Avis 20222506 Séance du 23/06/2022

Madame X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 18 avril 2022, à la suite du refus opposé par le directeur général des patrimoines à sa demande de consultation, par dérogation aux délais fixés par l'article L.213-2 du code du patrimoine, dans le cadre d'une le cadre d'une recherche scientifique intitulée « De la « dérogation » coloniale à « l’adaptation » postcoloniale : retour sur la peine et son exécution dans les collectivités du Pacifique français (Nouvelle‐Calédonie, Polynésie française) » (période 1930‐1989), du dossier conservé aux Archives Nationales site de Pierrefitte sous la cote : - 19980006/140 (Sous-direction des affaires politiques (direction des affaires politiques, administratives et financières de l'outre-mer) DOM-TOM ; Direction des affaires politiques, administratives et financières ; Sous-direction des affaires politiques (1950-1996) - Dossiers géographiques - Nouvelle-Calédonie - Affaires judiciaires - Sans titre - Problèmes liés aux conditions de détention à la prison de Nouméa (1981-1989). La commission rappelle à titre liminaire que, par principe, les documents d'archives sont communicables de plein droit, en vertu de l'article L213-1 du code du patrimoine. Néanmoins, par dérogation, certaines catégories de documents, en raison des informations qu'ils contiennent, ne sont pas immédiatement communicables et ne le deviennent qu’aux termes des délais et dans les conditions, fixés par l'article L213-2 du même code. A cet égard, selon le 3° du I de cet article, les documents qui comportent des informations dont la communication porte atteinte à la protection de la vie privée ne deviennent librement communicables qu’à l’expiration d’un délai de cinquante ans à compter de la date du document ou du document le plus récent inclus dans le dossier. La commission précise, par ailleurs, qu'en vertu de l'article L213-3 du code du patrimoine, une autorisation de consultation, par anticipation aux délais prévus par l'article L213-2 précité, peut cependant être accordée par l’administration des archives aux personnes, physiques ou morales, qui en font la demande dans la mesure où l'intérêt qui s'attache à la consultation des documents ne conduit pas à porter une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. Cette autorisation requiert l’accord préalable de l'autorité dont émanent les documents, l’administration des archives étant tenue par l’avis donné. La commission rappelle que pour apprécier l'opportunité d'une communication anticipée, elle s'efforce, au cas par cas, de mettre en balance les avantages et les inconvénients d'une communication anticipée, en tenant compte d'une part de l'objet de la demande et, d'autre part, de l'ampleur de l'atteinte aux intérêts protégés par la loi. Conformément à sa doctrine constante (avis de partie II, n° 20050939, du 31 mars 2015), cet examen la conduit à analyser le contenu du document (son ancienneté, la date à laquelle il deviendra librement communicable, la sensibilité des informations qu'il contient au regard des secrets justifiant les délais de communication) et à apprécier les motivations, la qualité du demandeur (intérêt scientifique s'attachant à ses travaux mais aussi intérêt administratif ou familial) et sa capacité à respecter la confidentialité des informations dont il souhaite prendre connaissance. En l’espèce, la commission comprend de la réponse du directeur général des patrimoines que le dossier demandé, qui comporte des documents dont la communication est de nature à porter atteinte à la protection de la vie priée de personnes nommément désignées, n’est, à ce stade, pas encore librement communicable. Elle relève, en outre, qu'un refus implicite a été opposé par le ministre des outre-mer à la demande d'autorisation présentée la demanderesse. Elle rappelle, en effet, qu’en application de l’article L213-3 du code du patrimoine, l’administration dispose d’un délai légal de deux mois pour répondre aux demandes d’accès aux archives publiques par dérogation aux délais légaux de communicabilité. L’administration des archives était ainsi tenue de rejeter cette demande. Cependant, la commission relève que les documents demandés intéressent directement la recherche de Madame X, qui souhaite combler un vide historiographique concernant l’histoire de la prison et de l’exécution des peines jusqu’à l’étatisation du service pénitentiaire (1988-1989). Compte tenu de l’intérêt de sa démarche ainsi que de l’engagement de réserve qu’elle a signé, la commission estime que la communication du dossier demandé ne porterait pas, en l’espèce, une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. Elle émet, par suite, un avis favorable à la demande.