Avis 20222779 Séance du 02/06/2022

Maître X, conseil de la Société X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 5 avril 2022, à la suite du refus opposé par le directeur du centre d'action sociale de la ville de Paris à sa demande de copie, par courrier électronique, des documents suivants concernant le marché public d’entretien, de maintenance et de dépannage des systèmes et équipements de sécurité incendie dans des établissements du centre d'action sociale de la ville de Paris (CASVP) en trois lots techniques : 1) la notice d’utilisation du rapport d’attribution‐type d’un appel d’offres soumis à la commission d’appel d’offre ou soumis à la commission d'appel d'offres (CAO) ou à la CAI ; 2) le fichier informatique dénommé « RAO Entretien SSI_v0.doc » ; 3) le document composé de la capture d'écran des informations relatives à ce dernier fichier accessibles via Microsoft Word (chemin - Fichier → Informations) faisant apparaître a minima le nom du fichier, sa date de création , sa date de dernière modification et son nombre de pages. La Commission, qui a pris connaissance des observations du directeur du centre d'action sociale de la ville de Paris, rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit la commission d'appel d'offres à ne pas lui attribuer le marché ne permet pas de refuser la communication de ces documents. Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, Centre hospitalier de Perpignan (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication. Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières…). En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers. La Commission a précisé dans son Conseil n° 20221455 du 21 avril 2022 évoqué ci-dessus, revenant sur sa doctrine antérieure, qu’il en va aussi désormais des factures, bons de commande, états d’acompte, décomptes et autres pièces établies dans le cadre de l’exécution d’un marché public, en tant que ces documents mentionnent les prix unitaires. L'examen de l’offre d’une entreprise attributaire au regard du respect du secret des affaires conduit ainsi la Commission à considérer que l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ne sont pas communicables aux tiers, sans qu’il soit besoin de s’interroger sur le mode de passation, notamment répétitif, du marché ou du contrat, sa nature, sa durée ou son mode d’exécution. L’examen de l’offre des entreprises non retenues au regard des mêmes principes conduit de même la Commission à considérer que leur offre de prix globale est, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’est pas. En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants : - les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ; - dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises. La Commission précise enfin que les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du marché sont librement communicables. S'agissant du document mentionné au point 1), la Commission précise que la méthode de notation des offres utilisée par l’administration est librement et immédiatement communicable dès lors qu’elle figure dans le dossier de consultation des entreprises. En revanche, lorsque cette dernière n’a pas entendu en informer les candidats dans le cadre de la procédure de consultation, comme l’y autorise la jurisprudence administrative (CE, 31 mars 2010, Collectivité territoriale de Corse, n° 334279 ; CE, 21 mai 2010, Commune d’Ajaccio, n° 333737), la méthode de notation utilisée ne deviendra communicable qu’une fois le marché signé. Ce document, s’il comporte une information générale telle qu’une formule mathématique ou une échelle de notation, sera alors librement communicable à toute personne en faisant la demande. La Commission, qui a pu prendre connaissance du document sollicité, estime que celui-ci, alors même qu'il comporte des recommandations pour la préparation des rapports d'analyse susceptible d'être utilisées dans le cadre de futures consultations, conserve un caractère très général et, à ce titre, constitue un document administratif communicable à toute personne qui en ferait la demande en application des dispositions de l'article L.311-1 du code des relations entre le public et l'administration. Elle émet, dès lors, un avis favorable sur ce point. S'agissant du document mentionné au point 2), la Commission estime que le document est communicable en tant seulement qu'il le concerne ainsi que l'attributaire, sous la réserve tenant au secret des affaires. Elle émet sous ces réserves un avis favorable. A cet égard, la Commission précise que si l’article L311-9 du code des relations entre le public et l'administration indique que l’accès aux documents administratifs s’exerce au choix du demandeur par courrier électronique et sans frais lorsque le document est disponible sous forme électronique, cette disposition n’implique pas que le document revête un format précis. La Commission en déduit que le format électronique retenu pour la communication du document doit être compatible avec l’occultation des mentions couvertes par le secret des affaires. Enfin, la Commission qui prend note de l'intention de l'administration de communiquer le document mentionné au point 3), estime que ce document est communicable à toute personne qui en fait la demande en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration. Elle émet, dès lors, un avis favorable sur ce point.