Avis 20220258 Séance du 10/03/2022
Consultation, par dérogation aux délais fixés par l'article L213-2 du code du patrimoine, du dossier de naturalisation de son grand-père paternel X, conservées aux Archives nationales sous la cote :
- 20010517/108
Dossier 8182 DX 1973 : demande de naturalisation de X né le X à X.
Madame X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 19 janvier 2022, à la suite du refus opposé par le directeur général des patrimoines et de l’architecture à sa demande de consultation, par dérogation aux délais fixés par l'article L213-2 du code du patrimoine, du dossier de naturalisation de son grand-père paternel X, conservées aux Archives nationales sous la cote :
- 20010517/108
Dossier 8182 DX 1973 : demande de naturalisation de X né le X à X.
La commission rappelle qu’en application du 3° du I de l’article L213-2 du code du patrimoine, les documents dont la communication porte atteinte au secret de la vie privée, ainsi que ceux qui font apparaître le comportement d’une personne dans des conditions susceptibles de lui porter préjudice, sont couverts par un délai de communication de cinquante ans à compter de la date du document ou du document le plus récent inclus dans le dossier. Ce délai de protection trouve en l’espèce à s'appliquer, rendant les documents demandés librement communicables en 2024.
La commission précise, en outre, qu'en vertu de l'article L213-3 du code du patrimoine, une autorisation de consultation, par anticipation aux délais prévus par l'article L213-2 précité, peut cependant être accordée par l’administration des archives aux personnes, physiques ou morales, qui en font la demande dans la mesure où l'intérêt qui s'attache à la consultation des documents ne conduit pas à porter une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. Cette autorisation requiert l’accord préalable de l'autorité dont émanent les documents.
La commission relève que la demande de consultation par dérogation présentée par Madame X a, en l’espèce, été rejetée par le directeur général des patrimoines et de l’architecture, en l'absence de l'accord préalable du ministre de l’Intérieur.
La commission relève que le refus était fondé sur le fait que Madame X n’agissait pas en qualité d’intéressée, mais de tiers au dossier. Elle précise, à cet égard, que l’article L213-3 du code du patrimoine a précisément pour but de permettre aux tiers d’accéder aux documents non librement communicables.
En réponse à la demande qui lui a été adressée, le directeur général des patrimoines a par ailleurs précisé, dans un premier temps, que compte tenu des motivations d’ordre administratif de la demanderesse, de son engagement à ne pas divulguer d’informations non librement communicables et, enfin de l’échéance prochaine, en 2024, du délai d’incommunicabilité, la demande lui paraissait pouvoir recevoir une suite favorable.
Par un courrier du 15 février 2022, il a informé la commission, dans un second temps, que la sous-direction de l’accès à la nationalité française du ministère de l’intérieur était, depuis lors, revenu sur son avis défavorable et avait autorisé la consultation préalable du dossier de demande de naturalisation demandé à l’exception, toutefois, de la feuille d’instruction de ce dossier, qui comprend l’analyse faite par des agents nommément identifiés, de la situation du grand-père de la demanderesse.
La commission déduit de ces éléments que la demande d’avis conserve son objet, dans cette seule mesure.
Elle rappelle que pour apprécier l'opportunité d'une consultation anticipée, elle s'efforce, au cas par cas, de mettre en balance les avantages et les inconvénients d'une communication anticipée, en tenant compte d'une part de l'objet de la demande et, d'autre part, de l'ampleur de l'atteinte aux intérêts protégés par la loi.
Conformément à sa doctrine constante (avis de partie II, n° 20050939, du 31 mars 2015), cet examen la conduit à analyser le contenu du document (son ancienneté, la date à laquelle il deviendra librement communicable, la sensibilité des informations qu'il contient au regard des secrets justifiant les délais de communication) et à apprécier les motivations, la qualité du demandeur (intérêt scientifique s'attachant à ses travaux mais aussi intérêt administratif ou familial) et sa capacité à respecter la confidentialité des informations dont il souhaite prendre connaissance.
En l’espèce, la commission constate que la direction des Archives de France a pour sa part émis un avis favorable à la demande en faisant valoir l’échéance prochaine, en 2024, du délai de cinquante ans prévu par le 3) du I de l’article L213-2 du code du patrimoine et en soulignant, par ailleurs, que la feuille d’instruction est une synthèse des informations relatives à Monsieur X et qui sont développées dans les autres documents du dossier dont la consultation a finalement été accordée.
S’agissant par ailleurs de l’argument tenant à la sécurité des agents signataires de ce document, la commission rappelle que l’atteinte à la sécurité ne se présume pas mais doit être établie. Elle estime, comme la direction des Archives de France, que le risque d’atteinte n’est, en l’espèce, pas caractérisé s'agissant d'une demande individuelle d'accès dérogatoire présentée sur le fondement du code du patrimoine.
Au terme de la mise en balance des intérêts en présence, la commission estime que la consultation de la feuille d’instruction du dossier de naturalisation de Monsieur X par sa petite-fille, par anticipation aux délais légaux de communicabilité, n’est pas de nature à porter une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. Elle émet, dès lors, un avis favorable à la demande.