Avis 20225180 Séance du 03/11/2022

Monsieur X X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 25 août 2022, à la suite du refus opposé par le directeur chargé des Archives de France à sa demande de consultation, par dérogation aux délais fixés par l'article L213-2 du code du patrimoine, dans le cadre de la disparition de Philippe de Dieuleveult ‐ Expédition Africa‐Raft -, des documents conservés aux Archives nationales sous la cote : - Archives de Guy PENNE, conseiller technique puis conseiller à la présidence de la République pour les affaires africaines et malgaches (juin 1981-octobre 1986) 1) AG/5 (4) /GP/117 (extrait) Zaïre : Préparation des audiences accordées par François Mitterrand à Joseph Désiré MOBUTU, Président de la République du Zaïre, le 30 octobre 1981, le 27 juillet 1983, le 20 septembre 1984, le 2 septembre 1986. Préparation des visites en France de Joseph Désiré MOBUTU, Président de la République du Zaïre, du 16 au 19 avril 1984, du 16 au 18 octobre 1985. Suivi du procès des membres du Parlement : correspondances, documents de travail, notes internes, note d'information, dépêche, rapport. 1981-1986 2) AG/5 (4) /GP/118 Zaïre : Suivi de la situation politique au Zaïre. Réactions à l'entretien accordé par Jean-Pierre COT, Ministre délégué chargé de la coopération, au journal « Jeune Afrique » le 4 août 1982 : correspondances, dépêches, documents de travail, notes internes, presse, lettres. 1981-1986 3) AG/5 (4 )/GP/119 Zaïre : correspondances ; documents de travail ; notes internes. 1981-1986 - Archives de Jean-Christophe MITTERRAND, conseiller technique puis conseiller à la présidence de la République pour les affaires africaines et malgaches (avril 1986- juillet 1992) 4) AG/5 (4) /JCM/31(extrait) Zaïre : correspondance ; notes externes ; notes internes. (extrait) 01/1987-12/1988 La commission rappelle à titre liminaire que, par principe, les documents d'archives sont communicables de plein droit, en vertu de l'article L213-1 du code du patrimoine. Néanmoins, par dérogation, certaines catégories de documents, en raison des informations qu'ils contiennent, ne sont pas immédiatement communicables et ne le deviennent qu’aux termes des délais et dans les conditions, fixés par l'article L213-2 du même code. A cet égard, la commission rappelle qu’en application du 3° du I de l’article L213-2 du code du patrimoine, les documents qui comportent des éléments ayant pour effet de révéler des informations relevant du secret de la défense nationale et qui ont, pour ce motif, fait l'objet d'une mesure de classification mentionnée à l'article 413-9 du code pénal, ou de compromettre les intérêts fondamentaux de l'Etat dans la conduite de la politique extérieure ou la protection de la vie privée, sont communicables de plein droit à l’expiration d’un délai de cinquante ans à compter de la date du document ou du document le plus récent inclus dans le dossier. La commission précise que lorsqu’un dossier d’archives publiques comporte un ou plusieurs documents qui ne sont pas librement accessibles, cette circonstance rend incommunicable l’ensemble des documents inclus dans le dossier, avant l’expiration de tous les délais destinés à protéger les divers intérêts publics ou privés en présence. La commission précise, par ailleurs, qu'en vertu de l'article L213-3 du code du patrimoine, une autorisation de consultation, par anticipation aux délais prévus par l'article L213-2 précité, peut cependant être accordée par l’administration des archives aux personnes, physiques ou morales, qui en font la demande dans la mesure où l'intérêt qui s'attache à la consultation des documents ne conduit pas à porter une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. Cette autorisation requiert l’accord préalable de l'autorité dont émanent les documents, l’administration des archives étant tenue par l’avis donné. La commission rappelle que pour apprécier l'opportunité d'une communication anticipée, elle s'efforce, au cas par cas, de mettre en balance les avantages et les inconvénients d'une communication anticipée, en tenant compte d'une part de l'objet de la demande et, d'autre part, de l'ampleur de l'atteinte aux intérêts protégés par la loi. Conformément à sa doctrine constante (avis de partie II, n° 20050939, du 31 mars 2015), cet examen la conduit à analyser le contenu du document (son ancienneté, la date à laquelle il deviendra librement communicable, la sensibilité des informations qu'il contient au regard des secrets justifiant les délais de communication) et à apprécier les motivations, la qualité du demandeur (intérêt scientifique s'attachant à ses travaux mais aussi intérêt administratif ou familial) et sa capacité à respecter la confidentialité des informations dont il souhaite prendre connaissance. Dans un avis de partie II, n° 20215602, du 4 novembre 2021, la commission a estimé opportun de compléter sa grille d’analyse afin de tenir compte de la décision d’Assemblée n°s 422327 et 431026, du 12 juin 2020, par laquelle le Conseil d’Etat a précisé qu’afin de déterminer s'il y a lieu ou non de faire droit à une demande de consultation anticipée, il convient de mettre en balance d'une part, l'intérêt légitime du demandeur apprécié au regard du droit de demander compte à tout agent public de son administration posé par l'article 15 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 et de la liberté de recevoir et de communiquer des informations protégée par l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et, d'autre part, les intérêts que la loi a entendu protéger. L’intérêt légitime du demandeur doit être apprécié au vu de la démarche qu’il entreprend et du but qu’il poursuit en sollicitant la consultation anticipée d’archives publiques, de la nature des documents en cause et des informations qu’ils comportent. Les risques qui doivent être mis en balance sont ceux d’une atteinte excessive aux intérêts protégés par la loi. La pesée de l’un et des autres s’effectue en tenant compte notamment de l’effet, eu égard à la nature des documents en cause, de l’écoulement du temps et, le cas échéant, de la circonstance que ces documents ont déjà fait l’objet d’une autorisation de consultation anticipée ou ont été rendus publics. En l’espèce, le directeur chargé des Archives de France a informé la commission que son refus était justifié par le fait que la Présidence de la République lui a notifié son opposition à la communication des documents demandés. Tenue par les dispositions de l'article L213-3 du code du patrimoine, il ne pouvait en conséquence qu'opposer un refus. Il a précisé que parmi les documents demandés, un seul correspondait à l’objet des recherches de Monsieur X X et que la communication des autres documents demandés, dont certains sont classifiés, porterait une atteinte excessive au secret de la défense nationale, aux intérêts fondamentaux de l’Etat dans la conduite de la politique extérieure et à la vie privée des personnes intéressées. En l'espèce, la commission relève que ces dossiers ne seront donc librement communicables en intégralité qu'en 2036. Elle déduit, en outre, des informations portées à sa connaissance qu'ils comportent des informations particulièrement sensibles, qui ne sont, à l’exception d’une seule pièce, pas pertinentes pour le demandeur, compte tenu de l’objet de sa recherche. Au terme de la mise en balance des intérêts en présence, la commission estime que la consultation anticipée des fonds d’archives demandés est, en l’espèce, de nature à porter une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. Elle émet, dès lors, un avis défavorable à la demande.