Avis 20224927 Séance du 03/11/2022

Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 9 août 2022, à la suite du refus opposé par le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau d'Aix-en-Provence à sa demande de communication, de préférence sous format EXCEL ou TEXTE, de la liste des membres du barreau contenant notamment les mentions suivantes : 1) leur adresse postale et numérique et moyens de communication ; 2) la date de prestation de serment ; 3) le nom de la société à laquelle ils sont éventuellement attachés. 1. Sur la qualification de document administratif En l'absence de réponse du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau d'Aix-en-Provence à la date de sa séance, la commission rappelle qu'aux termes de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration : « Sont considérés comme documents administratifs, (…), quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission ». Selon l’article L311-1 du même code : « Sous réserve des dispositions des articles L311-5 et L311-6, les autorités mentionnées à l'article L300-2 sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande (...) ». Elle relève, ensuite, qu'en vertu de l’article 17 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, le conseil de l'ordre a pour attribution de traiter toutes questions intéressant l'exercice de la profession d’avocat et de veiller à l'observation des devoirs des avocats ainsi qu'à la protection de leurs droits. A ce titre, il est notamment chargé de statuer sur l’inscription au tableau des avocats. En vertu de l’article 95 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat, il arrête le tableau qui comprend la section des personnes physiques et la section des personnes morales, qu’il publie au moins une fois par an, au 1er janvier de chaque année. Il résulte en outre du 1° bis de l’article 17 de la loi du 31 décembre 1971, introduit par la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle, qu’il incombe à chaque conseil de l’ordre des avocats de communiquer la liste des avocats inscrits au tableau, ainsi que les mises à jour périodiques, au Conseil national des barreaux, selon les modalités fixées par ce dernier. Aux termes de l’article 21-1 de la même loi : « Le Conseil national des barreaux, établissement d'utilité publique doté de la personnalité morale, est chargé de représenter la profession d'avocat notamment auprès des pouvoirs publics. (…) Sur la base des informations communiquées par les conseils de l'ordre en application du 1° bis de l'article 17, il établit, met à jour et met à disposition en ligne un annuaire national des avocats inscrits au tableau d'un barreau (…) ». La commission relève, que dans son avis n° 20191273, du 26 septembre 2019, elle a estimé qu'au regard des compétences respectives confiées par le législateur aux conseils de l'ordre et au Conseil national des barreaux en matière d’organisation de la profession, l’obligation de mettre en ligne un annuaire de la profession a été confiée à ce dernier. Elle en a déduit que l’établissement volontaire par un barreau d’un annuaire public dans son ressort ne peut dès lors être regardé comme présentant un lien suffisamment direct avec les missions de service public que le législateur lui a confiées en matière d’organisation de la profession, telles qu'elles viennent d'être rappelées. Elle a considéré, en conséquence, que le document sollicité n'est pas un document administratif. Elle estime, en l'espèce, nécessaire de revenir sur sa doctrine afin de tenir compte de la décision du Conseil d'Etat du 27 septembre 2022, n° 450737, jugeant que les dispositions précitées confient à l’ordre des avocats une mission de service public d’organisation de la profession d’avocat incluant l’inscription au tableau des avocats de son ressort et sa publication. L’annuaire des avocats inscrits à un barreau comportant les informations demandées, ainsi que la liste des cabinets et autres structures au sein desquelles la profession d’avocat est exercée, dont il n’est pas sérieusement contesté qu’ils existent ou peuvent être établis par extraction des bases de données dont le conseil de l’ordre dispose, sans faire peser sur lui une charge de travail déraisonnable, présentent un lien suffisamment direct avec cette mission de service public. Ils constituent, par suite, des documents administratifs. La commission estime, dès lors, que la liste demandée constitue un document administratif, au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration. 2. Sur le principe de communication : Ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat dans sa décision précitée du 27 septembre 2022, la commission estime que le nom et le prénom d’un avocat inscrit au barreau, son adresse professionnelle, son identifiant et son numéro de toque, sa nationalité, sa date de prestation de serment, le nom de sa structure d’exercice, le numéro d’immatriculation de cette dernière, ses bureaux secondaires et la liste des collaborateurs y exerçant, sa « catégorie professionnelle », ses « groupes de rattachement », l’exercice ou non d’une activité à l’étranger, son barreau d’origine, ses spécialisations, ses champs de compétence, ses activités dominantes, la nature de ses mandats, les langues qu’il parle et les fonctions qu’il au sein de l’ordre ou du Conseil national des barreaux sont librement communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration. Elle considère, en revanche, que le diplôme obtenu et l’université de délivrance, l’année d’obtention du certificat d’aptitude à la profession d’avocat et le centre régional de formation professionnelle des avocats auquel il a été inscrit, la voie d’accès à la profession et les résultats obtenus à l’examen d’entrée au centre régional de formation professionnelle des avocats et à l’examen pour l’obtention du certificat d’aptitude à la profession d’avocat intéressent la vie privée des personnes intéressées et doivent, dès lors, être disjointes ou occultées en application de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration. En l'espèce, la commission relève que la demande porte sur des données librement communicables en application des principes rappelés au point précédent. Elle émet, par suite, un avis favorable à la demande.