Avis 20221968 Séance du 12/05/2022
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 24 mars 2022, à la suite du refus opposé par la présidente de l'Eurométropole de Strasbourg à sa demande de communication des documents suivants couvrant la période 2005 ‐ 2021 :
1) les rapports annuels du délégataire (X) sur l'exploitation du réseau de transports en commun ;
2) les rapports annuels du délégant (CUS / Eurométropole) sur l'exploitation du réseau de transports en commun ;
3) dans l'hypothèse où elles ne figureraient pas dans les rapports précités, les différentes données concernant l'exploitation de chaque ligne de tramway et de bus à haut niveau de service (A, B, C, D, E, F, G, H), notamment :
a) le nombre de kilomètres réalisés sur chaque ligne ;
b) le nombre de voyages réalisés sur chaque ligne ;
c) les dépenses d'exploitation effectuées sur chaque ligne ;
d) les recettes d'exploitation réalisées sur chaque ligne ;
e) la vitesse commerciale constatée sur chaque ligne.
En réponse à la demande qui lui a été adressée, la présidente de l'Eurométropole de Strasbourg a informé la Commission que les documents sollicités au point 2) sont inexistants. La commission déclare, dans cette mesure, la demande d’avis sans objet.
S’agissant du surplus, la Commission rappelle que le rapport annuel du délégataire, remis à l'autorité délégante en vertu de l'article L1411-3 du code général des collectivités territoriales, dont celle-ci prend acte et qui est joint au compte administratif en vertu de l'article R1411-8 du même code, a le caractère de document administratif au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration et est communicable à ce titre. La Commission relève que si, de manière générale, les pièces annexées aux délibérations, au budget et aux comptes des organes délibérants des communes, des établissements de coopération intercommunale et des syndicats mixtes sont communicables à toute personne qui en fait la demande en application, respectivement, des articles L2121-26, L5211-46 et L5721-6 du code général des collectivités territoriales, les documents remis par le délégataire de service public de l’organe délibérant ne sont mis à la disposition du public, en vertu de l'article L1411-13 du même code, dans sa version en vigueur avant la codification, que sous les réserves prévues à l'article 6 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, désormais codifiées à l'article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. Bien qu'elle ne soit pas compétente pour interpréter ledit article L1411-13, la Commission estime qu'il en résulte que les exceptions prévues à l'article 6 précités sont opposables en la matière. Elle relève en outre que si cet article 6 a été codifié aux articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, et que dans sa version en vigueur depuis le 1er avril 2016, l’article L1411-13 ne mentionne plus que les réserves prévues à l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration, il ne ressort ni des travaux préparatoires de la loi d’habilitation ni de ceux de l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession qui a mis à jour la référence à l’article 6 précité, que les auteurs de ces textes ont entendu modifier l’étendue des réserves opposables à cette mesure de publicité.
En conséquence le rapport du délégataire de service public est communicable à toute personne le demandant, sous réserve de l'occultation des mentions protégées par l'article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, et relevant du secret des affaires ou de la protection due à la vie privée. A la différence des informations relatives aux moyens humains et techniques du délégataire ainsi que celles reflétant sa stratégie commerciale, qui sont couvertes par le secret des affaires, les informations permettant d'apprécier la qualité et le coût du service devant être rendu aux usagers, sont librement communicables.
La Commission rappelle, en outre, que de façon générale, les informations relatives aux moyens humains et techniques et celles reflétant la stratégie commerciale du délégataire sont couvertes par le secret des affaires. Ainsi, la Commission a estimé que les charges et produits de l'exploitation d'un service public délégué ne sont pas couverts par ce secret : seules doivent être occultées dans les comptes de résultat et les comptes prévisionnels, les données faisant apparaître de façon détaillée les charges de personnel et de fonctionnement, qui reflètent les moyens techniques et humains de l'entreprise délégataire (conseil n° 20171851), dans cette mesure, le résultat de l'exercice comptable ainsi que les charges et produits d'exploitation sont communicables. Elle a également considéré (conseil n° 20171851) que le programme de renouvellement des équipements par l'exploitant d'un service public était communicable sans occultations, ainsi que les données tarifaires et la redevance perçue dès lors que celle-ci a un impact sur le coût du service (conseils n° 20150349 et 20170902). Les tableaux d'amortissement sont également communicables sous réserve du secret des affaires (avis n° 20144069 et 20171373) et à condition que la demande porte sur les amortissements de l'activité concédée et non sur les comptes de la société, sauf à ce qu'elle soit dédiée à l'activité comme indiqué précédemment.
Les charges de personnel, les charges de structure et les frais financiers dans l'exploitation de l'activité sont communicables dans leur montant total, alors que les éléments détaillés les concernant sont protégés par le secret des affaires, de même que les effectifs précis des sociétés exploitantes, le montant de leurs actifs et des dettes, le niveau de bénéfice et le taux de rentabilité.
En application de ces principes, la Commission, qui a pris note de l'intention de l'administration de communiquer les documents sollicités, émet un avis favorable à la demande, sous les réserves ainsi rappelées. Elle précise que les informations sollicitées au point 3) de la demande s'apparentent à une demande de renseignements. Toutefois, en supposant qu'elles soient matérialisées dans un ou plusieurs documents facilement identifiables ou qu'un document les retraçant puisse être obtenu par un traitement automatisé d'usage, la Commission estime que les informations mentionnées aux points a) et b) sont librement communicables au demandeur, celles mentionnées aux points c) et d) le sont également, sous réserve du secret des affaires et, enfin, celle mentionnée au point e), qui révèle la stratégie commerciale du délégataire, est quant à elle couverte par ce secret et, à ce titre non communicable.
Elle émet un avis favorable sous l'ensemble de ces réserves.