 2022, à la suite du refus opposé par le ministre de l'action et des comptes publics à sa demande de communication, par voie dématérialisée, des documents suivants concernant son client : 1) la lettre de mission, le compte-rendu et l’ensemble de ses pièces jointes (notamment les témoignages recueillis) relatifs à l’enquête interne réalisée au mois de novembre 2017, évoquée en page 3 du mémoire en défense produit par l’administration le 13 juillet 2021 dans le cadre de l’instance n°2000882 ; 2) la lettre de mission, le compte-rendu et l’ensemble de ses pièces jointes (notamment les témoignages recueillis) relatifs à l’enquête interne réalisée au mois de juillet 2019 au sujet du conflit opposant son client à son supérieur hiérarchique, Madame X, évoquée dans le même mémoire en défense ; 3) les courriers des 26 décembre 2019 et du 15 janvier adressés au Défenseur des droits en réponse à son courrier du 5 novembre 2019, évoqués dans le mémoire en défense précité, ainsi que l’intégralité de leurs pièces jointes ; 4) le rapport ou le compte rendu de l’enquête administrative qui a dû être réalisée suite au signalement des propos à caractère raciste tenus en novembre 2017 à l’égard de son client, lors d’une mission réalisée au service de la publicité foncière de Lyon ; 5) à défaut, le témoignage de l’agent mis en cause qui a été interrogé par son chef de service, comme le rapporte également le mémoire en défense précité (page 7), ou toute correspondance à ce sujet ; 6) les demandes, évoquées en page 9 du mémoire en défense précité, des chefs de service de ne plus accueillir son client dans leur service ; 7) tout document à portée générale qui fixe les règles de prise en charge des frais de mission (critère d’éloignement, notamment) pour les années 2019, 2020 et 2021, et qui justifierait que « parmi ces pièces figure le justificatif de domicile de l’agent », comme cela est indiqué en page 9 du mémoire précité ; 8) tout document à portée générale qui fixe les règles devant être suivies en cas de changement de domicile au cours des années 2019, 2020, 2021 ; 9) tout courrier ou courriel démontrant qu’un justificatif de domicile a déjà été demandé à d’autres agents que son client lors d’une demande de remboursement de frais de mission et qu’un refus d’indemnisation des frais de mission aurait déjà été opposé à un autre agent pour ce motif ; 10) tout courrier ou courriel de la part d’un agent produisant un justificatif de domicile en vue d’obtenir le remboursement de ses frais de mission ; 11) tout document à caractère général prévoyant des critères objectifs pour déterminer l’ordre d’affectation des brigadiers lors des missions hors de leur résidence administrative ; 12) tout document justifiant que l’administration a bien informé le CHSCT de son refus de respecter les préconisations d’aménagement de poste du médecin de prévention lors de la visite médicale du 12 juin 2019 et toute correspondance intervenue avec le médecin du travail à ce sujet. En l'absence de réponse de la part du ministre de l'action et des comptes publics à la date de sa séance, la commission rappelle, en premier lieu, qu’un rapport d’enquête réalisé par ou à la demande de l'autorité responsable du service public est un document administratif au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, communicable à toute personne qui en fait la demande en vertu de l'article L311-1 de ce code, à la condition, d'une part, que l'enquête soit achevée, d'autre part, que ce document ne présente pas ou plus un caractère préparatoire à une décision en cours d'élaboration. Elle rappelle également qu’en application de l'article L311-6 du code, ne sont toutefois communicables qu'à l'intéressé les mentions qui portent une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable, qui font apparaître un comportement d'une personne physique ou morale dont la divulgation pourrait lui porter préjudice, ou dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée. Est notamment couverte par cette exception, l’identité des auteurs de dénonciations ou de témoignages, dont la divulgation à un tiers, notamment à la personne visée, pourrait, compte tenu de leurs termes et du contexte dans lequel ils s’inscrivent, leur porter préjudice. A défaut de pouvoir rendre impossible l’identification de ces auteurs, l’intégralité de leurs propos doit être occultée. La communication ne peut donc intervenir qu’après disjonction ou occultation des mentions qui porteraient atteinte à l’un de ces intérêts et sous la réserve qu’une telle disjonction ou occultation ne conduise pas à priver de son sens le document sollicité. La commission, qui n’a pas pu prendre connaissance des documents sollicités, émet donc, en application de ces principes et sous ces réserves, un avis favorable à la communication des documents mentionnés aux points 1), 2), 4) et 5) de la demande. La commission rappelle, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article 38 de la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits : « Le Défenseur des droits, ses adjoints, les autres membres des collèges, les délégués et l'ensemble des agents placés sous son autorité sont astreints au secret professionnel pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont connaissance en raison de leurs fonctions, sous réserve des éléments nécessaires à l'établissement des avis, recommandations, injonctions et rapports prévus par la présente loi organique ». Elle estime que ces dispositions font obstacle à ce que les documents recueillis par les agents du Défenseur des droits dans l’exercice de leurs missions soient communiqués à un tiers alors même qu’il est partie à la procédure engagée par l’institution. La commission en déduit que les échanges sollicités au point 3) sont couverts par le secret professionnel résultant des dispositions combinées de l’article 38 de la loi organique du 29 mars 2011 et du h) du 2° de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration et ne sont pas communicables au demandeur. Elle émet donc un avis défavorable à leur communication. La commission estime, en troisième lieu, que les documents visés au point 6) de la demande sont communicables au demandeur, en application de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, sans que l'exception prévue au 3° de cet article ne soit opposable dès lors que les chefs de service sont alors réputés agir dans le cadre de leurs fonctions. Elle estime qu'il en va de même du document visé au point 12). Elle émet, par suite, un avis favorable sur ces points. La commission estime, en quatrième lieu, que les documents administratifs mentionnés aux points 7) à 11), s'ils existent, sont communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve, s'agissant des documents visés aux points 9) et 10), de l'occultation préalable des éventuelles mentions couvertes par le secret en application de l'article L311-6, notamment du secret de la vie privée des tiers. Elle émet donc un avis favorable sur ces points.