Conseil 20221399 Séance du 21/04/2022

Conformité, au regard du secret des affaires, des occultations effectuées sur les documents relatifs aux deux marchés des trois dernières années et en cours, portant sur la gestion des populations animales urbaines.
La Commission d'accès aux documents administratifs a examiné, lors de sa séance du 21 avril 2022, votre demande de conseil relative au caractère communicable, à une association, des pièces des accords-cadres à bons de commande relatifs à la gestion des populations animales urbaines conclus par la commune de Toulouse pour les trois dernières années, ainsi que pour l’année en cours. Votre demande porte plus précisément sur le caractère communicable des documents suivants : 1) la méthode utilisée par le titulaire du marché telle que décrite dans le rapport d’analyse des offres ; 2) le montant estimatif établi par les services de la commune ; 3) le bordereau des prix unitaires ; 4) le détail des quantités estimatives ; 5) l’extrait K-Bis ; 6) le DC2 ; 7) les moyens techniques et humains de l’attributaire ; 8) les attestations de norme qualité et les autorisations d’exercice de certaines activités délivrées à l’attributaire et fournies par celui-ci à l’appui de son offre ; 9) le rapport détaillé des captures, euthanasies, stérilisations et suivis, fourni par l’attributaire dans le cadre de l’exécution du contrat ; 10) le détail des prix unitaires figurant dans les factures. En premier lieu, la commission vous rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, « Centre hospitalier de Perpignan » (n°375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication. Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières, etc.). En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité concurrentiel et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers. L’examen de l’offre des entreprises non retenues au regard des mêmes principes conduit de même la commission à considérer que leur offre de prix globale est, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’est pas. En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants : - les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ; - dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres), les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises. La commission vous précise enfin que les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du marché sont librement communicables. Par suite, la commission estime que les documents visés aux points 3), 4), 7) et 8) ne sont pas communicables. De même, les mentions visées au point 1) qui révèlent des détails techniques de l’offre sont couvertes par le secret des affaires et, à ce titre, doivent être occultées du rapport d’analyse des offres. En second lieu, la commission considère que seules les pièces de candidature remises par l’attributaire sont communicables sous réserve de l’occultation des mentions couvertes par le secret des affaires dans les conditions sus-rappelées. A ce titre, s’agissant du point 6), les mentions du DC2 relatives au chiffre d’affaires de l’attributaire doivent être occultées en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. S’agissant de l’extrait K-Bis d’immatriculation principale au registre du commerce et des sociétés, la commission constate qu’il contient des informations relatives à l’identification de la personne morale, à l’activité de l’entreprise, certaines informations complémentaires relatives aux procédures de redressement ou de liquidation judiciaire, ou encore ses modalités générales de contrôle et de gestion. Ces dernières mentions peuvent contenir des informations relevant de la vie privée du gérant ou de l’équipe dirigeante (adresse personnelle, date et lieu de naissance, nationalité, etc.). La commission considère par conséquent que le document visé au point 5) est communicable à toute personne en faisant la demande sous réserve des mentions susceptibles d’être couvertes par le secret de la vie privée. En troisième lieu, s’agissant des factures réglées par la commune dans le cadre de l’exécution du marché, la commission rappelle qu’il résulte de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales que « toute personne physique ou morale a le droit de demander communication des procès-verbaux du conseil municipal, des budgets et des comptes de la commune et des arrêtés municipaux ». L’ensemble des pièces annexées à ces documents, y compris les pièces justificatives des comptes, telles les factures, sont communicables à toute personne qui en fait la demande selon les modalités prévues par l’article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration. La commission précise toutefois que, si l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales a institué un régime spécifique d'accès aux documents des communes, distinct du régime général d'accès aux documents administratifs organisé par les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, et si les exceptions au droit d'accès prévues à l'article L311-6 de ce code ne sont pas opposables à une demande présentée sur le fondement des dispositions spéciales de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales, l'exercice de ce droit d'accès particulier ne saurait faire obstacle, par principe, à la protection de secrets protégés par la loi sur d'autres fondements, tels que le secret de la vie privée ou le secret industriel et commercial (CE, 17 mars 2022, M. X, n° 449620). La commission estime, par suite, que les factures afférentes à un marché public émises par les communes sont des documents administratifs communicables à toute personne en faisant la demande sur le fondement des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales, sous réserve de l’occultation des mentions couvertes par le secret des affaires. A ce titre, le détail des prix, susceptible, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé, doit être occulté. La commission estime donc que le détail des prix unitaires figurant dans les factures transmises à la commune par l’attributaire du marché, visé au point 10), doit être occulté. En quatrième lieu, la commission vous rappelle que les documents remis à une autorité administrative dans le cadre de l’exécution d’un marché public sont des documents administratifs communicables en application des articles L300-2 et L311-1 du code des relatons entre le public et l’administration. Le rapport détaillé des captures, euthanasies, stérilisations et suivis, fourni par l’attributaire dans le cadre de l’exécution du contrat en cause et visé au point 9), est donc communicable à toute personne qui en fait la demande, sous réserve des éventuelles mentions devant être occultées en application des articles L311-5 et L311-6 du code précité. Par ailleurs, compte tenu de l’objet de la demande qui porte sur la gestion d’une espèce animale, la commission considère que, dans l’hypothèse où ce rapport contiendrait des informations relatives à l’environnement au sens de l’article L124-2 du code de l’environnement, celles-ci seraient alors communicables en application des articles L124-1 et suivants du même code et de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration. Enfin, la commission considère que le montant estimatif du marché établi par les services de la commune, visé au point 2), dès lors qu’il est précisé dans le rapport d’analyse des offres, est communicable à toute personne en faisant la demande en application du livre III du code des relations entre le public et l’administration.