Avis 20216594 Séance du 31/03/2022
Communication, par publication sans délai, par lui-même ou par l'ENS, des statistiques anonymisées et agrégées par année et département relatives aux attributions des contrats doctoraux spécifiques aux normaliens (CDSN), alors que l'ENS en refuse la diffusion par un tiers mais souhaite les diffuser elle-même après leur présentation au prochain conseil d'administration ou conseil scientifique.
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 15 octobre 2021, à la suite du refus opposé par le directeur de l'école normale supérieure de Paris à sa demande de communication, par publication sans délai, par lui-même ou par l'ENS, des statistiques anonymisées et agrégées par année et département relatives aux attributions des contrats doctoraux spécifiques aux normaliens (CDSN), alors que l'ENS en refuse la diffusion par un tiers mais souhaite les diffuser elle-même après leur présentation au prochain conseil d'administration ou conseil scientifique.
I. Rappel du cadre juridique :
La commission, qui a pris connaissance de la réponse du directeur de l'école normale supérieure de Paris, rappelle en premier lieu, qu’aux termes de l’article L300-1 du code des relations entre le public et l’administration : « Le droit de toute personne à l'information est précisé et garanti par les dispositions des titres Ier, III et IV du présent livre en ce qui concerne la liberté d'accès aux documents administratifs ». Aux termes de l’article L300-2 du même code : « Sont considérés comme documents administratifs, au sens des titres Ier, III et IV du présent livre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission. Constituent de tels documents notamment les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions, codes sources et décisions ». Aux termes de l’article L311-1 de ce code : « Sous réserve des dispositions des articles L311-5 et L311-6, les administrations mentionnées à l'article L300-2 sont tenues de publier en ligne ou de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent livre ».
La commission rappelle, en deuxième lieu, que l'article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration dispose que : « L'accès aux documents administratifs s'exerce, au choix du demandeur et dans la limite des possibilités techniques de l'administration : 1° Par consultation gratuite sur place, sauf si la préservation du document ne le permet pas ; 2° Sous réserve que la reproduction ne nuise pas à la conservation du document, par la délivrance d'une copie sur un support identique à celui utilisé par l'administration ou compatible avec celui-ci et aux frais du demandeur, sans que ces frais puissent excéder le coût de cette reproduction, dans des conditions prévues par décret ; 3° Par courrier électronique et sans frais lorsque le document est disponible sous forme électronique ; 4° Par publication des informations en ligne, à moins que les documents ne soient communicables qu'à l'intéressé en application de l'article L311-6 ». En complément de la possibilité de demander la consultation ou l’envoi d’un document administratif sous format papier ou numérique, la loi sur une République numérique a désormais introduit une quatrième modalité de communication par la mise en ligne sur internet du document sollicité.
La commission précise, en troisième lieu, que l'article L312-1-1 du même code prévoit, en outre, que les administrations peuvent rendre publics les documents administratifs qu’elles produisent ou reçoivent. Le législateur leur a par ailleurs imposé l’obligation de publier en ligne certaines catégories particulières de documents. Le 1° de l'article L312-1-1 du même code prévoit ainsi que les collectivités territoriales de plus de 3 500 habitants et les administrations dont le nombre d'agents est supérieur à 50 équivalents temps plein doivent publier les documents qu'elles communiquent en application des procédures prévues au titre Ier du livre III du ce code, à condition que ces documents soient effectivement disponibles sous forme électronique.
La publication en ligne de documents administratifs par l’administration ne peut toutefois s’effectuer que sous réserve du respect des conditions posées à l’article L312-1-2 du même code, qui dispose que : « Sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires, lorsque les documents et données mentionnés aux articles L312-1 ou L312-1-1 comportent des mentions entrant dans le champ d'application des articles L311-5 ou L311-6, ils ne peuvent être rendus publics qu'après avoir fait l'objet d'un traitement permettant d'occulter ces mentions. / Sauf dispositions législatives contraires ou si les personnes intéressées ont donné leur accord, lorsque les documents et les données mentionnés aux articles L312-1 ou L312-1-1 comportent des données à caractère personnel, ils ne peuvent être rendus publics qu'après avoir fait l'objet d'un traitement permettant de rendre impossible l'identification de ces personnes. Une liste des catégories de documents pouvant être rendus publics sans avoir fait l'objet du traitement susmentionné est fixée par décret pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. (...) ».
Il résulte de la combinaison de ces dispositions qui définissent le droit commun de l’accès aux documents administratifs, qu’un document administratif qui ne comporte aucune mention relevant d’un secret protégé est librement communicable à toute personne qui en fait la demande. L'article L311-9 du code précité pose, en outre, le principe du libre choix du demandeur de la modalité de communication. En outre, l’administration est tenue, non seulement à la demande mais également de sa propre initiative, de publier en ligne certaines catégories de documents, au nombre desquelles les documents qu'elle communique en application du titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration.
II. Application au cas d'espèce :
En l’espèce, la commission relève que la demande porte sur un document administratif librement communicable à toute personne qui le demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration et qui a d'ailleurs été communiqué à Monsieur X, par courriel du 9 mars 2022. Elle en déduit que ce document peut, dès lors, être mis en ligne, à la demande de Monsieur X, en application des dispositions de l'article L311-9 du même code. Elle constate que ce document est, par ailleurs, au nombre de ceux qui sont publiables en ligne en application du 1° de l'article L312-1-1 du code des relations entre le public et l'administration.
La commission observe que, dans sa réponse, le directeur de l'école normale supérieure de Paris a indiqué que le document sollicité était désormais accessible sur le site intranet de l'établissement. La commission estime toutefois que la mise en ligne d’un document sur un site intranet, qui n’est accessible qu’à un nombre restreint de personnes, ne saurait s’assimiler à une diffusion publique au sens du quatrième alinéa de l’article L311-2 du code des relations entre le public et l’administration.
Elle émet, dès lors, un avis favorable à la demande.
La commission ajoute, s'agissant de sa diffusion par le demandeur lui-même, que ce document contient des informations publiques, au sens de l’article L321-1 du code des relations entre le public et l'administration, qui peuvent ainsi être utilisées par toute personne qui le souhaite à d’autres fins que celles de la mission de service public pour les besoins de laquelle les documents ont été élaborés, les limites et conditions de cette réutilisation étant fixées par le titre II du livre III de ce code.
A cet égard, la commission rappelle, d'une part, qu'aux termes de l'article L322-1 du code des relations entre le public et l’administration : « Sauf accord de l'administration, la réutilisation des informations publiques est soumise à la condition que ces dernières ne soient pas altérées, que leur sens ne soit pas dénaturé et que leurs sources et la date de leur dernière mise à jour soient mentionnées » et, d'autre part, qu'aux termes de l'article L322-2 du même code, « Les informations publiques comportant des données à caractère personnel peuvent faire l'objet d'une réutilisation soit lorsque la personne intéressée y a consenti, soit si l'autorité détentrice est en mesure de les rendre anonymes ou, à défaut d'anonymisation, si une disposition législative ou réglementaire le permet. / La réutilisation d'informations publiques comportant des données à caractère personnel est subordonnée au respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. »
Enfin, la commission prend note des nombreuses demandes de communication que le demandeur a adressées aux services de l’école normale supérieure.
La commission précise qu'une demande peut être considérée comme abusive lorsqu'elle vise, de façon délibérée, à perturber le fonctionnement d'une administration ou si son traitement impose à l'administration des efforts disproportionnés au regard des moyens dont elle dispose. Tel peut être le cas des demandes récurrentes, portant sur un volume important de documents traitant, le cas échéant, de la même affaire, des demandes que le service sollicité est manifestement dans l'incapacité matérielle de traiter, ou encore des demandes portant sur des documents auxquels le demandeur a déjà eu accès. La commission fonde également son appréciation sur les éléments portés à sa connaissance par le demandeur et l'administration quant au contexte dans lequel s'inscrit la demande et aux motivations qui la sous-tendent.
En l'espèce, compte tenu des éléments portés à sa connaissance, il n'est pas apparu à la commission que la présente demande présenterait un caractère abusif. Elle invite toutefois le demandeur à faire preuve de modération et de discernement dans l’exercice du droit d’accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l’administration, et rappelle que l’administration n’est pas tenue de donner suite aux demandes présentant un caractère abusif.